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Circulaire du 27 juillet 2010 relative à la déconcentration de la procédure d'acquisition de la nationalité française par décision de l'autorité publique

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MINISTERE DE L'IMMIGRATION, DE L'INTEGRATION, DE l'IDENTITE NATIONALE ET DU DEVELOPPEMENT SOLIDAIRE

Direction de l'accueil, de l'intégration et de la citoyenneté

Paris, le 27 JUIL. 2010

Le ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire

à

Mesdames et Messieurs les Préfets (métropole et DOM-COM)

Monsieur le Préfet de police

Circulaire n° NOR IMIC1000113C

Objet : Déconcentration de la procédure d'acquisition de la nationalité française par décision de l'autorité publique.

Date d'application : 1er juillet 2010

Résumé : La présente circulaire précise les modalités de constitution et d'instruction des dossiers de demande de naturalisation ou de réintégration dans la nationalité française et explicite les principes posés en la matière par le code civil.

Référence : Décret n° 2010-725 du 29 juin 2010 relatif aux décisions de naturalisation et de réintégration dans la nationalité française (J.O n° 0149 du 30 juin 2010 p.11820).

Introduction

L'expérience menée dans vingt-et-un départements au cours du premier semestre a été évaluée de façon très positive. Les délais de traitement des demandes ont été réduits de manière significative : quatre mois contre dix l'année précédente pour les décisions défavorables, cinq contre douze pour les décisions de naturalisation. La répartition, en pourcentage, entre décisions favorables et défavorables, est restée stable. Le taux de reformation des propositions des préfets est demeuré en moyenne inférieur à 5%. En conséquence, j'ai décidé de généraliser à l'ensemble du territoire national la mesure de déconcentration de la procédure d'acquisition de la nationalité française par décision de l'autorité publique. Ce dispositif, destiné à rendre un meilleur service aux administrés, tout en assurant une parfaite égalité du traitement de leurs dossiers, est entré en vigueur le 1er juillet 2010. Le décret n° 2010-725 du 29 juin 2010 relatif aux décisions de naturalisation et de réintégration dans la nationalité française modifie sur ce fondement le décret n° 93-1362 du 30 décembre 1993.

La présente circulaire a pour objet de préciser les conditions d'exercice de ces nouvelles compétences et les règles que vous devrez observer pour la constitution, l'instruction et la transmission à mes services des dossiers de demande de naturalisation ou de réintégration en application des dispositions du décret n° 93-1362 du 30 décembre 1993 dans sa rédaction résultant du décret n° 2010-725 du 29 juin 2010.

Alors que vous êtes désormais appelés à proposer la naturalisation des postulants ou à décider vous-même de ne pas donner une suite favorable à leur demande, la présente circulaire explicite également les principes posés par le législateur en matière de naturalisation ou de réintégration.

101. RUE DE GRENELLE 75323 PARIS CEDEX 07 - STANDARD 01 77 72 61 00

I - PRESENTATION GENERALE DU DISPOSITIF DE DECONCENTRATION :

Le décret n° 2010-725 du 29 juin 2010 porte déconcentration de certaines décisions en matière de naturalisation et de réintégration dans la nationalité française en modifiant plusieurs dispositions du décret n° 93-1362 du 30 décembre 1993.

Jusqu'à présent, et sous la réserve de l'expérimentation menée au 1er semestre 2010 sur le fondement du décret du 28 décembre 2009, le pouvoir de décision de l'autorité préfectorale en matière de naturalisation se limitait au prononcé du classement sans suite de la demande, le préfet n'étant amené, pour le surplus, qu'à émettre un avis quant à la suite pouvant être donnée à la demande.

En vertu du décret du 29 juin 2010, il appartient désormais au préfet auprès duquel la demande de naturalisation a été déposée non seulement de la classer sans suite si le dossier requis ne satisfait pas aux exigences réglementaires (articles 35 et 40 du décret du 30 décembre 1993 modifié) mais également de statuer sur celle-ci, soit en proposant d'accueillir la demande (article 46) soit en opposant une décision défavorable au postulant qui ne satisfait pas aux conditions légales pour être naturalisé (article 43) ou dont la naturalisation n'apparaît pas opportune (article 44).

Le décret du 29 juin 2010 ne modifie que des dispositions du titre V du décret n° 93-1362 du 30 décembre 1993. La réglementation demeure donc inchangée tant en ce qui concerne les demandes tendant à obtenir l'autorisation de perdre la qualité de français visées au titre VI qu'en ce qui concerne la perte et la déchéance de la nationalité française ainsi que le retrait des décrets de naturalisation ou de réintégration envisagés au titre VII dudit décret.

En ce qui concerne plus spécifiquement le titre V du décret du 30 décembre 1993, il est relevé que le décret du 29 juin 2010 n'affecte pas son article 39 et ne modifie donc en rien les conditions dans lesquelles est adressée au ministre des affaires étrangères la demande d'un étranger francophone qui, contribuant au rayonnement de la France et à la prospérité de ses relations économiques internationales, souhaite bénéficier des dispositions de l'article 21-21 du code civil. Ne sont pas davantage affectées les conditions d'examen des demandes de francisation prévues à l'article 42 du décret du 30 décembre 1993, qui continuent de relever de la compétence ministérielle et dont le régime juridique, résultant de la loi n° 72-964 du 25 octobre 1972 modifiée, est rappelé par la circulaire de la ministre de l'emploi et de la solidarité et du ministre de l'intérieur n° DPM/2000/254 du 12 mai 2000 (B.O du ministère de l'emploi et de la solidarité n° 2000-27 du 3-7-2000 p.649 et s.).

Dispositions transitoires. En vertu de l'article 9 du décret du 29 juin 2010, ne sont pas concernées par les nouvelles dispositions ici présentées les demandes de naturalisation ou de réintégration ayant fait l'objet, au 1er juillet 2010, de la transmission au ministre chargé des naturalisations prévue aux articles 44 et 45 du décret du 30 décembre 1993 dans sa rédaction applicable avant cette date.

II - CONSTITUTION DU DOSSIER DE DEMANDE :

Les développements qui suivent décrivent la procédure ordinaire de constitution du dossier de demande. Si, au cours de cette procédure, un élément du dossier ou une pièce fait apparaître que le postulant ne remplit manifestement pas l'une des conditions posées par la loi à sa naturalisation ou à sa réintégration, une décision constatant l'irrecevabilité de la demande peut intervenir, sans qu'il soit besoin, en particulier, de procéder à l'entretien destiné à évaluer l'assimilation du postulant prévu à l'article 41 du décret du 30 décembre 1993 (3ème alinéa de l'article 43).

A) Principes généraux :

Si le postulant n'a pas souhaité ou pu se le procurer par voie électronique (www.immigration.gouv.fr), c'est en préfecture ou, le cas échéant, en sous-préfecture que le formulaire de demande d'acquisition de la nationalité française par décret doit être retiré.

Les services de l'Etat, seuls chargés de l'instruction des demandes, accueillent les demandeurs dans des locaux identifiés et adaptés. Les agents chargés de l'accueil doivent être en mesure d'apporter une aide pour la constitution du dossier. Toute pratique tendant à confier la constitution ou l'instruction des dossiers à d'autres administrations est à proscrire.

En vertu de l'article 35 du décret du 30 décembre 1993, le dossier doit être déposé auprès des services préfectoraux du lieu où le postulant a établi sa résidence effective (à Paris, à la préfecture de police).

La demande d'acquisition de la nationalité française par décision de l'autorité publique est personnelle. Sauf impossibilité, c'est au postulant de renseigner les rubriques qui le concernent directement et la demande est impérativement signée et datée de sa main. Si le postulant est juridiquement incapable, son représentant légal, signataire de la demande, devra justifier du titre l'autorisant à agir en lieu et place de l'intéressé.

Si la demande est effectuée par des conjoints, chacun d'eux doit constituer un dossier. Vous veillerez cependant à coordonner l'instruction de telles demandes.

B) Pièces à fournir par le postulant :

1 - Présentation générale.

Le postulant doit remplir en double exemplaire le formulaire intitulé « demande d'acquisition de la nationalité française ».

Les déclarations du postulant sont faites sur l'honneur. Une fausse déclaration pourra entraîner le rejet de la demande ou, en cas de naturalisation acquise sur le fondement de déclarations mensongères, justifier le retrait de celle-ci selon la procédure prévue à l'article 27-2 du code civil.

Toutes les rubriques du formulaire doivent être remplies de manière lisible et précise, notamment celles qui ont trait à la situation familiale et matrimoniale du postulant (unions antérieures, enfants), aux diplômes qu'il détient, à son activité professionnelle ou à ses domiciles successifs. Deux photographies d'identité seront jointes au dossier, représentant le postulant tête nue.

Il appartient au demandeur de joindre toute justification utile lorsqu'il entend bénéficier de la dispense ou de la réduction de la durée du stage prévu à l'article 21-17 du code civil envisagées aux articles 21-18, 21-19, 21-20 ou -pour la réintégration-24-1 du code civil. Il en va de même s'il se prévaut de la dispense de la condition de connaissance de la langue française prévue à l'article 21-24-1 du code civil (article 38 du décret du 30 décembre 1993).

Lorsque le demandeur ne peut fournir une ou plusieurs pièces, il doit le justifier par écrit.

Traduction des pièces en langue étrangère. Ainsi qu'il est prévu à l'article 37 du décret du 30 décembre 1993 modifié, les documents rédigés en langue étrangère doivent être accompagnés de leur traduction, produite en original, par un traducteur agréé ou habilité à intervenir auprès des autorités judiciaires ou administratives d'un autre Etat membre de l'Union européenne ou d'un Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse.

Classement sans suite des demandes incomplètes. La demande est accompagnée des pièces prévues à l'article 37 du décret du 30 décembre 1993 modifié. A défaut, le postulant est informé que s'il n'a pas fourni la totalité des pièces requises dans un délai de 6 mois, sa demande sera classée sans suite (article 35 du décret du 30 décembre 1993). Le classement sans suite sera formalisé par une décision adressée au postulant.

Délivrance du récépissé. Le récépissé prévu à l'article 21-25-1 du code civil sera établi après vérification que le dossier est effectivement complet, c'est à dire qu'y figurent toutes les pièces requises à l'article 37 du décret du 30 décembre 1993 et que la demande a été entièrement et exactement remplie par le postulant. Il sera également délivré récépissé du dépôt du document par lequel le demandeur signale un changement de résidence ou une modification intervenue dans sa situation familiale.

2 - Précisions relatives aux pièces d'état civil :

L'état civil des intéressés doit être vérifié avec le plus grand soin car, en application des articles 98 à 98-3 du code civil, des actes de naissance et de mariage français sont dressés pour toutes les personnes nées ou mariées à l'étranger qui acquièrent ou recouvrent la nationalité française. Une fois établis, ces actes ne peuvent être modifiés que par les procédures prévues par les articles 99 et suivants du code civil.

Dans cette perspective, le candidat à la naturalisation devra décliner avec précision son identité exacte (nom - prénom - date et lieu de naissance) dans sa demande d'acquisition de la nationalité française.

L'état civil du postulant, comme celui du ou des enfants âgés de moins de dix-huit ans compris dans la demande, doit être justifié par des actes originaux.

Ces actes doivent, le cas échéant, être revêtus d'une apostille ou être légalisés. Le tableau récapitulatif de l'état du droit conventionnel mentionnant les pays dont les actes sont soumis à ces formalités destinées à les authentifier peut être consulté sur le site www.diplomatie.qouv.fr.

Les pièces raturées ou surchargées ne peuvent être acceptées.

L'acte de naissance de chaque enfant mineur sera joint au dossier. Si le postulant est divorcé, le dossier comportera en outre la décision de divorce mentionnant si possible le régime de l'exercice de l'autorité parentale à l'égard des enfants.

Lorsque le demandeur s'est marié en France et qu'il a des difficultés à produire des pièces d'état civil susceptibles d'avoir été fournies lors de la constitution du dossier de mariage, il peut faire une demande de recherche de document d'état civil auprès du procureur de la République du tribunal de grande instance du lieu où le mariage a été célébré.

Si le postulant ne peut produire des pièces d'état civil suffisamment probantes pour suppléer à l'absence d'acte de naissance ou de mariage, il pourra solliciter l'établissement d'un jugement supplétif auprès du tribunal de grande instance de son domicile (articles 46 et 55 du code civil).

La personne qui a le statut de réfugié ou d'apatride doit fournir des certificats d'état civil établis par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (O.F.P.R.A.).

Le postulant qui entend se prévaloir d'un pacte civil de solidarité (PACS), dont la conclusion peut concourir à caractériser sa situation en termes d'attaches familiales ou matérielles, doit fournir aux services préfectoraux les éléments d'information permettant de vérifier qu'il a bien souscrit la déclaration conjointe prévue par l'article 515-3 du code civil. A cet effet, il doit produire une attestation selon laquelle il est lié par un PACS, qu'il peut se procurer au greffe du tribunal d'instance de son lieu de naissance (ou du TGI de Paris si le PACS a été conclu à l'étranger).

Actes étrangers. Les actes en langue étrangère doivent être accompagnés de leur traduction, en original.

Sont acceptées les traductions effectuées par un traducteur inscrit sur les listes des experts établies par les cours d'appel et la Cour de cassation ou habilité à intervenir auprès des autorités judiciaires ou administratives d'un autre Etat membre de l'Union européenne ou d'un Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse. Sont également admises les traductions effectuées par les consuls de France à l'étranger, les consuls étrangers en France et les traducteurs étrangers faisant l'objet d'un agrément par les autorités de leur Etat d'origine.

Les postulants originaires de certains pays (en particulier : Allemagne, Autriche, Belgique, Bosnie-Herzégovine, Croatie, Espagne, France, Italie, Luxembourg, ex République yougoslave de Macédoine, Monténégro, Pays-Bas, Pologne, Portugal, Serbie, Slovénie, Suisse et Turquie) peuvent produire des actes/extraits plurilingues établis sur la base de la Convention internationale de l'état civil du 8 septembre 1976. Ils doivent alors être produits en original (recto/verso).

Certains actes peuvent être dressés directement en version française. Tel est notamment le cas pour l'Algérie, la Tunisie, le Maroc ou la Mauritanie Si, sur un acte rédigé en français, la mention "traduction" est apposée, il convient de réclamer l'acte en langue étrangère (ex : actes malgaches).

C) Enquête réglementaire par les services préfectoraux :

1 - Enquêtes

Une fois en possession des documents remis par le demandeur, les services préfectoraux procèdent à l'instruction du dossier, notamment en diligentant toutes les enquêtes nécessaires auprès des services de police ou de gendarmerie afin de recueillir des informations utiles, fiables et complètes sur la conduite et le loyalisme du postulant (article 36 du décret du 30 décembre 1993). La demande de bulletin n° 2 du casier judiciaire de l'intéressé par vos services auprès du Casier judiciaire national vous permettra de mieux apprécier son comportement.

La circulaire du 28 décembre 2009 a précisé les conditions d'organisation desdites enquêtes.

Dans sa rédaction issue du décret du 29 juin 2010, l'article 36 du décret du 30 décembre 1993 confie également à l'autorité préfectorale le soin de déterminer si l'instruction de la demande rend nécessaire un examen de l'état de santé du postulant par un des médecins des hôpitaux et dispensaires publics qu'elle aura préalablement désignés.

2 - Entretien individuel

L'article 41 du décret du 30 décembre 1993 modifié prévoit la tenue d'un entretien avec le postulant. Cet entretien est individuel et le postulant doit se présenter en personne devant un agent qui aura préalablement été nominativement désigné par le préfet.

Destiné à éclairer l'autorité compétente quant à la suite que la demande pourrait comporter, l'entretien prévu à l'article 41 doit permettre de constater non seulement le niveau de connaissance des droits et devoirs conférés par la nationalité française ainsi que de la langue française du postulant mais également, et plus généralement, le degré d'assimilation de l'intéressé à la communauté française. Etape importante de la procédure d'instruction des demandes, il doit permettre d'apprécier en particulier le degré d'adhésion du postulant aux valeurs essentielles de tolérance, de laïcité, de liberté et d'égalité de la société française.

3 - Demandes complémentaires et classement sans suite

En application de l'article 40 du décret du 30 décembre 1993 modifié, le préfet peut mettre en demeure le postulant de produire des pièces complémentaires ou d'accomplir les formalités administratives qui sont nécessaires à l'examen de sa demande. Le défaut de réponse du postulant dans les délais qui auront été fixés le cas échéant pourra justifier le classement sans suite de la demande. Cette décision est notifiée à l'intéressé.

D) Situations particulières :

1- Cas des enfants mineurs

L'article 17-3 du code civil précise que les demandes en vue d'acquérir la nationalité française ou d'être réintégré dans cette nationalité peuvent, dans les conditions prévues par la loi, être faites sans autorisation dès l'âge de 16 ans. S'agissant de la matière spécifique des naturalisations, ces dispositions générales doivent être mises en œuvre en tenant compte des dispositions de l'article 21-22 du code civil (v. ci-après).

Avant cet âge, le mineur doit être représenté par celui ou ceux qui exercent à son égard l'autorité parentale. Doit être pareillement représenté, dans les conditions prévues par cet article, tout mineur dont l'altération des facultés empêche l'expression de la volonté.

Effet collectif. L'article 22-1 du code civil prévoit que l'enfant mineur d'une personne qui acquiert la nationalité française par décision de l'autorité publique peut également devenir français, sous les conditions précisées à cet article. Son nom doit alors être mentionné dans le décret de naturalisation ou de réintégration de celui de ses parents qui a acquis la nationalité française.

Lorsque le bénéfice de cet article est envisagé, il convient de s'assurer que l'enfant concerné a effectivement sa résidence habituelle chez ce parent ou qu'il réside alternativement avec lui dans le cas de séparation ou divorce. Le postulant doit produire à l'appui de sa demande les pièces justifiant des modalités selon lesquelles l'enfant réside auprès de lui. La condition de résidence alternative n'est en principe pas satisfaite si le parent concerné ne bénéficie que d'un simple droit de visite et d'hébergement (CE, 19-01-2009, n° 314896).

Par ailleurs, et afin d'éviter que des enfants mineurs dont le postulant croit à tort qu'ils sont déjà français échappent par méprise au bénéfice de l'effet collectif s'attachant à sa naturalisation, le demandeur sera invité à justifier de la nationalité française de son/ses enfant(s) mineur(s) (article 37, 8° du décret du 30 décembre 1993 modifié). Une attention particulière sera portée au cas des enfants nés en France. Vous pourrez utilement interroger les parents -ou les intéressés eux-mêmes lorsqu'ils ont plus de 16 ans- sur le point de savoir s'ils ont souscrit ou envisagent de souscrire une déclaration au titre de l'article 21-11 du code civil. Si tel est le cas, copie de la déclaration enregistrée ou de l'acte de naissance en faisant mention sera jointe au dossier.

Demande de naturalisation d'un enfant mineur. Lorsque la demande de naturalisation est présentée sur le fondement du 2ème alinéa de l'article 21-22 du code civil, le dossier de demande doit comporter la justification de la résidence de ce dernier pendant les 5 années qui précèdent le dépôt de la demande avec le parent qui a acquis la nationalité française.

Dans l'appréciation de la condition de résidence posée aux articles 21-22 et 22-1 du code civil, il sera tenu compte des modalités concrètes de l'accueil de l'enfant. Ainsi, des circonstances particulières permettent de justifier que l'enfant ne vive pas en permanence sous le même toit que le postulant (ex : fréquentation d'un établissement scolaire éloigné).

L'âge de l'enfant s'appréciant à la date du décret de naturalisation/réintégration, vous veillerez, lorsqu'il vous apparaît que l'instruction de la demande qui vous est soumise pourrait ne pas aboutir avant la majorité de l'enfant, à informer les intéressés de cette éventualité.

2 - Personnes juridiquement incapables

La naturalisation est accordée par décret à la demande de l'étranger (article 21-15 du code civil). Si un postulant majeur bénéficie d'un régime légal de protection, vous vérifierez si le jugement le concernant prévoit un dispositif d'assistance ou de représentation pour les actes touchant à sa personne. Si tel est le cas, la demande présentée par la personne placée sous protection ou un tiers ne justifiant pas être habilité sera classée sans suite.

III - EXAMEN DE LA DEMANDE :

Lorsqu'ont été réunis tous les éléments nécessaires à la constitution du dossier, il appartient au préfet soit d'émettre une proposition de naturalisation (article 46 du décret du 30 décembre 1993 modifié), soit de prendre lui-même une décision défavorable d'irrecevabilité, de rejet ou d'ajournement de la demande (articles 43 et 44).

Dans les deux cas, le dossier est ensuite transmis sans délai au ministre chargé des naturalisations (Sous-direction de l'accès à la nationalité française).

Recevabilité et opportunité. Le processus de décision en préfecture se caractérise par un double examen de la demande : sous l'angle de sa recevabilité et en opportunité.

Lorsque le postulant ne remplit pas les conditions posées par la loi, la demande ne peut prospérer et fait en principe l'objet d'une décision d'irrecevabilité fondée sur les dispositions pertinentes du code civil (article 43 du décret du 30 décembre 1993 modifié). Si la naturalisation n'apparaît pas opportune, une décision défavorable pourra intervenir sur le fondement de l'article 44 du décret du 30 décembre 1993. Celle-ci pourra légalement se fonder sur des circonstances déjà examinées au titre du respect des conditions légales.

Délais légaux et réglementaires. L'article 21-25-1 du code civil prévoit que la réponse de l'autorité publique à une demande d'acquisition de la nationalité française doit intervenir en principe dans les 18 mois suivant la délivrance du récépissé prévu à cet article, ce délai étant ramené à 12 mois lorsque l'intéressé a sa résidence en France depuis au moins 10 ans.

L'article 46 du décret du 30 décembre 1993 modifié prévoit, pour sa part, que l'autorité préfectorale dispose d'un délai de 6 mois à compter de la délivrance du récépissé prévu à l'article 21-25-1 du code civil pour transmettre au ministre chargé des naturalisations une éventuelle proposition de naturalisation ou de réintégration. Ce dispositif suppose que les décisions préfectorales défavorables interviennent en pratique dans le même délai.

Exigence de motivation. Ainsi qu'il est rappelé à l'article 49 du décret du 30 décembre 1993 modifié, les décisions défavorables sont motivées conformément à l'article 27 de la loi n° 98-170 du 16 mars 1998. Décisions d'irrecevabilité, de rejet ou d'ajournement doivent donc faire état, avec une précision suffisante, des considérations de fait et de droit qui leur donnent leur fondement. Vous veillerez encore à informer les destinataires de ces décisions des voies et délais des recours ouverts à leur encontre, en particulier de la procédure de recours administratif préalable organisée à l'article 45 du décret du 30 décembre 1993 modifié.

Il va de soi que les faits qui fondent une décision doivent être établis. En particulier, une décision défavorable peut se fonder sur des faits matériellement établis qui ont donné lieu à l'engagement d'une procédure pénale, ayant abouti ou non à une condamnation (pour un ajournement opposé à un postulant dont le casier judicaire était vierge pour des faits ressortant d'un rapport d'enquête établi par un commissariat de police, v. CAA Nantes, 20-12-2002, n° 01NT02178). Enfin, il est rappelé que l'autorité administrative peut tenir compte des indications contenues dans les notes des services de renseignements, dès lors qu'elles sont suffisamment précises (CE, 23-3-2003, n° 238662 ; CE, 4-10-2004, n° 266948).

A) Examen de la recevabilité de la demande au regard des exigences légales :

1) Principes généraux

S'il a entendu laisser à l'autorité administrative un large pouvoir dans l'appréciation de l'opportunité qu'il y a de donner ou non une suite favorable à la demande de naturalisation dont elle est saisie, le législateur a néanmoins formellement subordonné l'octroi de la nationalité française par décision de l'autorité publique au respect de diverses conditions. Ces conditions, dites de recevabilité, sont cumulatives et définies aux articles 21-16 et suivants du code civil.

Il incombe au préfet auprès duquel la demande a été déposée d'examiner si les conditions ainsi requises par la loi sont remplies. Dans la négative, il est tenu de déclarer la demande irrecevable (article 43 du décret du 30 décembre 1993). J'appelle votre attention sur le fait que les principes de bonne administration peuvent vous amener, dans le respect des exigences légales et lorsque les circonstances s'y prêtent, à ne pas opposer sans autre examen une irrecevabilité formelle qui pourrait facilement être couverte (ex : expiration de la période de stage à laquelle le postulant est soumis).

Irrecevabilité manifeste. On rappellera que si, en cours de procédure, il apparaît que le postulant ne remplit manifestement pas l'une des conditions posées par la loi à sa naturalisation ou à sa réintégration, une décision constatant l'irrecevabilité de sa demande peut intervenir sans qu'il soit besoin notamment de procéder à l'entretien prévu à l'article 41 du décret du 30 décembre 1993 (3ème alinéa de l'article 43 du décret du 30 décembre 1993 modifié). Compte tenu des inconvénients liés à la reprise d'instruction d'une demande qui aurait fait à tort l'objet d'une décision d'irrecevabilité manifeste, vous veillerez à ne mettre en œuvre ces dispositions qu'après un examen attentif de la situation de l'intéressé, particulièrement lorsqu'est en jeu la satisfaction de la condition de résidence ou de stage.

2) Présentation des conditions légales :

Naturalisation et réintégration. Il importe d'examiner avec attention la situation d'un postulant à la nationalité française qui établit avoir, par le passé, possédé la qualité de Français : si elle est, pour le surplus, soumise aux conditions et aux règles de la naturalisation, la réintégration dans la nationalité française par décret peut en effet être obtenue à tout âge et sans condition de stage (article 24-1 du code civil). Lorsque celle-ci fait difficulté, c'est au postulant qu'il appartient d'établir son ancienne qualité de Français.

a- la condition d'âge (article 21-22 du code civil)

Ainsi qu'il a été dit, aucune condition d'âge n'est posée pour la réintégration dans la nationalité française d'une personne ayant possédé la qualité de Français.

En revanche, pour être naturalisé, le demandeur doit en principe avoir atteint l'âge de 18 ans.

Toutefois, et hors le cas d'acquisition de la nationalité française au bénéfice de l'effet collectif prévu à l'article 22-1 du code civil, une procédure autonome de naturalisation d'un mineur qui est resté étranger bien que l'un de ses parents ait acquis la nationalité française peut aboutir selon les modalités prévues à l'article 21-22 du code civil. Il devra alors être justifié de la résidence en France de l'intéressé avec ce parent durant les 5 années précédant le dépôt de la demande.

b- la condition de résidence (articles 21-16 et suivants du code civil)

Les dispositions de l'article 21-16 du code civil subordonnent la naturalisation d'un postulant à la fixation en France de sa résidence.

Notion. La jurisprudence a précisé que, pour être considéré comme ayant sa résidence en France au sens de l'article 21-16 du code civil, le demandeur doit y avoir fixé de manière stable le centre de ses intérêts matériels et de ses liens familiaux (v. CE, Section, 28-2-1986, Min. c/ B., n° 57464, rec. p. 53 et A., n° 50277, rec. p. 54).

Selon l'expression jurisprudentielle, la résidence en matière de nationalité doit être une résidence effective et habituelle, présentant un caractère stable et permanent coïncidant avec le centre des attaches familiales et des occupations professionnelles du postulant. Dans l'examen du point de savoir si l'intéressé satisfait à la condition de résidence, une attention particulière doit donc être portée à la localisation de la cellule familiale du postulant (conjoint, enfants mineurs le cas échéant) ainsi qu'à sa situation professionnelle.

Nécessité d'un examen global. L'appréciation de la résidence en France du postulant à la naturalisation par décret doit s'opérer sur le fondement d'un examen global de sa situation, tel que permettent notamment de l'appréhender des éléments tirés des conditions et de la durée de son séjour, de sa situation personnelle, familiale ou professionnelle ou encore du caractère des ressources lui permettant de demeurer en France.

Dans cette perspective, un défaut de fixation en France des seules attaches familiales ou des seuls intérêts matériels du postulant ne pourra fonder une décision d'irrecevabilité que s'il est caractérisé (ex. : personne mariée dont le conjoint et les jeunes enfants résident hors de France) et si aucune circonstance particulière ne ressort du dossier qui permette d'en relativiser l'importance (sur la prise en compte des circonstances particulières à la situation du postulant, v. CE, 13-10-2006, n° 282099).

Précisions relatives au titre de séjour. Ainsi qu'il est précisé à l'article 21-27 du code civil, un étranger en situation irrégulière au regard des dispositions relatives au séjour ne peut acquérir la nationalité française. Pour sa part, la nature du titre de séjour sous couvert duquel l'intéressé se trouve régulièrement en France, si elle fournit des indications utiles quant à la situation administrative et matérielle du postulant, ne détermine pas à elle seule la fixation ou le défaut de fixation en France de sa résidence au sens de l'article 21-16 du code civil.

Présence à l'étranger assimilée à la résidence en France. J'appelle votre attention sur les dispositions de l'article 21-26 du code civil, qui envisage différentes situations assimilées à une résidence en France. Cette assimilation ne peut être invoquée par un postulant installé sur le territoire français. Lorsqu'elle profite à l'un des époux, elle s'étend à l'autre s'ils habitent effectivement ensemble. En ce qui concerne le 1° de cet article (exercice d'une activité professionnelle publique ou privée pour le compte de l'Etat français ou d'un organisme dont l'activité présente un intérêt particulier pour l'économie ou la culture française), il est précisé qu'il ne subordonne l'assimilation envisagée à aucune condition relative à la nature de l'activité professionnelle ou au niveau des responsabilités exercées (CE, 17-10-1986, n° 62279).

c- la condition de stage (articles 21-17 et suivants du code civil)

Notion de stage. L'article 21-17 du code civil pose en principe que la naturalisation ne peut être accordée qu'à l'étranger justifiant d'une résidence habituelle en France pendant les cinq années qui précèdent le dépôt de sa demande. Appréciée, ainsi qu'il est précisé, à la date du dépôt de la demande, la durée de stage s'entend en principe d'une période de séjour régulier sans interruption substantielle (v. CAA Nantes, 30-12-1997, n° 96NT02041).

Dispense de stage. Les personnes qui sollicitent leur réintégration sont dispensées de la condition de stage (article 24-1 du code civil).

Est également dispensé de stage le postulant qui a effectivement accompli des services militaires dans une unité de l'armée française ou qui, en temps de guerre, a contracté un engagement volontaire dans les armées françaises ou alliées, l'étranger qui a rendu des services exceptionnels à la France ou celui dont la naturalisation présente pour la France un intérêt exceptionnel, ou encore l'étranger qui a obtenu le statut de réfugié en application de la loi n° 52-893 du 25 juillet 1952 portant création d'un Office français de protection des réfugiés et apatrides (article 21-19 du code civil).

Peut également être naturalisée sans condition de stage la personne qui appartient à l'entité culturelle et linguistique française, lorsqu'elle est ressortissante des territoires ou Etats dont la langue officielle ou l'une des langues officielles est le français. Il faut alors que le français soit la langue maternelle de l'intéressé (conçue comme celle dans laquelle l'enfant a appris à s'exprimer au sein du cercle familial), ou que ce dernier justifie d'une scolarisation de cinq années dans un établissement enseignant en langue française (article 21-20 du code civil).

Réduction de stage. La durée du stage est, par exception aux dispositions de l'article 21-17 du code civil, réduite à deux ans pour l'étranger qui a accompli avec succès deux années d'études supérieures en vue d'acquérir un diplôme délivré par une université ou un établissement d'enseignement supérieur français, ou pour celui qui a rendu ou qui peut rendre par ses capacités et talents des services importants à la France (article 21-18 du code civil).

d- la condition de moralité (article 21-23 du code civil)

Le législateur a entendu, à l'article 21-23 du code civil, réserver le bénéfice de la naturalisation ou de la réintégration dans la nationalité française aux personnes de bonnes vie et mœurs. Il exclut expressément de ce bénéfice ceux qui ont fait l'objet de l'une des condamnations visées à l'article 21-27 du code civil, qui n'est pas spécifique à l'acquisition de la nationalité française par décret : condamnation pour crimes ou délits constituant une atteinte aux intérêts fondamentaux de la Nation ou un acte de terrorisme ou, quelle que soit l'infraction considérée, condamnation à une peine égale ou supérieure à 6 mois d'emprisonnement non assortie d'une mesure de sursis.

L'appréciation à laquelle doit se livrer l'administration pour s'assurer que la condition posée à l'article 21-23 du code civil est satisfaite porte sur le comportement général de l'intéressé, qui doit ainsi être empreint de civisme, et ne saurait se limiter à rechercher si la personne en cause a fait l'objet d'une condamnation pénale. Si la nature des faits susceptibles de caractériser un défaut de bonnes vie et moeurs ne peut être définie a priori (ex. : troubles à l'ordre public, méconnaissance de ses obligations légales civiles ou fiscales, comportement violent ou dangereux, détention d'arme non autorisée, etc.), une irrecevabilité ne sera justifiée que si ces faits présentent par leur nature ou leur caractère répété un certain degré de gravité, le juge administratif exerçant un contrôle approfondi, dit « normal », sur l'appréciation qui a fondé la décision.

L'appréciation portée sur le comportement de l'intéressé au titre de la condition de bonnes vie et mœurs peut se fonder sur des faits couverts par une loi d'amnistie, laquelle n'a pour effet que d'enlever auxdits faits leur caractère délictueux. Il en va de même si la mention de la condamnation du postulant a été exclue du bulletin n° 2 de son casier judiciaire ou si l'intéressé a bénéficié d'une procédure de réhabilitation, ces circonstances faisant cependant obstacle à ce que soient formellement retenues au titre de l'article 21-27 du code civil les condamnations qui ont été prononcées (sur la possibilité de fonder une décision d'irrecevabilité au titre de l'article 21-23 du code civil sur des faits ayant fondé une condamnation malgré le bénéfice d'une mesure de réhabilitation, v. CAA Nantes, 30-06-2006, n° 05NT01701).

Condamnations prononcées à l'étranger. En vertu de 2ème alinéa de l'article 21-23 du code civil, les condamnations prononcées à l'étranger pourront ne pas être prises en considération. En ce cas, le décret prononçant la naturalisation ne pouvant être pris qu'après avis conforme du Conseil d'Etat, vous veillerez à motiver la proposition de naturalisation que vous adresserez au ministre chargé des naturalisations. Si, inversement, une décision préfectorale de rejet ou d'ajournement devait trouver son fondement dans une ou des condamnations prononcées à l'étranger, la motivation de cette décision marquera que vous avez, sur ce point, exercé tout votre pouvoir d'appréciation.

e- la condition d'assimilation (article 21-24 du code civil)

L'article 21-24 du code civil prévoit que « nul ne peut être naturalisé s'il ne justifie de son assimilation à la communauté française, notamment par une connaissance suffisante, selon sa condition, de la langue française et des droits et devoirs conférés par la nationalité française ».

La notion d'assimilation implique une participation aux activités de la société française, et l'adhésion tant à ses règles de fonctionnement qu'à ses valeurs de tolérance, de laïcité, de liberté et d'égalité.

Les éléments révélateurs d'une attitude intolérante ou discriminatoire fondée notamment sur des critères de sexe, de race, de religion ou de nationalité (ex. : dénigrement de certaines communautés, appartenance à des mouvements prônant l'action violente ou une pratique radicale de la religion) ou un mode de vie non conforme aux us et coutumes (ex.: confinement au foyer, limitation des relations sociales avec des personnes de l'autre sexe), voire contraire à l'ordre public (polygamie, pratique de mutilations sexuelles) pourront ainsi donner son motif à une décision d'irrecevabilité sur le fondement de l'article 21-24 du code civil.

S'agissant de la maîtrise de la langue française, il est rappelé que la satisfaction à l'exigence législative doit être appréciée en tenant compte de la condition du postulant. Sauf circonstances particulières, et en dehors du cas prévu à l'article 21-24-1 du code civil (réfugiés politiques et apatrides résidant régulièrement et habituellement en France depuis quinze années au moins et âgés de plus de soixante-dix ans), une insuffisante maîtrise du français caractérisée par un degré de compréhension ou un niveau d'expression ne permettant pas à l'intéressé d'être autonome dans les démarches de la vie courante peut, à elle seule, fonder une décision d'irrecevabilité.

f- les conditions posées à l'article 21-27 du code civil.

Sous les réserves qu'il indique, l'article 21-27 du code civil exclut expressément du bénéfice de la naturalisation ou de la réintégration ceux qui ont fait l'objet d'une condamnation pour crimes ou délits constituant une atteinte aux intérêts fondamentaux de la Nation ou un acte de terrorisme ou, quelle que soit l'infraction considérée, d'une condamnation à une peine égale ou supérieure à 6 mois d'emprisonnement non assortie d'une mesure de sursis.

Ne peut également acquérir la nationalité française ou être réintégré dans cette nationalité celui dont le séjour en France est irrégulier au regard des lois et conventions relatives au séjour des étrangers en France, celui qui a fait l'objet d'un arrêté d'expulsion non expressément rapporté ou abrogé ou d'une interdiction du territoire français non entièrement exécutée.

Dans les conditions que cet article prévoit, les dispositions de l'article 21-27 du code civil ne peuvent être opposées à l'enfant mineur susceptible de bénéficier de l'effet collectif prévu à l'article 22-1 du code civil, ni au condamné ayant bénéficié d'une procédure de réhabilitation ou dont la condamnation a été exclue du bulletin n° 2 du casier judiciaire.

B) Examen de l'opportunité d'une naturalisation/réintégration :

Ainsi que la jurisprudence l'a plusieurs fois rappelé, l'octroi de la nationalité française « constitue une faveur accordée par l'Etat français » et le fait de remplir les conditions posées par le législateur ne donne au postulant aucun droit à obtenir la naturalisation (CE, 30-3-1984, n° 40735 ; CE, 14-10-1988, n° 78414 ; CE, 23-09-1988, n°60256 ; CE, 16-3-1988, n° 74510 ; voir également, CE, 27-05-1994, n° 122236).

Dans cette perspective, il vous appartient, en particulier dans les cas où une décision d'irrecevabilité ne peut être prise, d'apprécier s'il y a lieu de proposer la naturalisation de l'étranger qui la sollicite ou s'il convient au contraire de rejeter ou d'ajourner sa demande (articles 43, 44 et 46 du décret du 30 décembre 1993 modifié).

1) Proposition favorable, rejet et ajournement.

Résultant d'une décision de l'autorité publique, la naturalisation ou la réintégration dans la nationalité française est conférée par décret.

Sous la réserve qu'implique l'exercice par le ministre chargé des naturalisations du pouvoir de décision envisagé aux articles 45 et 48 du décret du 30 décembre 1993 modifié, c'est à l'autorité préfectorale qu'il appartient d'apprécier s'il y a lieu ou non de donner une suite favorable à la demande dont elle est saisie.

Si tel est le cas, il vous incombe de me transmettre le dossier du postulant dont la naturalisation ou la réintégration est envisagée dans le délai de 6 mois prévu à l'article 46, assorti de votre proposition motivée. Afin de me permettre d'exercer sur celle-ci l'examen prévu à l'article 48, vous veillerez à expliciter les raisons de fait et de droit qui fondent cette proposition, notamment au regard de la satisfaction par le postulant des conditions posées par la loi à sa naturalisation.

Si la naturalisation ou la réintégration du postulant ne vous paraît pas opportune, vous pouvez prononcer le rejet de sa demande. Une décision d'ajournement peut également intervenir s'il vous paraît opportun, compte tenu notamment des possibilités d'évolution à court ou moyen terme de la situation et des nécessités de son observation, de fixer un délai ou des conditions à l'expiration ou à la réalisation desquels la formulation d'une nouvelle demande sera alors subordonnée (article 44 du décret du 30 décembre 1993 modifié).

Saisi d'une demande par un postulant ayant déjà fait l'objet d'une décision d'ajournement, vous pourrez, si le délai prescrit n'est pas expiré ou si les conditions posées n'ont pas été réalisées, prendre une décision de classement sans suite fondée sur ce motif.

2) Contenu de la notion d'opportunité.

Dans la mise en œuvre de cette prérogative de puissance publique que constitue la naturalisation ou le refus d'accorder la nationalité française, l'appréciation de l'autorité compétente porte sur l'opportunité de l'octroi de cette faveur, compte tenu de l'ensemble des renseignements favorables ou défavorables recueillis sur la situation et le comportement du postulant (pour la prise en compte des incertitudes relatives à l'insertion professionnelle d'un postulant malgré la présence d'éléments favorables, v. CE, 6-5-1988, n° 78371).

Il vous appartient donc d'apprécier l'intérêt pour notre pays d'accueillir ou non la demande. La politique de naturalisation vise à accueillir dans la population française de nouveaux citoyens suffisamment intégrés, qui respectent les règles et les valeurs fondamentales de notre société.

Cette politique, à la fois ouverte et sélective, ne comporte ni objectifs quantitatifs, ni critère préférentiel ou discriminant fondé sur l'origine des postulants. Seules sont prises en compte, pour chaque décision, les caractéristiques individuelles de chaque candidature au regard de la loi, des principes exposés par la présente circulaire et de tous autres éléments de nature à permettre d'apprécier l'intérêt pour la France de chaque naturalisation.

L'appréciation de l'autorité administrative est soumise au contrôle du juge administratif, qui marque régulièrement que le contrôle qu'il opère en la matière sur les décisions prises en opportunité est conçu de façon restrictive, en rappelant qu'est à l'œuvre un « large pouvoir d'appréciation » (CE, 11-02-2002, n° 216913 ; CE, 24-3-1997, n° 159854).

La demande de naturalisation présente un caractère personnel et doit donc se fonder en principe sur des considérations touchant à la situation du seul postulant. Dans certaines situations cependant, une décision défavorable peut légalement être opposée au demandeur en se fondant sur des faits imputables à ses fréquentations ou à son conjoint (v. CE, 4-10-2000, n° 204298 pour l'épouse d'un ancien officier de renseignements étranger, compte tenu de la longue durée et de l'effectivité de la communauté de vie ; v. aussi, pour l'épouse du dirigeant d'une fédération d'organisations à laquelle étaient affiliés des mouvements extrémistes, CE, 10-12-2004, n° 257590).

L'autorité administrative compétente doit, dans son examen de l'opportunité d'une naturalisation, tenir compte de toutes les circonstances de l'affaire (comportement, civisme, insertion professionnelle, loyalisme, etc.), au nombre desquelles peuvent légalement figurer celles qui ont été examinées pour statuer sur la recevabilité de la demande (pour des considérations tirées de l'assimilation du postulant v. CE, 25-7-1986, n° 64741 ; pour des considérations tirées de sa résidence, v. CE 27-10-1999, n° 195751).

IV - NOTIFICATION DES DECISIONS :

Les décisions préfectorales d'irrecevabilité, d'ajournement ou de rejet sont motivées et notifiées directement au postulant par les services préfectoraux, soit par une remise directe lors d'une convocation en préfecture, soit par envoi postal en courrier recommandé avec accusé de réception.

La décision défavorable comporte l'indication des délais et voies de recours ouverts à son encontre (cf. infra). En application des articles 43 et 44 du décret du 30 décembre 1993 modifié, une copie des décisions constatant l'irrecevabilité d'une demande ou prononçant un rejet ou un ajournement est adressée sans délai au ministre chargé des naturalisations (sous-direction de l'accès à la nationalité française).

Si le postulant se trouve dans un autre département, la correspondance sera transmise pour notification aux services préfectoraux de ce département. Si la décision ne peut être notifiée par suite d'un changement de domicile et si la nouvelle adresse du postulant n'est pas connue, il sera établi un procès-verbal de carence.

Les décisions défavorables prises par le ministre chargé des naturalisations sur le fondement des dispositions des articles 45 et 48 du décret du 30 décembre 1993 modifié seront également notifiées par l'intermédiaire des services préfectoraux selon les voies indiquées plus haut.

La notification des décisions de naturalisation s'effectuera par vos soins selon les modalités décrites dans la circulaire n° DPM/2000/254 du 12 mai 2000. Je vous rappelle que les conditions d'organisation de la cérémonie d'accueil dans la citoyenneté française prévue aux articles 21-28 et 21-29 du code civil sont précisées dans la circulaire interministérielle DPM/N3/2007/63 du 9 février 2007 (BO Santé n° 2007/03 du 15 avril 2007).

V - EXERCICE DES VOIES DE RECOURS :

Pour les décisions d'irrecevabilité, de rejet et d'ajournement prises sur le fondement des articles 43 et 44 du décret du 30 décembre 1993 modifié, la saisine utile du juge administratif est subordonnée à l'exercice dans un délai de deux mois d'un recours administratif préalable Ce Ce

Ce recours est exclusif de tout autre recours administratif (article 45 du décret du 30 décembre 1993 modifié). Par dérogation aux dispositions des articles R. 312-1 et R. 431-10 du code de justice administrative, le tribunal administratif compétent est celui de Nantes, devant lequel l'Etat est représenté par le ministre chargé des naturalisations (Articles R.312-18 et R.431-10-1 du code de justice administrative dans leur rédaction résultant de l'article 8 du décret n° 2010-725 du 29 juin 2010).

Les décisions de classement sans suite prévues aux articles 35 et 40 du décret du 30 décembre 1993 modifié sont en revanche soumises aux voies et délais de recours ordinaires. Sous la réserve de l'exercice d'un recours gracieux ou hiérarchique, qui ne présente pas de caractère préalable obligatoire, un recours contentieux doit être exercé dans le délai de droit commun de deux mois. Même dans l'hypothèse d'une confirmation sur recours hiérarchique, le tribunal administratif compétent pour connaître de la décision de classement sans suite est celui dans le ressort duquel siège l'autorité préfectorale ayant pris la décision initiale (article R.312-1 du code de justice administrative).

La déconcentration de la procédure de naturalisation, en mettant fin au système de la double instruction, constitue l'une des réformes majeures engagées dans le cadre de la révision générale des politiques publiques. Sa réussite exige votre implication personnelle dans le déploiement du processus opérationnel. Je vous remercie de veiller tout particulièrement à ne pas vous écarter des modalités d'instruction et de traitement qui ont été expliquées à vos services. Il en va du respect de l'égalité de traitement des postulants, qui constitue la première condition de la réalisation de la réforme.

L'accès à la nationalité française, qui concerne plus de 100 000 nouveaux français par an, demeure le principal fondement de notre modèle d'intégration républicaine.

Eric BESSON

Informations sur ce texte

Nature : Circulaire

Date : 27/07/2010