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L’ambulatoire, un virage et des questions

Santé

Encouragé depuis plusieurs années pour des raisons médicales et économiques, le recours à l'ambulatoire a décollé en France et va continuer à se développer pour sortir du modèle du "tout-hôpital", mais ce virage pose des questions en termes de réorganisation des structures.

L’ambulatoire est le fait d’être pris en charge médicalement sans passer la nuit à l’hôpital. Ce sera le fil rouge des 70e entretiens de Bichat, qui ont lieu du jeudi 5 au samedi 7 octobre à Paris, après avoir déjà été un thème phare du congrès de l’Association française de chirurgie (AFC) la semaine précédente.

« On en parle beaucoup depuis plusieurs années. Aujourd’hui sous l’impulsion des patients, avec la volonté politique et celle des professionnels de santé de travailler ensemble, c’est en train d’arriver », a déclaré à l’AFP le docteur François Sarkozy, président du Comité d’organisation des entretiens de Bichat, rendez-vous annuel consacré à la formation continue des médecins.

Le taux global national de la chirurgie ambulatoire est passé de 36,2 % en 2009 à 54 % l’an dernier et l’objectif est d’arriver à 66,2 % en 2020, note le rapport du congrès de l’AFC.

La France est partie de loin. « La chirurgie ambulatoire a commencé à se développer il y a déjà 30 ans aux États-Unis et 20 ans dans les pays du nord de l’Europe, comme la Grande-Bretagne. En France, ce n’est qu’en 1992 qu’elle a été autorisée », rappelle une pionnière française, le docteur Corinne Vons, dans le rapport de l’AFC.

Soins de ville

Aujourd’hui, le recours à l’ambulatoire est promu par les autorités de santé. Sortir du « tout-hôpital » est l’une des priorités de la stratégie nationale de santé du gouvernement, sur laquelle la ministre Agnès Buzyn a lancé une grande concertation mi-septembre.

Un rapport du Haut Conseil de la Santé Publique (HCSP), qui sert de base à cette stratégie nationale, pointe « le poids majeur des hospitalisations ponctuelles » (une à deux journées), qui est « le premier poste de dépenses de l’Assurance maladie (31 milliards de dépenses, avec une progression de 2,4 % pour la période 2012-2015) ».

Le HCSP recommande donc « d’accélérer le virage ambulatoire » mais aussi de « développer la capacité de l’offre de soins de ville à remplacer certains séjours » à l’hôpital.

« Le virage de l’ambulatoire, c’est faire sortir plus vite les patients de l’hôpital mais aussi, dans certains cas, ne plus y entrer », résume le docteur Sarkozy.

Il cite comme exemples la mise sous insuline de patients diabétiques ou les chimiothérapies à domicile parfois prescrites par certaines structures, comme le centre de lutte contre le cancer Léon Bérard à Lyon ou Necker à Paris.

Progrès techniques

« Il y a une convergence d’intérêts », fait de son côté valoir à l’AFP le chirurgien Hubert Johanet, co-auteur du rapport de l’AFC. « Sur le plan médical, il est démontré que plus vite les gens reprennent leur autonomie, après une opération, moins il y a de problèmes (complications, risques d’infections, etc.). D’autre part, la sécurité sociale a compris que moins les gens restent à l’hôpital, moins ça coûte cher », poursuit-il.

Le recours accru à la chirurgie ambulatoire est rendu possible par les progrès techniques. Le Dr Johanet cite l’exemple des hernies inguinales : « Auparavant on en opérait 6 % en ambulatoire, on en est aujourd’hui à 66 % dans certaines techniques ». « De nombreuses équipes progressent et vont arriver à réaliser des opérations lourdes en ambulatoire », prédit-il.

Cela nécessite cependant une « meilleure coordination » entre l’hôpital et la médecine libérale de ville pour assurer le suivi des patients, afin qu’ils ne soient « pas livrés à eux-mêmes », souligne le docteur Sarkozy.

Et si le mouvement se poursuit, il aboutira mécaniquement à des fermetures de lits dans les hôpitaux, avec de possibles conséquences sur les personnels. Selon le rapport de l’AFC, « un alignement sur les standards internationaux équivaudrait à la fermeture de quelque 98 000 lits sur les 414 000 existants ».
 

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Posté le 05/10/17 par Rédaction Weka