Quels bénéficiaires ?
En vertu de l’
article L. 5212-13 du Code du travail
, il existe de nombreuses catégories de bénéficiaires de l’obligation d’emploi, éligibles au dispositif de contrats de droit privé pour l’exercice d’emploi public. En effet, cet article n’identifie pas moins de 7 catégories différentes de bénéficiaires de l’obligation d’emploi.
Ainsi en est-il des travailleurs reconnus handicapés par la commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées (
CASF, art. L. 146-9
), les victimes d’accidents du travail ou de maladies professionnelles ayant entraîné une incapacité permanente au moins égale à 10 % et titulaires d’une rente attribuée au titre du régime général de Sécurité sociale ou de tout autre régime de protection sociale obligatoire, ou encore les titulaires d’une pension d’invalidité attribuée au titre du régime général de Sécurité sociale, de tout autre régime de protection sociale obligatoire ou au titre des dispositions régissant les agents publics, à condition que l’invalidité des intéressés réduise au moins des 2 tiers leur capacité de travail ou de gain.
De même en est-il des bénéficiaires mentionnés à l’
article L. 241-2 du Code des pensions militaires d’invalidité et des victimes de guerre
. Ce dernier article englobe plusieurs catégories de personnes, bénéficiaires d’emplois réservés, sans conditions d’âge, de délai, ni de durée de service :
- les invalides titulaires d’une pension militaire d’invalidité en raison de blessures reçues ou de maladies contractées ou aggravées dans le cadre du service au cours des guerres, des expéditions déclarées campagnes de guerre ou des opérations extérieures ;
- les victimes civiles de guerre ;
- les sapeurs-pompiers volontaires victimes d’un accident ou atteints d’une maladie contractée en service ou à l’occasion du service ;
- les victimes d’un acte de terrorisme ;
- les personnes qui, soumises à un statut législatif ou réglementaire, dans le cadre de leurs fonctions professionnelles au service de la collectivité ou de leurs fonctions électives au sens du Code électoral, ont subi une atteinte à leur intégrité physique, ont contracté ou ont vu s’aggraver une maladie en service ou à l’occasion du service et se trouvent de ce fait dans l’incapacité permanente de poursuivre leur activité professionnelle ;
- et, in fine, les personnes qui, exposant leur vie, à titre habituel ou non, ont contribué à une mission d’assistance à personne en danger et ont subi une atteinte à leur intégrité physique ou ont contracté ou ont vu s’aggraver une maladie lors de cette mission, se trouvent de ce fait dans l’incapacité permanente de poursuivre leur activité professionnelle.
Quel dispositif ?
En application de l’
article 6 sexies de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983
portant droits et obligations des fonctionnaires, les personnes handicapées peuvent être recrutées, par un contrat de droit privé, dans la fonction publique. Ce sont donc des « agents publics mais contractuels de droit privé » ! L’
article 38 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984
portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ajoute qu’à la fin de leur contrat, ces agents peuvent être titularisés. Ce contrat de droit privé est donc un contrat préalable à la titularisation et donc à la fonctionnarisation des personnes handicapées. Ce recrutement par voie contractuelle peut se faire en catégorie A, B ou C, sans passer un concours. Les personnes handicapées ne sont alors soumises à aucune condition d’âge.
Quelles conditions ?
Toutefois, les personnes handicapées candidates doivent être, physiquement et intellectuellement, compatibles avec l’emploi public à exercer (
décret n° 96-1087 du 10 décembre 1996, art. 1-I
, tel que modifié par le
décret n° 2020-523 du 4 mai 2020
relatif à la portabilité des équipements contribuant à l'adaptation du poste de travail et aux dérogations aux règles normales des concours, des procédures de recrutement et des examens en faveur des agents publics et des candidats en situation de handicap). Par suite, elles doivent fournir un certificat médical établi par un médecin agréé et compétent en matière de handicap (art. 1-II).
De plus, elles doivent justifier des mêmes diplômes ou de diplômes équivalents à ceux exigés des candidats passant le concours externe du cadre d’emplois qu’elles souhaitent intégrer (
décret n° 96-1087 du 10 décembre 1996, art. 2 à 4-1
). Pour l’équivalence des diplômes, une procédure existe faisant intervenir une commission compétente à cet effet (art. 2). L’appréciation des candidatures est faite sur dossier par l’autorité territoriale de nomination ; elle peut être complétée par des entretiens (art. 4-1).
Quelle durée ?
La personne handicapée est recrutée pour une durée égale à la durée du stage du lauréat du concours externe du cadre d’emplois de recrutement de cette personne. Elle n’aura toutefois pas de période d’essai à effectuer. En cas de temps partiel ou de congé, autre que les congés annuels, le contrat est prolongé dans les mêmes conditions que pour un fonctionnaire stagiaire (
décret n° 96-1087 du 10 décembre 1996, art. 7-2
).
Quels droits ?
La personne handicapée, contractuellement recrutée, en vue d’être titularisée, a une rémunération équivalente à celle d’un fonctionnaire stagiaire du cadre d’emplois qu’elle souhaite intégrer ; cette rémunération évolue dans les mêmes conditions que celle de ce dernier (
décret n° 96-1087 du 10 décembre 1996, art. 6
). De même, la personne handicapée bénéficie d’une formation et d’un suivi personnalisé pour faciliter son insertion professionnelle et la rendre au plus vite et mieux opérationnelle, et ce afin de lui donner toutes les chances d’être « titularisable » (
décret du 10 décembre 1996, art. 7
). Vu sa situation de handicap, elle peut aussi, sur les conseils du médecin de prévention, bénéficier d’un aménagement de poste, d’une formation complémentaire appropriée, ou encore d’une rémunération pour les auxiliaires dont elle aurait besoin dans son cadre professionnel, et ce grâce au soutien financier du Fonds pour l’insertion des personnes handicapées dans la fonction publique (www.fiphfp.fr).
Afin d’optimiser le suivi et le soutien de la personne handicapée, par ailleurs agent public territorial, l’
article 6 sexies de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983
portant droits et obligations des fonctionnaires, tel qu’il a été complété, par l’
article 92 de la loi n° 2019-828 du 6 août 2019
relative à la transformation de la fonction publique, a créé un point II, aux termes duquel cet agent a le droit de consulter un référent handicap, chargé de l'accompagner tout au long de sa carrière et de coordonner les actions menées par son employeur en matière d'accueil, d'insertion et de maintien dans l'emploi des personnes handicapées. Ce même point II de l’article 6 sexies précité ajoute que l’employeur doit veiller à ce que le référent handicap dispose, sur son temps de travail, des disponibilités nécessaires à l'exercice de ses fonctions. D’autant que cette même disposition législative précise que la fonction de référent handicap peut être mutualisée entre plusieurs employeurs publics (ici territoriaux, soit des collectivités locales et/ou des établissements publics locaux ou territoriaux).
Quelle finalité ?
À l’issue de la période de stage, l’aptitude professionnelle de l’agent public contractuel handicapé fait l’objet d’une évaluation, voire d’un entretien, de la part de l’autorité de nomination (
décret n° 96-1087 du 10 décembre 1996, art. 8
). Si ses aptitudes professionnelles sont jugées satisfaisantes, il sera titularisé après avis de la commission administrative paritaire (CAP) ; la durée du contrat est alors prise en compte, comme pour les fonctionnaires stagiaires, afin de déterminer le classement de cet agent (
décret du 10 décembre 1996, art. 9-1
), de même que pour ses périodes de congés (
décret du 10 décembre 1996, art. 9-2
). Si ces aptitudes professionnelles ne sont pas satisfaisantes, il peut se voir proposer 3 solutions : un renouvellement pour une durée maximale égale à la durée initiale, après avis de la CAP, soit pour le même cadre d’emplois ou pour un cadre d’emplois de niveau hiérarchique inférieur, ou alors le non-renouvellement avec la possibilité d’obtenir des allocations chômage. En cas de renouvellement, la question de la titularisation se reposera dans les mêmes conditions et procédures, mais, cette fois-ci, en cas d’inaptitude, aucun second renouvellement n’est envisageable, mais les allocations chômage sont alors possibles (
décret n° 96-1087 du 10 décembre 1996, art. 9
). En cas, toutefois, de titularisation après le second renouvellement, la reprise d’ancienneté sera alors limitée à la durée initiale du contrat avant renouvellement pour le classement de l’agent (
décret du 10 décembre 1996, art. 9-1
).
La jurisprudence administrative est assez rare sur ce sujet pour souligner l’arrêt du Conseil d’État, Mme Pascale A…, du 26 mai 2010 (n° 305356), aux termes de laquelle, est déclaré irrégulier le licenciement d’un agent public handicapé, alors même que, dans le cadre de son renouvellement, aucune mesure propre à favoriser son intégration professionnelle n’avait été mise en place. Outre l’obtention de sa réintégration contractuelle, cet agent a obtenu une indemnité de 12 000 euros pour réparer le préjudice moral et les troubles dans ses conditions d’existence résultant de ce licenciement, avec intérêts au taux légal à compter de la date de réception de sa demande indemnitaire par l’administration ainsi qu’avec capitalisation des intérêts échus à chaque échéance annuelle.