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Conseil d'État, 8ème et 3ème sous-sections réunies, 07/05/2012, 342107, Publié au recueil Lebon

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Rapporteur : Mme Maryline Saleix

Commissaire du gouvernement : Mme Nathalie Escaut

Avocat : SCP BOULLEZ ; SCP BORE ET SALVE DE BRUNETON ; BALAT


REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 2 août et 2 novembre 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la société civile professionnelle (SCP) MERCADIER ET KRANTZ, dont le siège est 3 rue Parmentier à Gagny (93220) ; elle demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 09VE02621 du 18 mai 2010 par lequel la cour administrative d'appel de Versailles a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement n° 0812317 du 15 mai 2009 par lequel le tribunal administratif de Cergy-Pontoise, saisi à la demande de la société en nom collectif (SNC) Marignan-Elysée de la question préjudicielle soulevée par le tribunal de grande instance de Bobigny dans son jugement du 23 avril 2007, a déclaré que l'ensemble immobilier cadastré BH 3 et situé 82, rue du Général Leclerc sur le territoire de la commune de Gagny, appartenait au domaine public de cette commune ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à sa requête ;

3°) de mettre à la charge de la SNC Marignan-Elysée et de la commune de Gagny chacune la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;



Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de justice administrative ;


Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Maryline Saleix, Maître des Requêtes en service extraordinaire,

- les observations de la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat de la SCP MERCADIER ET KRANTZ, de Me Balat, avocat de la commune de Gagny et de la SCP Boullez, avocat de la société en nom collectif Marignan-Elysée,

- les conclusions de Mme Nathalie Escaut, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat de la SCP MERCADIER ET KRANTZ, à Me Balat, avocat de la commune de Gagny et à la SCP Boullez, avocat de la société en nom collectif Marignan-Elysée ;




Sur la compétence :

Considérant qu'aux termes de l'article R. 321-1 du code de justice administrative : " le Conseil d'Etat est compétent pour statuer sur les appels formés contre les jugements des tribunaux administratifs rendus sur les recours sur renvoi de l'autorité judiciaire (...) " ;

Considérant que le tribunal de grande instance de Bobigny, par un jugement du 23 avril 2007, a prononcé le sursis à statuer dans une instance opposant la SCP MERCADIER ET KRANTZ et la SNC Marignan-Elysée jusqu'à ce que la juridiction administrative se prononce sur l'appartenance au domaine public de la commune de Gagny de l'ensemble immobilier cadastré BH 3, situé 82, rue du Général Leclerc au jour de la vente de ce bien par la commune à la SNC Marignan-Elysée ; que, par un arrêt du 18 mai 2010, la cour administrative d'appel de Versailles a rejeté la requête de la SCP MERCADIER ET KRANTZ tendant à l'annulation du jugement du 15 mai 2009 par lequel le tribunal administratif de Cergy-Pontoise, sur renvoi de la question préjudicielle, a déclaré que ce bien appartenait au domaine public ; que cette requête d'appel relevait de la compétence d'appel du Conseil d'Etat ; que, dès lors, et nonobstant l'invocation inopérante du principe de loyauté, la cour, en ne relevant pas d'office son incompétence et en statuant sur cet appel au lieu de transmettre l'affaire au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, a commis une erreur de droit ; que, par suite, la SCP MERCADIER ET KRANTZ, est fondée à demander l'annulation de l'arrêt attaqué ;

Sur le fond :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que, par contrat du 12 avril 1911, l'ensemble immobilier a été donné à bail par la commune de Gagny au département de Seine-et-Oise pour " le casernement de la brigade de gendarmerie à cheval " ; que la description de l'objet du bail mentionne notamment douze chambres, cinq cuisines, un bureau et deux chambres de sûreté ; qu'un nouveau bail portant sur le même immeuble a été établi le 14 janvier 1993 entre la commune et l'Etat ; que, par arrêté du 30 janvier 2002, la brigade territoriale de Gagny a été dissoute et l'Etat a restitué à la commune les locaux loués ; que la SCP MERCADIER ET KRANTZ, titulaire d'un office notarial, a établi le 26 mars 2004 l'acte authentique de cession de cet ensemble immobilier entre la commune de Gagny et la SNC Marignan-Elysée, aux fins de réalisation par cette dernière d'un programme de construction-vente ;

Considérant que, hors le cas où il est directement affecté à l'usage du public, l'appartenance au domaine public d'un bien était, avant l'entrée en vigueur du code général de la propriété des personnes publiques, subordonnée à la double condition que le bien ait été affecté au service public et spécialement aménagé en vue du service public auquel il était destiné ; que l'immeuble qui comprenait deux bâtiments était affecté au service public de la gendarmerie nationale ; qu'à cet effet, chacun de ces bâtiments était aménagé en vue de son affectation à ce service public et comportait des éléments tels que des chambres de sûreté, destinées, notamment, à la rétention et au dégrisement des personnes interpellées, un bureau d'accueil du public, deux bureaux, deux salles d'archives ; que les six logements des gendarmes se situaient dans chacun de ces deux bâtiments et n'en étaient pas dissociables ; que, par suite, cet immeuble appartenait dans son ensemble au domaine public de la commune ; qu'en l'absence de tout acte de déclassement il avait conservé ce caractère à la date de la cession, le 26 mars 2004, sans qu'y fassent obstacle les circonstances qu'avant cette date, il n'était plus affecté à la gendarmerie et que l'acte de vente mentionnait que le bien appartenait au domaine privé de la commune ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SCP MERCADIER ET KRANTZ n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort, que, par le jugement attaqué, qui est suffisamment motivé, le tribunal administratif a déclaré que le bien immobilier appartenait à la date du 26 mars 2004 au domaine public de la commune de Gagny ;

Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de cet article font obstacle à ce que soit mis à la charge de la SNC Marignan-Elysée et de la commune de Gagny, qui ne sont pas dans la présente instance, la partie perdante, le paiement des sommes demandées par la SCP MERCADIER ET KRANTZ ; qu'il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la SCP MERCADIER ET KRANTZ la somme de 3 000 euros à verser à la SNC Marignan-Elysée au titre de ces dispositions ;



D E C I D E :
--------------

Article 1er : L'arrêt du 18 mai 2010 de la cour administrative d'appel de Versailles est annulé.
Article 2 : La requête de la SCP MERCADIER ET KRANTZ est rejetée.
Article 3 : La SCP MERCADIER ET KRANTZ versera à la SNC Marignan-Elysée la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la SCP MERCADIER ET KRANTZ présentées devant le Conseil d'Etat est rejeté.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à la société civile professionnelle MERCADIER ET KRANTZ, à la société en nom collectif Marignan-Elysée et à la commune de Gagny.

Abstrats

08-20 ARMÉES ET DÉFENSE. - GENDARMERIE - DOMAINE PUBLIC (RÉGIME ANTÉRIEUR À L'ENTRÉE EN VIGUEUR DU CG3P) - ENSEMBLE IMMOBILIER AFFECTÉ AU SERVICE PUBLIC DE LA GENDARMERIE COMPRENANT DES CHAMBRES DE SÛRETÉ, UN BUREAU D'ACCUEIL DU PUBLIC, DES BUREAUX ET UNE SALLE D'ARCHIVES - INCLUSION [RJ1].
17-03-02-02-02 COMPÉTENCE. RÉPARTITION DES COMPÉTENCES ENTRE LES DEUX ORDRES DE JURIDICTION. COMPÉTENCE DÉTERMINÉE PAR UN CRITÈRE JURISPRUDENTIEL. DOMAINE. DOMAINE PUBLIC. - ENSEMBLE IMMOBILIER AFFECTÉ AU SERVICE PUBLIC DE LA GENDARMERIE COMPRENANT DES CHAMBRES DE SÛRETÉ, UN BUREAU D'ACCUEIL DU PUBLIC, DES BUREAUX ET UNE SALLE D'ARCHIVES [RJ1].
24-01-01-01-01-01 DOMAINE. DOMAINE PUBLIC. CONSISTANCE ET DÉLIMITATION. DOMAINE PUBLIC ARTIFICIEL. BIENS FAISANT PARTIE DU DOMAINE PUBLIC ARTIFICIEL. AMÉNAGEMENT SPÉCIAL ET AFFECTATION AU SERVICE PUBLIC OU À L'USAGE DU PUBLIC. - CONDITION REMPLIE (RÉGIME ANTÉRIEUR À L'ENTRÉE EN VIGUEUR DU CG3P) - ENSEMBLE IMMOBILIER AFFECTÉ AU SERVICE PUBLIC DE LA GENDARMERIE COMPRENANT DES CHAMBRES DE SÛRETÉ, UN BUREAU D'ACCUEIL DU PUBLIC, DES BUREAUX ET UNE SALLE D'ARCHIVES [RJ1].

Résumé

08-20 Hors le cas où il est directement affecté à l'usage du public, l'appartenance au domaine public d'un bien était, avant l'entrée en vigueur du code général de la propriété des personnes publiques (CG3P), subordonnée à la double condition que le bien ait été affecté au service public et spécialement aménagé en vue du service public auquel il était destiné. Un immeuble affecté au service public de la gendarmerie nationale et aménagé en vue de cette affectation, comportant des éléments tels que des chambres de sûreté, un bureau d'accueil du public, des bureaux, des salles d'archives, ainsi que des logements indissociables du reste de l'immeuble, appartenait, dans son ensemble, au domaine public de la commune.
17-03-02-02-02 Hors le cas où il est directement affecté à l'usage du public, l'appartenance au domaine public d'un bien était, avant l'entrée en vigueur du code général de la propriété des personnes publiques (CG3P), subordonnée à la double condition que le bien ait été affecté au service public et spécialement aménagé en vue du service public auquel il était destiné. Un immeuble affecté au service public de la gendarmerie nationale et aménagé en vue de cette affectation, comportant des éléments tels que des chambres de sûreté, un bureau d'accueil du public, des bureaux, des salles d'archives, ainsi que des logements indissociables du reste de l'immeuble, appartenait, dans son ensemble, au domaine public de la commune.
24-01-01-01-01-01 Hors le cas où il est directement affecté à l'usage du public, l'appartenance au domaine public d'un bien était, avant l'entrée en vigueur du code général de la propriété des personnes publiques (CG3P), subordonnée à la double condition que le bien ait été affecté au service public et spécialement aménagé en vue du service public auquel il était destiné. Un immeuble affecté au service public de la gendarmerie nationale et aménagé en vue de cette affectation, comportant des éléments tels que des chambres de sûreté, un bureau d'accueil du public, des bureaux, des salles d'archives, ainsi que des logements indissociables du reste de l'immeuble, appartenait, dans son ensemble, au domaine public de la commune.

Source : DILA, 23/03/2016, https://www.legifrance.gouv.fr/

Informations sur ce texte

ECLI:FR:CESSR:2012:342107.20120507

TYPE DE JURISPRUDENCE : Juridiction administrative

JURIDICTION : Conseil d'État

Date : 07/05/2012