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CAA de MARSEILLE, 6ème chambre - formation à 3, 09/11/2015, 15MA01938, Inédit au recueil Lebon

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Président : M. MOUSSARON

Rapporteur : M. Laurent MARCOVICI

Commissaire du gouvernement : M. THIELE

Avocat : ELEOM NIMES


REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par une requête, enregistrée le 2 décembre 2013, le conseil régional de l'ordre des architectes du Languedoc-Roussillon a demandé au tribunal d'annuler la décision attribuant le marché de maîtrise d'oeuvre de l'école intercommunale de musique de la communauté de communes de Petite Camargue (CCPC) au cabinet Stéphan Hermet architecture. Elle a demandé d'enjoindre à l'administration de relancer la procédure d'attribution du marché de maîtrise d'oeuvre pour la construction de l'école de musique intercommunale de Vauvert au stade de l'avis d'appel public à la concurrence et de mettre à la charge de la communauté de communes de Petite Camargue une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1303338 du 12 mars 2015, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté la requête du conseil régional de l'ordre des architectes du Languedoc-Roussillon comme étant irrecevable.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 12 mai 2015, le conseil régional de l'ordre des architectes du Languedoc-Roussillon, représenté par son président en exercice domicilié..., par ELEOM Avocats, intervenant par la SCP Monceaux Fabre de Thierrens Barnoin ThevenotB..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1303338 du tribunal administratif de Nîmes du 12 mars 2015 ;

2°) d'annuler la décision d'attribution du marché de maîtrise d'oeuvre pour la construction de l'école de musique intercommunale de Vauvert ainsi que la décision par laquelle le recours gracieux a été rejeté ;

3°) d'enjoindre à l'administration de résoudre le marché et de relancer la procédure d'attribution du marché de maîtrise d'oeuvre pour la construction de l'école de musique intercommunale de Vauvert au stade de l'avis d'appel public à la concurrence ;

4°) de condamner la communauté de communes de Petite Camargue à lui verser une somme de 2 000 euros au titre des frais irrépétibles.

Il soutient que :
- c'est à tort que le jugement du tribunal administratif de Nîmes a déclaré sa requête irrecevable pour défaut d'intérêt à agir ;
- le délai de remise des offres était manifestement trop bref alors que la liste des documents sollicités auprès des candidats était particulièrement longue ;
- l'absence d'attribution de toute prime dans l'avis d'appel à concurrence est constitutif d'une rupture d'égalité entre les petites et grosses structures alors que la qualité de la note méthodologique et celle d'intention architecturale constitue un critère important dans le jugement des offres et que le contenu des prestations n'est pas véritablement encadré, puisqu'il est ouvert aux candidats la possibilité d'annexer des illustrations ;
- les documents devant être produits constituent une véritable prestation intellectuelle de niveau " études avant-projet " qui devait être rémunérée en application de l'article 74-II du code des marchés publics ;
- la communauté de communes de Petite Camargue n'a pas respecté le règlement de consultation, dès lors que l'offre qu'elle a retenue ne porte pas sur un projet modulaire contrairement aux exigences de l'article 5 de ce règlement.

Par un mémoire en défense, enregistré le 2 juillet 2015, la communauté de communes de Petite Camargue, représentée par la SCP Margall-d'Albenas, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge du requérant une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :
- la requête est tardive, dès lors que la publication de l'avis d'attribution est intervenue le 16 juillet 2013 et que le délai de recours expirait le 17 août suivant en application de l'article R. 551-7 du code de justice administrative ;
- la requête est irrecevable pour défaut d'intérêt à agir, car l'ordre des architectes ne peut être regardé ni comme un candidat évincé ni comme un candidat potentiel, et que les conditions d'exercice de la profession d'architecte ne sont nullement remises en cause ;
- le requérant n'a pas produit la décision attaquée ;
- la requête ne contient pas des moyens d'appel et se contente de reproduire la requête de première instance ;
- le délai de 14 jours pour la remise des offres est suffisant au regard de la procédure adaptée choisie et a permis le dépôt de 26 dossiers et le recueil de 3 offres ;
- l'avis d'appel d'offres n'avait pas à mentionner le versement d'une prime, dès lors que les prestations devant être remises ne requéraient pas un investissement significatif qui aurait pu dissuader certains candidats de concourir ;
- le moyen tiré du caractère discriminatoire de l'absence de prime pour prestation rendue est voué au rejet, dès lors que le candidat retenu est un architecte individuel travaillant seul ;
- il n'y a eu aucune discrimination entre les candidats, dès lors que tous avaient la possibilité de présenter des illustrations comme cela était clairement précisé ;
- contrairement aux affirmations du conseil régional de l'ordre des architectes du Languedoc-Roussillon, le recours à des bâtiments modulables n'était qu'une option et le choix a pu sans aucune contradiction se porter sur un projet non modulable.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :
- le code de justice administrative ;
- le code des marchés publics ;
- la loi n° 77-2 du 3 janvier 1977 sur l'architecture.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Marcovici,
- les conclusions de M. Thiele, rapporteur public,
- et les observations de Me B...représentant le conseil régional de l'ordre des architectes du Languedoc-Roussillon et de Me A...représentant la communauté de communes de Petite Camargue.

Une note en délibéré présentée pour la communauté de communes de Petite Camargue a été enregistrée le 19 octobre 2015 et une note en délibéré présentée pour le conseil régional de l'ordre des architectes du Languedoc-Roussillon a été enregistrée le 21 octobre 2015.


1. Considérant que, par un avis d'appel public à la concurrence publié le 23 mai 2013, la communauté de communes de Petite Camargue a lancé une procédure de passation d'un marché de maîtrise d'oeuvre pour la construction de l'école de musique intercommunale de Vauvert ; que le conseil régional de l'ordre des architectes du Languedoc-Roussillon a demandé l'annulation de la décision d'attribution de ce marché ; que le tribunal administratif de Nîmes a, par un jugement n° 1303338, du 12 mars 2015, rejeté sa demande au motif qu'elle était irrecevable ; que le conseil régional de l'ordre des architectes du Languedoc-Roussillon relève appel de ce jugement ;

Sur la recevabilité de l'appel :

2. Considérant que la requête susvisée ne se borne pas à reprendre intégralement et exclusivement ses écritures de première instance ; qu'ainsi, elle est suffisamment motivée, et contrairement aux affirmations de la communauté de communes, recevable ;

Sur la recevabilité de la demande de première instance du conseil régional de l'ordre des architectes du Languedoc-Roussillon :

3. Considérant qu'aux termes de l'article 26 de la loi du 3 janvier 1977 : " Le conseil national et le conseil régional de l'ordre des architectes concourent à la représentation de la profession auprès des pouvoirs publics. \ Ils ont qualité pour agir en justice en vue notamment de la protection du titre d'architecte et du respect des droits conférés et des obligations imposées aux architectes par la présente loi. (...) " ; que le marché de maitrise d'oeuvre en cause a été attribué avant le 4 avril 2014 ; que si des tiers peuvent poursuivre l'annulation des actes détachables du contrat, la recevabilité d'un tel recours, lorsqu'il émane d'un conseil régional de l'ordre des architectes, est subordonnée à la condition que le contrat en cause soit susceptible d'affecter les droits conférés aux architectes lorsque leur intervention est requise en application des dispositions de la loi du 3 janvier 1977 ;

4. Considérant que pour justifier d'un intérêt lui donnant qualité à contester la décision d'attribution du marché de maîtrise d'oeuvre pour la construction de l'école de musique intercommunale de Vauvert, le conseil régional de l'ordre des architectes du Languedoc-Roussillon se prévaut de ce que par son contenu et la brièveté excessive du délai laissé aux candidats pour remettre l'offre, la publicité de l'appel d'offre instaurait une discrimination au détriment des architectes indépendants, de ce que l'absence d'attribution de toute prime dans l'avis d'appel à concurrence est constitutive d'une rupture d'égalité entre les petites et grosses structures, et de ce que l'absence d'attribution de toute prime, alors que la qualité de la note méthodologique et celle d'intention architecturale est un critère important dans le jugement des offres, est constitutive d'une rupture d'égalité et de ce que la décision d'attribution du marché concerne un candidat dont l'offre ne respecte pas le règlement du marché ;

5. Considérant que l'absence d'attribution de toute prime dans l'avis d'appel à concurrence et la détermination du montant de la rémunération à laquelle peuvent prétendre les candidats architectes non retenus par un marché de maîtrise d'oeuvre sont susceptibles d'affecter les modalités d'exercice de la profession d'architecte compte tenu de l'influence que le montant de cette indemnité peut exercer sur l'accès au marché des membres de cette profession ; que le contrat en cause est susceptible d'affecter les droits conférés aux architectes ; que dès lors le conseil régional de l'ordre des architectes disposait de la qualité pour agir, en application des dispositions de la loi du 3 janvier 1977 ;

6. Considérant qu'il en résulte que c'est à tort que le tribunal administratif de Nîmes a rejeté la requête du conseil régional de l'ordre des architectes du Languedoc-Roussillon en raison de son irrecevabilité faute pour le requérant de justifier d'un intérêt pour agir ; que, dès lors le jugement attaqué doit être annulé ;

7. Considérant que dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de renvoyer l'affaire devant le tribunal administratif de Nîmes pour qu'il statue à nouveau sur la demande du conseil régional de l'ordre des architectes du Languedoc-Roussillon ;

Sur les conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation " ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article susvisé, de mettre à la charge de la communauté de communes de Petite Camargue une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par le conseil régional de l'ordre des architectes du Languedoc-Roussillon et non compris dans les dépens ;
D É C I D E :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nîmes n° 1303338 en date du 12 mars 2015 est annulé.
Article 2 : L'affaire est renvoyée devant le tribunal administratif de Nîmes pour qu'il soit statué sur la demande du conseil régional de l'ordre des architectes du Languedoc-Roussillon.
Article 3 : La communauté de communes de Petite Camargue versera la somme de 2 000 (deux mille) euros au conseil régional de l'ordre des architectes du Languedoc-Roussillon au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié au conseil régional de l'ordre des architectes du Languedoc-Roussillon et à la communauté de communes de Petite Camargue.
Délibéré après l'audience du 19 octobre 2015, à laquelle siégeaient :

M. Moussaron, président,
M. Marcovici, premier conseiller,
M. Ouillon, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 9 novembre 2015.
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15MA01938



Abstrats

39-08-01-01 Marchés et contrats administratifs. Règles de procédure contentieuse spéciales. Recevabilité. Recevabilité du recours pour excès de pouvoir en matière contractuelle.

Source : DILA, 23/11/2015, https://www.legifrance.gouv.fr/

Informations sur ce texte

TYPE DE JURISPRUDENCE : Juridiction administrative

JURIDICTION : Cour administrative d'appel

SIEGE : CAA Marseille

Date : 09/11/2015