C’est l’instruction qui est obligatoire…
Ce principe, datant de 1882, n’a jamais été remis en cause par la loi, même si, aujourd’hui, c’est la scolarisation qui apparaît comme le moyen privilégié d’y satisfaire : « L'instruction peut être donnée soit dans les établissements ou écoles publics ou privés, soit dans les familles par les parents, ou l'un d'entre eux, ou toute personne de leur choix » (
Code de l’éducation
, article L. 131-2).
Donc, entre 6 et 16 ans, les jeunes peuvent, en droit, recevoir l’instruction à laquelle ils ont droit, soit dans un établissement scolaire, soit dans la famille ou toute autre structure (assimilable à un établissement privé hors contrat). Pourtant, au fil du temps et en particulier à partir de la
loi n° 98-1165 du 18 décembre 1998
, les conditions auxquelles doit satisfaire l’instruction « domestique » se sont durcies au point de rendre quasi obligatoire la scolarisation.
… mais personne ne doit échapper à l’école de la République
L'esprit de la nouvelle réglementation vise clairement à dissuader les familles ou certains groupes culturels (notamment religieux ou sectaires) de pratiquer une instruction domestique. Personne ne doit « échapper » (le mot apparaît à plusieurs reprises dans les textes) à l'école de la République, sauf, le cas échéant et à titre provisoire, pour des motifs familiaux ou médicaux particuliers, et le droit à l'éducation correspond à un devoir de scolarisation. Les dispositions prises à partir de 1998 visent :
- à mieux encadrer la liberté des familles par un dispositif à la fois dissuasif (déclaration, contrôles) et répressif (création d'une nouvelle infraction dans le
Code pénal
), qui sanctionne aussi bien l'absence de déclaration de la famille que la non-conformité de l'instruction dispensée ;
- à lutter contre les dérives sectaires ou intégristes (mépris des droits élémentaires de l’enfant, éducation biaisée, exclusion des filles) ;
- à lutter plus efficacement contre tous les « abandons éducatifs » en réaffirmant le droit de l'enfant à l’instruction.
Les oubliés de l’école
En s'appuyant sur les résultats des enquêtes menées sur le terrain, il est possible de dresser une sorte de typologie des populations qui, pour des raisons diverses, peuvent faire partie des « oubliés de l'école » et constituent, de ce fait, des populations à risque :
- les enfants du voyage et de familles non sédentaires ;
- les enfants d'origine étrangère en situation irrégulière ou primo-arrivants ;
- les enfants non francophones ;
- les enfants d'origine étrangère retirés du système scolaire vers 12-13 ans pour travailler dans des ateliers clandestins (jeunes filles d'origine turque ou asiatique notamment) ;
- les élèves « poly-exclus » par décision de conseils de discipline et affectés dans des établissements éloignés du domicile ou dont la période de réaffectation s'étale dans le temps ;
- les élèves se sentant en danger (présences de bandes ou d'élèves de groupes rivaux, harcèlement, racket) ;
- les jeunes délinquants en rupture sociale engagés dans des réseaux d'économie parallèle lucratifs ;
- les enfants subissant des placements successifs responsables d'un désinvestissement pour les études ;
- les jeunes présentant des troubles de la socialisation ;
- les jeunes inscrits au CNED mais dont l'assiduité effective est douteuse ou non vérifiée ;
- les élèves orientés par la commission départementale d'éducation spéciale en attente d'une entrée dans un établissement spécialisé ;
- les enfants non inscrits à l'école sans faire l'objet pour autant d'une déclaration d'instruction dans la famille (travail clandestin, comportement sectaire).
Le contenu de l’enseignement obligatoire
Le point central qui permet finalement d’identifier instruction et scolarisation, c’est la définition de l’objet de l’instruction obligatoire. Si elles ne prennent pas la forme de programmes détaillés par disciplines et par niveaux, les exigences ainsi définies dépassent largement le lire-écrire-compter et correspondent globalement aux compétences attendues des élèves au terme de la scolarité obligatoire, avec, notamment, la pratique d'une langue étrangère et l’exercice de la citoyenneté.
Le
décret n° 99-224 du 23 mars 1999
relatif au contenu des connaissances requis des enfants instruits dans la famille ou dans les établissements d'enseignement privés hors contrat détaille ces connaissances obligatoires.
Remarque
Aujourd’hui, ce contenu de l’instruction obligatoire exigible de tout un chacun quel que soit son mode de scolarisation est clairement défini par les compétences du socle commun, qui précise les connaissances et compétences garanties à chaque élève au terme de la scolarité obligatoire.