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Cour administrative d'appel de Marseille, 2ème chambre - formation à 3, du 22 février 2005, 03MA01229, inédit au recueil Lebon

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Président : M. GOTHIER

Rapporteur : Mme Joëlle GAULTIER

Commissaire du gouvernement : Mme FERNANDEZ

Avocat : SCP VIAL-PECH DE LACLAUSE-ESCALE


REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la requête, enregistrée le 19 juin 2003, présentée pour M. Jean-Luc X, élisant domicile ..., par la SCP d'avocats Vial-Pech de Laclause-Escale ; M. X demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du 9 avril 2003 par lequel le Tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande indemnitaire formé à l'encontre de la commune d'Argelès sur mer ;
2°) d'accueillir sa demande à hauteur de 35.000 euros, augmentée de 2.000 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

Vu le jugement attaqué ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;
Vu la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;
Vu le code de justice administrative ;


Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 18 janvier 2005,
- le rapport de Mme Gaultier, rapporteur ;
- les observations de Me Brousse substituant Me Nese, avocat de la commune d'Argelès sur mer ;
- et les conclusions de Mme Fernandez, commissaire du gouvernement ;


Sur l'étendue du litige et la recevabilité des conclusions indemnitaires :
Considérant que M. Jean Luc X, agent d'entretien de la commune d'Argelès-sur-mer, demande à la Cour d'annuler le jugement du 9 avril 2003 par lequel le Tribunal administratif de Montpellier a rejeté l'ensemble des demandes indemnitaires qu'il a dirigées contre la commune d'Argelès-sur-mer, son employeur, à raison de divers agissements irréguliers à son égard, intervenus à l'occasion de ses problèmes de santé ;

Considérant que la commune d'Argelès-sur-mer fait valoir en appel que la demande d'indemnisation n'est, en tout état de cause, recevable qu'en tant qu'elle concerne des faits intervenus pendant la période de février à décembre 2000, pour lesquels M. X lui a adressé une demande préalable le 2 février 2001 ; qu'il résulte de l'examen des écritures de première instance que la commune n'a pas répondu aux nouvelles conclusions indemnitaires, reposant sur des faits postérieurs, présentées par M. X dans son dernier mémoire de première instance ; qu'ainsi que le soutient la commune, le contentieux n'est pas lié en ce qui concerne ces nouvelles conclusions ; que la commune est, par suite, fondée à soutenir que M. X n'est, en tout état de cause, pas fondé à se plaindre de ce que sa demande indemnitaire ait été rejetée en tant qu'elle concernait des faits postérieurs à décembre 2000 ;

Sur les agissements fautifs de la commune d'Argelès-sur-mer :
Considérant qu'il résulte d'un principe général du droit, dont s'inspirent tant les dispositions du code du travail relatives à la situation des salariés qui, pour des raisons médicales, ne peuvent plus occuper leur emploi que les règles statutaires applicables dans ce cas aux fonctionnaires, que lorsqu'il a été médicalement constaté qu'un salarié se trouve de manière définitive atteint d'une inaptitude physique à occuper son emploi, il appartient à l'employeur de le reclasser dans un autre emploi et, en cas d'impossibilité, de prononcer, dans les conditions prévues pour l'intéressé, son licenciement ; que ce même principe implique qu'en cas d'inaptitude partielle ou temporaire, l'employeur s'efforce d'adapter la situation de travail du salarié, dans la limite des possibilités dont il dispose ;

Considérant, en premier lieu, que M. X, qui était affecté au service de la voirie et des espaces verts de la commune d'Argelès-sur-mer, a subi, en mars 2000, une opération chirurgicale affectant les sinus et a produit, à sa reprise du travail, des certificats médicaux faisant état d'une allergie aux graminées et aux acariens ; que la commune ne conteste pas qu'aucun aménagement de ses attributions n'ayant alors été effectué, l'intéressé a subi d'importantes rechutes, donnant lieu à arrêts de maladie, notamment au cours des mois de juillet et d'août 2000 ; que le 6 octobre 2000, le médecin du travail a émis un certificat faisant état de l'aptitude au travail de M. X, avec des réserves importantes tenant à l'exposition aux travaux de balayage ou débroussaillage et à tous les travaux l'exposant aux poussières et irritants respiratoires ; qu'au cours du mois d'octobre 2000 et ce, pendant dix huit jours, les supérieurs hiérarchiques ont alors ordonné à M. X de demeurer, sans aucune tâche à accomplir, dans le réfectoire des ateliers municipaux, au regard de ses collègues de travail ; que cette situation n'a pris fin qu'après constat d'huissier et retentissement médiatique donné à l'affaire ;

Considérant que, pour tenter de s'exonérer de l'accusation de harcèlement moral, voire de sanction disciplinaire déguisée portée contre elle par M. X, la commune d'Argelès-sur-mer se borne à soutenir qu'elle aurait demandé au salarié de patienter dans le réfectoire, lieu clos présentant la sécurité requise , dans l'attente de l'avis du comité médical, lequel n'a été réuni que le 7 décembre 2000, et qu'en tout état de cause, cette privation de fonctions provisoire, décidée dans l'intérêt du salarié, constituerait une mesure d'ordre intérieur, insusceptible d'être discutée au contentieux ; qu'il résulte toutefois des témoignages versés au dossier qu'il y a eu véritable confinement, imposé à l'intéressé malgré ses protestations et ses demandes d'attribution de fonctions ; que la commune d'Argelès, qui emploie deux cent salariés, n'a aucunement démontré avoir été dans l'impossibilité absolue et, ce pendant toute cette période, de confier de quelconques tâches, même provisoires, à M. X au sein de l'un ou l'autre de ses services ; que, dans les circonstances de l'espèce, ce comportement de la commune, qui avait pour objectif réel de déstabiliser un salarié dont les problèmes de santé lui posaient un problème de gestion du personnel, a fait grief à l'intéressé et constitue une faute de nature à engager la responsabilité communale ;

Sur la réparation :
Considérant que le lien de causalité entre les agissements de la commune, tels qu'ils ont été relatés ci-dessus, et la multiplication des arrêts pour maladie de M. X ayant donné lieu à rémunération à demi-traitement n'est pas suffisamment établi pour que la demande d'indemnisation des pertes de salaires puisse être accueillie ; qu'il sera toutefois fait une juste appréciation du préjudice moral et des troubles dans les conditions d'existence subis par le requérant en condamnant la commune d'Argelès-sur-mer à lui verser une indemnité de 3.000 euros ;



Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montpellier a intégralement rejeté ses demandes, en tant qu'elles concernaient le comportement de la commune à son encontre au cours de la période de février à décembre 2000, et notamment au cours du mois d'octobre 2000 ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que M. X, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à verser à la commune d'Argelès-sur-mer une quelconque indemnité au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de faire application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative en condamnant la commune d'Argelès-sur-mer à verser à M. X une indemnité de 1.500 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;


DECIDE :

Article 1 : La commune d'Argelès-sur-mer est condamnée à verser à M. X une indemnité de 3.000 euros (trois mille euros) à raison de son comportement fautif à l'égard de l'intéressé, ainsi qu'une indemnité de 1.500 euros (mille cinq cents euros) au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
Article 2 : Le jugement du Tribunal administratif de Montpellier est annulé en tant qu'il concerne la demande indemnitaire de M. X fondée sur les agissements de la commune à son égard au titre de la période de février à décembre 2000.
Article 3 : Le surplus des conclusions de M. X est rejeté.
Article 4 : Les conclusions présentées par la commune d'Argelès-sur-mer sont rejetées.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. X, à la commune d'Argelès-sur-mer et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.
03MA01229
2






Source : DILA, 01/05/2010, https://www.legifrance.gouv.fr/

Informations sur ce texte

TYPE DE JURISPRUDENCE : Juridiction administrative

JURIDICTION : Cour administrative d'appel

SIEGE : CAA Marseille

Date : 22/02/2005