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circulaire du ministre de l'Intérieur du 19 février 2008

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MINISTERE DE L'INTERIEUR, DE L'OUTRE-MER ET DES COLLECTIVITES TERRITORIALES

Secrétariat général

DIRECTION DE LA MODERNISATION ET DE L'ACTION TERRITORIALE

SOUS-DIRECTION DES AFFAIRES POLITIQUES ET DE LA VIE ASSOCIATIVE

BUREAU CENTRAL DES CULTES

19 FEV. 2008

La ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales

à

Mesdames et Messieurs les préfets

Monsieur le préfet de police

NOR INTA0800038C

OBJET: Police des lieux de sépulture : Aménagement des cimetières - Regroupements confessionnels des sépultures

Mon attention est régulièrement appelée par les maires, les représentants des cultes, voire les particuliers, sur les difficultés rencontrées à l'occasion du décès d'une personne dont la famille, ou un proche, souhaite qu'elle soit inhumée selon les règles ou les usages définis par sa religion, ceux-ci n'étant pas toujours compatibles avec les dispositions législatives et réglementaires, ou lorsque des conflits s'élèvent entre les membres d'une famille sur les modalités des funérailles, le lieu et les modes de sépulture. Aussi, me semble-t-il nécessaire de rappeler aux maires les éléments essentiels du droit concernant la police des funérailles et des cimetières en développant plus particulièrement les questions liées aux demandes de regroupement confessionnels des sépultures.

Tel est l'objet de la présente circulaire qui annule et remplace les circulaires des 28 novembre 1975 et 14 février 1991.

1 - Rappel du cadre juridique

1.1 - Principe de liberté accordé aux défunts et aux familles

Selon l'article 3 de la loi du 15 novembre 1887, « tout majeur ou mineur émancipé, en état de tester, peut régler les conditions de ses funérailles, notamment en ce qui concerne le caractère civil ou religieux à leur donner et le mode de sépulture ». Les funérailles doivent donc se dérouler conformément aux vœux du défunt.

Une simple déclaration signée suffît. Lorsque le défunt n'a exprimé aucune volonté concernant ses funérailles, il appartient au juge, en cas de mésentente au sein de la famille, de déterminer la personne la plus apte à interpréter et à exécuter les volontés du défunt. Ainsi, si le maire a connaissance d'un désaccord sur le choix des funérailles (caractère civil ou religieux, inhumation ou crémation, mode de sépulture), il ne doit prendre aucune décision, celle-ci relevant de la compétence du juge civil.

En cas de violation des volontés du défunt, de sévères peines sont prévues par le code pénal (articles 433-21-1 et 433-22).

1.2 - Principe de neutralité

• Lors des funérailles

Depuis la loi 15 novembre 1887, la famille a toute liberté pour donner aux funérailles un caractère civil ou religieux. Quand le maire, ou à défaut le préfet, pourvoit lui-même aux funérailles en cas d'urgence, si aucun proche ne s'est manifesté, il ne doit faire prévaloir aucun culte ou croyance (article L. 2213-7 du CGCT).

Dans les cimetières

La loi du 14 novembre 1881, dite « sur la liberté des funérailles », a posé le principe de non-discrimination dans les cimetières, et supprimé l'obligation de prévoir une partie du cimetière, ou un lieu d'inhumation spécifique, pour chaque culte. Ce principe de neutralité des cimetières a été confirmé par la loi du 9 décembre 1905 concernant la séparation des églises et de l'Etat.

Les cimetières sont des lieux publics civils, où toute marque de reconnaissance des différentes confessions est prohibée dans les parties communes. Seules les tombes peuvent faire apparaître des signes particuliers propres à la religion du défunt.

Le Conseil d'Etat a ainsi considéré qu'un maire ne peut limiter pour des raisons d'ordre esthétique, le type de monuments ou de plantations que peuvent placer sur les tombes les personnes titulaires d'une concession (CE, 11 mars 1983, Commune de Bures-sur-Yvette).

1.3 - Les modes et lieux de sépulture

En fonction de la volonté du défunt ou de sa famille, le maire donne son autorisation pour l'inhumation ou la crémation du corps de la personne décédée.

Inhumation dans le cimetière communal

L'article L. 2223-1 du code général des collectivités territoriales (CGCT) prévoit que chaque commune doit consacrer à l'inhumation des morts un ou plusieurs terrains spécialement aménagés à cet effet. Lorsque des communes appartiennent à une communauté urbaine, celle-ci exerce de plein droit, au lieu et place des communes membres, les compétences relatives à la création et à l'extension des cimetières créés, et aux crématoriums (article L. 5215-20 du CGCT). Par ailleurs, aucune disposition n'interdit aux communes qui le souhaitent de créer un cimetière intercommunal et d'en confier la gestion au syndicat intercommunal ou à la communauté de communes.

L'article L. 2223-3 du CGCT énonce les catégories de personnes ayant droit à une sépulture dans un cimetière d'une commune :

  • - les personnes décédées sur son territoire, quel que soit leur domicile ;
  • - les personnes domiciliées sur son territoire, alors même qu'elles seraient décédées dans une autre commune ;
  • - les personnes non domiciliées dans la commune mais qui y ont droit à une sépulture de famille. Les maires sont légitimes à refuser une demande si l'attache avec la commune n'est pas prouvée, en particulier dans le cadre d'une demande formulée pour une inhumation dans un espace confessionnel.

o Inhumation en terrain commun

Si le défunt n'a pas pris de concession de son vivant ou ne dispose pas de place dans la concession familiale et si la famille ne souhaite pas obtenir une concession pour l'inhumation du défunt, celui-ci est inhumé en terrain commun dans sa commune de résidence ou dans sa commune de décès. La commune a l'obligation de fournir, gratuitement, un emplacement de sépulture pour l'inhumation de ce défunt.

o Inhumation dans une concession

L'article L. 2223-13 du CGCT prévoit que, lorsque l'étendue des cimetières le permet, il peut être concédé des terrains aux personnes qui désirent y fonder leur sépulture, celle de leurs enfants ou successeurs. L'instauration d'un régime de concessions funéraires n'est donc pas obligatoire pour les communes.

Lorsqu'une commune met en place un régime de concessions funéraires, toute personne appartenant à l'une des catégories énumérées à l'article L. 2223-3 du CGCT précité peut présenter une demande d'attribution d'une concession. Il existe quatre types de concession définies en fonction de leur durée : les concessions temporaires (pour 15 ans au plus), trentenaires, cinquantenaires et perpétuelles (Article L. 2223-14 du CGCT). Les concessions centenaires ont été supprimées par l'ordonnance du 5 janvier 1959. Une commune n'est pas tenue de mettre en place toutes les catégories de concessions légalement autorisées.

Lorsque la sépulture est laissée à l'abandon pendant une période de 30 années, le maire peut constater cet état d'abandon par procès verbal et, après avoir suivi la procédure décrite aux articles R.2223-12 à R.2223-23, saisir le conseil municipal qui se prononce sur la reprise de la concession. Le terrain ayant fait l'objet d'une reprise de concession peut, après exhumation des restes des personnes inhumées et enlèvement des monuments et emblèmes funéraires, faire l'objet d'un nouveau contrat de concession.

La limitation de la durée des concessions imposée par la raréfaction des terrains dans certaines communes présente une difficulté aux personnes de confession juive ou musulmane qui n'acceptent pas la translation des corps et donc le fait de ne pouvoir disposer que d'une concession à durée déterminée. Les dispositions législatives et réglementaires relatives à l'attribution d'une concession perpétuelle - attribution qui n'est pas un droit pour les familles, contrairement au droit à sépulture - ne peuvent être remises en cause.

Il existe toutefois un droit au renouvellement des concessions non perpétuelles, droit qui concerne tous les titulaires de concession ou leurs ayants droits (article L. 2223-15 du CGCT). Cette disposition peut être utilement rappelée aux familles et aux communautés concernées. Par le renouvellement des concessions, elles peuvent bénéficier d'effets identiques à ceux d'une concession perpétuelle, avec l'avantage d'un paiement échelonné par période correspondant à la durée de la concession.

o Ossuaire

Dans les cimetières où se trouvent des concessions reprises, le maire doit, par arrêté, créer un ossuaire destiné à recevoir les restes des personnes qui se trouvaient dans les concessions reprises.

Inhumation hors cimetières

En vertu des dispositions de l'article L. 2223-9 du CGCT, « toute personne peut être enterrée sur une propriété particulière pourvu que cette propriété soit hors de l'enceinte des villes et des bourgs et à la distance prescrite ».

L'inhumation dans une propriété particulière nécessite l'autorisation du préfet du département où est située la propriété, après vérification que les formalités prescrites à l'article R. 2213-17 du CGCT (constat du décès par l'officier d'état civil) et aux articles 78 et suivants du code civil (relatifs à l'acte de décès) ont été accomplies et après avis d'un hydrogéologue agréé.

Crémation

Un nombre de plus en plus important de personnes souhaitent recourir à la crémation.

Cependant, les principes confessionnels des personnes de confession juive ou musulmane interdisent formellement cette pratique.

Seul le maire de la commune du lieu du décès ou, s'il y a eu transport du corps, du lieu de la mise en bière, peut autoriser la crémation. Vous appellerez l'attention des maires sur la très grande prudence qu'il convient d'observer lorsqu'un désaccord apparaît entre les proches du défunt, les uns demandant la crémation et les autres l'inhumation. Si le maire a un doute sur les dernières volontés du défunt, il doit saisir, sans délai, le procureur de la République qui décidera de la suite qu'il convient de donner.

L'article L. 2223-40 du CGCT prévoit que les communes ou les établissements publics de coopération intercommunale sont seuls compétents pour créer et gérer, directement ou par voie de gestion déléguée, les crématoriums et les sites cinéraires destinés au dépôt ou à l'inhumation des urnes ou à la dispersion des cendres.

Les sites cinéraires inclus dans le périmètre d'un cimetière doivent être gérés directement.

Aucune création ou extension des crématoriums ne peut avoir lieu sans l'autorisation préalable du représentant de l'Etat dans le département.

Toutefois, lorsque des communes appartiennent à une communauté urbaine, celle-ci exerce de plein droit, au lieu et place des communes membres, les compétences relatives à la création, l'extension et la translation des cimetières et sites cinéraires hors de l'emprise des cimetières ainsi qu'à la création et à l'extension des crématoriums (article L. 5215-20 du CGCT).

L'article R. 2223-9 du CGCT prévoit la possibilité, pour une commune, de décider l'affectation de tout ou partie d'un cimetière au dépôt des urnes et à la dispersion des cendres des corps ayant fait l'objet d'une crémation.

Le législateur n'a pas fait obligation aux communes d'aménager des équipements cinéraires dans leurs cimetières. Compte tenu du développement de la pratique crématiste constaté ces dernières années, il est souhaitable que les communes puissent offrir aux familles qui le désirent un emplacement dans le cimetière permettant de conserver les urnes, ou un site de dispersion des cendres clairement identifié, permettant aux familles de s'y recueillir.

En ce qui concerne la destination des cendres du défunt après la crémation du corps, il convient de rappeler aux maires que les dispositions réglementaires figurant à l'article R.2213-39 du CGCT ont été modifiées par le décret du 12 mars 2007. Désormais la destination des cendres est le cimetière ou le site cinéraire de la commune où se présente la personne qui a qualité pour pourvoir aux funérailles sauf si le défunt a exprimé sa volonté que l'urne contenant ses cendres soit déposée ou inhumée dans une propriété privée ou que ses cendres soient dispersées en pleine nature.

Le dépôt ou l'inhumation de l'urne ou la dispersion des cendres dans un cimetière ou dans un site cinéraire sont effectués après autorisation du maire. En revanche, le dépôt ou l'inhumation ou la dispersion des cendres dans une propriété privée ne nécessite qu'une déclaration auprès du maire de la commune du lieu de dépôt, d'inhumation de l'urne ou de la dispersion des cendres.

Lorsqu'il est mis fin au dépôt ou à l'inhumation de l'urne dans une propriété privée, la personne qui en est dépositaire doit se conformer aux dispositions du deuxième alinéa de l'article R. 2213-39 afin que l'urne soit déposée ou inhumée dans un cimetière.

2 - Les pouvoirs de police du maire

Le maire est à la fois officier de l'état civil (CGCT, art L. 2122-32) et officier de police judiciaire (CGCT, art L. 2122-31) ; il assure le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publique au titre de ses pouvoirs de police municipale (CGCT, art L. 2212-2).

En cas de carence du maire dans le cadre de ses pouvoirs de police municipale, le préfet peut faire usage de son pouvoir de substitution, conformément aux dispositions de l'article L. 2215-1 du CGCT.

Le maire assure la police des funérailles et des cimetières (CGCT, art L. 2213-8). Il pourvoit d'urgence à ce que toute personne décédée soit ensevelie et inhumée décemment, sans distinction de culte ni de croyance (art L; 2213-7 du CGCT). Il est particulièrement compétent dans les domaines suivants :

  • - le maintien de l'ordre et de la décence dans les cimetières (art L. 2213-9),
  • - l'autorisation de transport des personnes décédées (art L. 2213-9 et R.2213-21),
  • - l'autorisation de dépôt temporaire (art R. 2213-29)
  • - les inhumations (art L. 2213-9 et R. 2213-31),
  • - les exhumations (art L. 2213-9 et R. 2213-40),
  • - la surveillance des lieux de sépulture (Art L. 2213-10),
  • - la fixation des vacations pour les opérations de surveillance (art L. 2213-15)
  • - la crémation (art R. 2213-34, R. 2213-37, R. 2213-39)

Pour les actes ordinaires, le maire peut également agir en qualité d'exécutif de la commune comme le prévoit l'article L. 2122-21 du CGCT.

Mais il peut agir également en qualité de délégataire du conseil municipal lorsqu'il « prononce la délivrance et la reprise des concessions dans les cimetières » (CGCT, art L. 2122-22-8°). Dans ce dernier cas, le maire doit avoir reçu une délégation expresse du conseil municipal et le conseil municipal ne peut intervenir sur des décisions individuelles concernant la délivrance ou la reprise des concessions tant que la délégation subsiste.

En revanche, la délégation ne peut avoir une portée générale fixant les règles générales de délivrance et de reprises de concessions qui demeurent de la compétence du conseil municipal.

Le législateur a attribué au conseil municipal la compétence relative à la création, l'agrandissement et la translation des cimetières, à l'exception des cimetières situés dans les communes urbaines et à l'intérieur des périmètres d'agglomération à moins de 35 mètres des habitations pour lesquels le préfet est chargé de délivrer l'autorisation de création, d'agrandissement ou de translation (CGCT, art L. 2223-1).

La jurisprudence relative aux pouvoirs du maire ou du conseil municipal en matière de cimetières est abondante. Aussi convient-il de rappeler aux maires le cadre dans lequel ils peuvent intervenir et les domaines dans lesquels ils doivent nécessairement obtenir une délibération du conseil municipal.

Le Conseil d'Etat distingue deux types d'actes :

  • - les actes de gestion des cimetières qui relèvent généralement de la compétence du conseil municipal, (CE, 20 janvier 1984, association consistoriale israélite de Marseille c/ Me Rouquette),
  • - et les actes de police des cimetières, que le législateur a confiés au maire et à lui seul.

Toutefois, le partage des compétences est parfois délicat. Ainsi dans l'affaire Cauchoix (CE, 20 février 1946), le Conseil d'Etat a estimé que le conseil municipal a empiété sur la compétence du maire en décidant l'élagage complet des rosiers et autres plantes, cette opération étant qualifiée, dans cette affaire, de mesure de police.

En matière d'autorisation d'inhumer dans le cimetière communal, le maire a compétence liée : il est tenu d'accorder une sépulture aux personnes décédées sur son territoire, quel que soit leur domicile, aux personnes domiciliées sur son territoire, même si elles sont décédées dans une autre commune, et aux personnes non domiciliées dans la commune mais qui ont droit à une sépulture de famille (article L. 2223-3 du CGCT). En revanche, le maire peut refuser l'inhumation dans le cimetière communal si la situation du défunt ne correspond pas à l'un des cas précités.

S'agissant de 1'attribution des concessions, le maire a plus de latitude. Il peut refuser l'attribution d'une concession à un particulier, notamment, sur les fondements suivants :

  • - un manque de place dans le cimetière (article L. 2223.13 du CGCT);
  • - un défaut de justification du droit à sépulture prévu à l'article 2223-3 du CGCT (CE, 16 novembre 1992, M. Locre / commune de Concevreux) ;
  • - des contraintes résultant d'un plan d'aménagement du cimetière (CE, 26 octobre 1994, Mlle Arii).

En revanche, il commet un excès de pouvoir s'il refuse, par exemple, de délivrer une concession alors que la place nécessaire est suffisante ou au motif que le demandeur souhaitait y faire inhumer un membre de sa famille qui ne pouvait prétendre au droit à sépulture sur le territoire de la commune (CE, 25 mai 1990, commune de Cergy / Duval-Bertin).

3 - Les regroupements confessionnels des sépultures

3.1 - Les cimetières privés confessionnels

Par dérogation au droit commun (inhumation dans les cimetières communaux), il existe encore quelques cimetières confessionnels privés, survivance du passé.

Ainsi, les consistoires israélites ont conservé la propriété des cimetières dont ils disposaient avant l'entrée en vigueur du décret du 23 prairial an XII, le décret du 10 février 1806 déclarant certaines dispositions du décret précité non applicables aux personnes de confession israélite et les autorisant à conserver leurs cimetières privés gérés par des associations cultuelles. Il existe également, pour les mêmes raisons, quelques cimetières protestants privés. Leur légalité a été confirmée par le Conseil d'Etat (CE, 13 mai 1964, Eberstarck). En revanche, il n'est plus possible de créer de nouveaux cimetières privés ou d'agrandir ceux qui existent (CA Aix, 1er février 1971, Sr Rouquette/Association cultuelle israélite de Marseille).

Les autorisations d'inhumer dans un cimetière confessionnel sont délivrées par le préfet, conformément aux dispositions de l'article R. 2213-32 concernant les inhumations dans une propriété privée. Elles ne sont délivrées que dans la mesure des emplacements disponibles.

Le maire exerce son pouvoir de police, dans ces cimetières privés, à l'égard des sépultures dont il assure la surveillance, mais le règlement interne du cimetière relève de la compétence du culte concerné, notamment pour la délivrance d'un emplacement, l'agencement des sépultures, le droit d'accès.

3.2 - les regroupements confessionnels de sépulture

Aux termes de l'article L. 2212-2 du CGCT concernant les pouvoirs généraux de police du maire, ce dernier a la charge d'assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publiques dans sa commune. L'article L.2213-9 du CGCT précise que les pouvoirs de police du maire concernant le transport des personnes décédées, le maintien de l'ordre, la décence dans les cimetières, les inhumations et les exhumations doivent être accomplis « sans qu'il soit permis d'établir des distinctions ou des prescriptions particulières à raison des croyances ou du culte du défunt ou des circonstances qui ont accompagné sa mort ».

Il convient de signaler que les associations cultuelles sont de plus en plus nombreuses à faire part du dilemme auquel sont confrontées les familles, qui ont à choisir entre le renvoi du corps dans le pays d'origine, considéré comme trop onéreux par certaines d'entre elles, et l'inhumation du défunt en France, sachant que les règles propres à son culte (orientation des tombes, durée illimitée des sépultures, etc.) peuvent ne pas être satisfaites. Si le principe de laïcité des lieux publics, en particulier des cimetières, doit être clairement affirmé, il apparaît souhaitable, par souci d'intégration des familles issues de l'immigration, de favoriser l'inhumation de leurs proches sur le territoire français.

Le maire a en effet la possibilité de déterminer l'emplacement affecté à chaque tombe (CE, 21 janvier 1925, Vales) et donc de rassembler les sépultures de personnes de même confession, sous réserve que les principes de neutralité des parties publiques du cimetière et de liberté de choix de sépulture de la famille soient respectés.

Tel était le sens des deux circulaires qui vous ont été adressées en 1975 et 1991. Et je souhaite à nouveau appeler votre attention sur cette possibilité, car le développement d'espaces confessionnels me paraît être la solution à privilégier pour résoudre les difficultés qui me sont le plus souvent signalées.

Pour répondre favorablement aux familles souhaitant que leurs défunts reposent auprès de coreligionnaires, je vous demande d'encourager les maires à aménager, en fonction des demandes, des espaces regroupant les défunts de même confession, en prenant soin de respecter le principe de neutralité des parties communes du cimetière ainsi que le principe de liberté de croyance individuelle.

A cet effet, vous leur rappellerez les principes et les recommandations particulières suivantes :

  • • La décision d'aménager des espaces ou carrés confessionnels dans le cimetière communal ou d'accepter l'inhumation d'un défunt ne résidant pas dans la commune appartient au maire et à lui seul ; il s'agit d'un de ses pouvoirs propres et il ne vous appartient pas de vous substituer à lui pour prendre cette décision qui, si elle peut paraître souhaitable, ne présente toutefois qu'un caractère facultatif. Le maire a toute latitude pour apprécier l'opportunité de créer ou non un espace confessionnel.
  • • Le maire doit veiller à ce que les parties publiques du cimetière ne comportent aucun signe distinctif de nature confessionnelle. L'espace confessionnel ne doit pas être isolé des autres parties du cimetière par une séparation matérielle de quelque nature qu'elle soit, conformément à la loi du 14 novembre 1881.
  • • Toute personne ayant droit à une sépulture dans le cimetière de la commune, au sens de l'article L. 2223-3 du CGCT, doit pouvoir s'y faire inhumer quelle que soit sa religion et sans contrainte. Dans la mesure où il existe un espace confessionnel, il revient à la famille ou, à défaut, à un proche de faire la demande expresse de l'inhumation du défunt dans cet espace, le maire n'ayant pas à décider, de sa propre initiative, le lieu de sépulture en fonction de la confession supposée du défunt, ni de vérifier la qualité confessionnelle du défunt auprès d'une autorité religieuse ou de tout autre personne susceptible de le renseigner sur l'appartenance religieuse du défunt. Il se limitera à enregistrer le vœu du défunt ou la demande de la famille ou de la personne habilitée à régler les funérailles.
  • Dans l'arrêt du 5 juillet 1993, affaire Darmon, le tribunal administratif de Grenoble a, ainsi, considéré que le maire ne pouvait se fonder exclusivement sur la circonstance que les autorités consistoriales déniaient l'appartenance à la confession israélite de la personne décédée, qui souhaitait se faire enterrer près de son défunt mari, pour refuser une concession funéraire dans le « carré juif » d'un cimetière communal.
  • • La famille du défunt décide librement de l'emplacement d'une éventuelle stèle sur la sépulture ou de l'aspect extérieur de celle-ci, en individualisant la sépulture par la pose de plaque funéraire, de signes ou emblèmes religieux, sous la seule réserve que le parti pris ne soit pas choquant pour les autres familles ayant une tombe dans le cimetière et susceptible de provoquer des troubles à l'ordre public.
  • • Il peut ainsi arriver qu'une personne ne partageant pas la confession d'un précédent défunt ait explicitement souhaité se faire enterrer aux côtés d'un proche, ou que sa famille ait estimé conforme aux vœux du défunt de l'inhumer au sein d'un espace confessionnel près d'un parent ou d'un proche ou dans un caveau familial inséré dans un espace confessionnel. Il pourra être indiqué au maire que, pour respecter le souhait du défunt ou des familles, il serait souhaitable de faire droit à la demande d'inhumation dans l'espace confessionnel en évitant de dénaturer cet espace. Il convient de souligner toutefois qu'un accommodement raisonnable en la matière suppose de ne pas apposer sur la sépulture du défunt un signe ou emblème religieux qui dénaturerait l'espace et pourrait heurter certaines familles. L'article R2223-8 du CGCT prévoit qu'aucune inscription ne peut être placée sur les pierres tumulaires ou monuments funéraires sans avoir été préalablement soumise à l'approbation du maire. Celui-ci peut, en effet, s'opposer au projet d'inscription funéraire, sur le fondement de ses pouvoirs de police visant à assurer l'ordre public et la décence dans le cimetière.
  • • L'ensemble des règles et prescriptions en matière d'hygiène et de salubrité, notamment celles relatives à la conservation des corps et à leur mise en bière doivent être strictement respectées ; l'inhumation directement en pleine terre et sans cercueil ne peut être acceptée (article R. 2213-15 du CGCT).
  • • Lorsqu'une commune reprend, dans les conditions fixées par le code général des collectivités territoriales, l'emplacement d'une sépulture en terrain commun ou celui d'une concession privée, les restes des corps exhumés doivent être déposés à l'ossuaire communal. Les communes dotées d'un espace confessionnel dans leur cimetière devront être invitées à créer, autant que faire se peut, un ossuaire réservé aux restes des défunts de même confession.

4 - La police des cimetières en Alsace-Moselle

La loi du 14 novembre 1881, qui a posé l'interdiction d'établir une séparation dans les cimetières communaux à raison de la différence des cultes ainsi que de créer ou d'agrandir des cimetières confessionnels, n'est pas applicable aux départements d'Alsace-Moselle. Les dispositions de l'article 15 du décret du 23 prairial an XII (codifiées à l'article L2542-12 du code général des collectivités territoriales), précisant que "dans les communes où l'on professe plusieurs cultes, chaque culte a un lieu d'inhumation particulier", ont été maintenues dans les départements du Bas-Rhin, Haut-Rhin et Moselle.

Selon la jurisprudence administrative, ces dispositions, visant à prévenir les troubles à l'ordre public dans les cimetières, ne présentent pas un caractère obligatoire. Il appartient au maire, chargé de la police municipale, de décider, en fonction de la situation locale, de l'organisation du cimetière communal, de l'instauration de cimetières confessionnels séparés ou de divisions confessionnelles au sein du cimetière. Dans les faits, de nombreux maires ont choisi, en accord avec les autorités religieuses, d'interconfessionnaliser les cimetières.

Les divisions confessionnelles qui existent, conformément à l'article L2542-12 du code général des collectivités territoriales, ne s'appliquent qu'aux seuls cultes reconnus. Mais, en Alsace-Moselle, les maires peuvent également user des pouvoirs qu'ils détiennent en matière de police des funérailles et des cimetières et en particulier du pouvoir de fixer, l'endroit affecté à chaque tombe, après avoir pris connaissance de l'intention précédemment exprimée par le défunt, ou manifestée par la personne ayant qualité pour pourvoir aux funérailles. Ils peuvent ainsi mettre en place, si le besoin s'en fait sentir et si la situation locale le permet, des espaces confessionnels pour les cultes non reconnus, sous réserve que la neutralité du cimetière soit préservée dans les parties publiques et que cet espace ne soit pas isolé du cimetière communal.

Je vous serais obligé de bien vouloir porter ces instructions à la connaissance des maires de votre département et me tenir informée, sous le présent timbre, des difficultés que ceux-ci pourraient rencontrer dans la mise en oeuvre de cette circulaire.

Michèle ALLIOT-MARIE

Informations sur ce texte

Nature : Circulaire

Date : 19/02/2008