Deux ans après la levée des dernières restrictions liées à la crise sanitaire, qu’en est-il des sorties culturelles des Français ? En 2023, plus de la moitié (53 %) des Français sont allés au cinéma, près d’un quart (24 %) ont assisté à un concert et un peu plus d’un sur dix (14 %) à une représentation de théâtre. Avec qui, où et comment y sont-ils allés ? Quelles sont les raisons invoquées par ceux qui n’y sont pas allés ? Une récente étude publiée par le ministère de la Culture (Culture Études 2024-2, avril 2024) répond à ces questions et fait le point sur les modalités de sortie culturelle des Français, sur leurs pratiques numériques et sur la manière dont celles-ci ont, selon eux, évolué depuis la crise sanitaire.
Le cinéma, l’apanage des jeunes
Si le cinéma est souvent l’occasion d’une sortie culturelle spontanée, de proximité et familiale, les sorties au concert sont programmées plus longtemps à l’avance, loin de chez soi, et les sorties au théâtre plutôt entre amis. La part de la population réalisant chacune de ces sorties varie sensiblement selon les caractéristiques sociodémographiques, particulièrement l’âge, le niveau de diplôme et la catégorie socioprofessionnelle.
Ainsi, la sortie au cinéma est une pratique particulièrement répandue chez les jeunes. Plus des trois quarts (78 %) des 15-24 ans déclarent y être allés au moins une fois au cours des douze derniers mois ; 28 % ont même fréquenté les salles obscures au moins cinq fois dans l’année. Les concerts attirent également un jeune public, mais aussi les cadres et les plus diplômés. Les individus plus âgés, diplômés et urbains se rendent, plus que les autres, au théâtre. La caractéristique qui impacte le plus la probabilité d’aller au théâtre est le lieu d’habitation : les habitants des grands centres urbains ont ainsi 2,4 fois plus de chances d’être allés au théâtre au cours des douze derniers mois.
Les principaux freins aux sorties culturelles
Près de quatre personnes sur dix n’ont, quant à elles, fréquenté ni cinéma, ni concert, ni théâtre en 2023. Le prix des billets, le manque d’intérêt ou le fait de préférer consacrer son temps libre à autre chose constituent les premières raisons évoquées par les personnes qui déclarent ne pas sortir. Les prix des billets représentent le premier frein à la sortie au concert et au cinéma. Un manque d’intérêt est plus souvent déclaré pour la sortie au théâtre.
Parmi les principaux freins, viennent ensuite la distance aux équipements, le fait d’éviter les lieux très fréquentés ou de ne pas s’y sentir à sa place. D’autres freins touchent des publics plus spécifiques : les difficultés à se déplacer, la dégradation de l’état de santé ou encore l’absence de personnes avec qui sortir. L’absence de salles de théâtre et de concert à proximité représente un frein considérable pour les ruraux et les personnes âgées.
Près de la moitié de la population sort moins qu’avant la crise sanitaire
Interrogés sur l’évolution récente de leurs pratiques culturelles in situ et en ligne, quatre personnes sur dix ne constatent pas de changement, mais près de cinq sur dix (49 %) déclarent sortir moins souvent qu’avant la crise sanitaire liée au Covid-19. Ce phénomène concerne davantage les femmes que les hommes, de même que les 60-69 ans en comparaison avec les 15-24 ans.
Si deux personnes sur dix sortent moins sans avoir pour autant augmenté leurs pratiques de visionnage en ligne de films ou de spectacles, près de trois personnes sur dix (28 %) déclarent à la fois moins de sorties culturelles et plus de pratiques en ligne.
Sortir près de chez de soi ou se déplacer loin ?
La distance au lieu de sortie dépend du type d’équipements culturels fréquentés. La sortie au cinéma s’effectue, le plus souvent, dans la commune où habitent les répondants (49 %) et dans le département, mais en dehors de la commune (39 %). Les déplacements plus lointains sont rares. C’est pour le concert que les individus se déplacent le plus loin : ce type de sorties se réalise le plus souvent à l’échelle du département (31 %), de la région (25 %), voire dans une autre région française ou à l’étranger (16 %). La sortie au théâtre constitue une sortie intermédiaire. Même si les déplacements dans des salles de spectacle proches du lieu d’habitation du répondant restent les plus courants (41 % des spectateurs de théâtre y sont allés dans leur commune et 33 % dans leur département), 26 % vont au théâtre dans leur région ou dans d’autres régions françaises.
Les comportements de déplacement des Français résultent, à la fois, de la densité du lieu d’habitation et du maillage de l’offre territoriale, montrant de fortes différences entre le cinéma, le concert et le théâtre. Pour le cinéma, les habitants des grands centres urbains et des centres urbains intermédiaires y vont, très majoritairement, dans leur commune (respectivement 63 % et 68 %), ceux des bourgs ruraux et du rural à habitat dispersé et très dispersé s’y rendent plus dans leur département (respectivement 58 % et 66 %), tandis que ceux des ceintures urbaines et les petites villes adoptent un comportement intermédiaire (43 % des habitants des ceintures urbaines et 40 % des petites villes y vont dans leur commune et respectivement 47 % et 52 % dans leur département).
Pour le concert, les habitants des grands centres urbains et des centres urbains intermédiaires sont ceux qui se rendent le plus dans leur ville (34 % des premiers et 42 % des seconds), quand les habitants des bourgs ruraux et du rural à habitat dispersé et très dispersé déclarent le faire beaucoup plus rarement (respectivement 14 % et 12 % d’entre eux). Néanmoins, bien que les habitants de grands centres urbains soient les plus proches des salles de spectacle, ils sont pourtant nombreux à se déplacer au concert dans leur région ou au-delà (42 %), ce qui les rapproche des comportements de ceux des bourgs ruraux (46 %) et de ceux des zones rurales (50 %), plutôt que des habitants des centres urbains intermédiaires, qui sont seulement 29 % à se déplacer aussi loin. Dans le cas de cette sortie, la distance aux équipements n’est peut-être pas le seul critère à prendre en compte, notent les trois auteures de l’étude. Les amateurs de têtes d’affiche internationales, quel que soit leur lieu d’habitation, se déplacent probablement plus souvent dans les grandes villes (Paris majoritairement), qui sont organisatrices des grands concerts ponctuels.
Pour le théâtre, 48 % des habitants des grands centres urbains s’y rendent dans leur commune, 21 % dans leur département de résidence, mais plus d’un quart se déplacent dans leur région ou au-delà, bien que l’offre de proximité soit plus développée qu’ailleurs. À l’inverse, 33 % des habitants des bourgs ruraux se sont déplacés dans leur commune et 54 % dans leur département. Cette dernière tendance s’accentue pour les habitants de zone rurale à habitat dispersé ou très dispersé, où environ 15 % sont allés au théâtre dans leur commune, 61 % dans leur département et 23 % dans leur région ou au-delà.
Enfin, quelle que soit la sortie, la voiture demeure le moyen de transport privilégié. Ainsi, les deux tiers (66 %) des spectateurs de cinéma s’y sont rendus en voiture, presque autant (65 %) pour les spectateurs de concert et plus de la moitié (55 %) pour les spectateurs de théâtre.