Base de données juridiques

Effectuer une recherche

CAA de VERSAILLES, 5ème chambre, 26/11/2015, 14VE02778-14VE02781, Inédit au recueil Lebon

  • Favori

    Ajoutez ce texte à vos favoris et attribuez lui des libellés et annotations personnels

    Libellés

    Séparez les libellés par une virgule

    Annotations

  • Partager
  • Imprimer

Président : M. LE GARS

Rapporteur : M. Julien LE GARS

Commissaire du gouvernement : Mme MEGRET

Avocat : SELARL MOLAS & ASSOCIES


REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le préfet de l'Essonne a demandé au Tribunal administratif de Versailles :
- par déféré n° 1206909, d'annuler la délibération du 16 juillet 2012 par laquelle le conseil municipal de Corbeil-Essonnes a approuvé l'attribution à la société STB des deux lots composant le marché de " finalisation des vestiaires douches du stade Robinson ", ensemble les marchés correspondants ;
- par déféré n° 1303959, d'annuler le protocole transactionnel signé le
11 janvier 2013 par la commune de Corbeil-Essonnes et la société STB.
Par un jugement nos 1206909-1303959 du 15 juillet 2014, le Tribunal administratif de Versailles a décidé qu'il n'y avait plus lieu de statuer sur le déféré n° 1206909 (article 1er), d'annuler le protocole transactionnel conclu le 11 janvier 2013 par la commune de
Corbeil-Essonnes et la société STB (article 2) et de rejeter les conclusions présentées par la commune de Corbeil-Essonnes sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative (article 3).
Procédure devant la Cour :
I, sous le n° 14VE02778, par une requête et un mémoire complémentaire enregistrés les 17 septembre 2014 et 3 février 2015, la COMMUNE DE CORBEIL-ESSONNES, représentée par Me Riquelme, avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler l'article 2 de ce jugement ;

2° de constater la licéité dudit protocole transactionnel ;

3° de rejeter le déféré n° 1303959 par lequel le préfet de l'Essonne a sollicité l'annulation du protocole transactionnel en cause devant le Tribunal administratif de Versailles ;

4° de mettre à la charge de l'État la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'objet du protocole transactionnel en cause, qui est de restaurer les garanties contractuelles et post-contractuelles liées à des marchés résolus par les parties, est licite, et le Tribunal administratif de Versailles, en jugeant qu'il ne l'était pas, a commis une erreur de droit ;
- de façon subsidiaire, l'intérêt général et les droits des cocontractants s'opposent à ce que le protocole transactionnel, s'il est reconnu irrégulier, soit annulé ;
- de façon infiniment subsidiaire, l'intérêt général et les droits des cocontractants s'opposent à ce que l'annulation du protocole transactionnel, si elle est prononcée, prenne immédiatement effet.

Par un mémoire en défense, enregistré le 16 janvier 2015, le préfet de l'Essonne conclut au rejet de la requête et à ce que ne soit prononcé aucun effet différé à l'annulation du protocole transactionnel.

Il fait valoir que la nullité des contrats s'oppose à ce que soient rétablies les garanties contractuelles et post-contractuelles ; que la commune peut, en dehors des contrats, engager la responsabilité quasi-contractuelle ou quasi-délictuelle de la société STB, et n'est ainsi pas dépourvue d'action.


II, sous le n° 14VE02781, par une requête et un mémoire complémentaire enregistrés les 17 septembre 2014 et 3 février 2015, la COMMUNE DE CORBEIL-ESSONNES, représentée Me Riquelme, avocat, demande à la Cour :

1° d'ordonner, sur le fondement de l'article R. 811-15 du code de justice administrative, le sursis à exécution de l'article 2 de ce jugement ;

2° de condamner l'État à lui verser la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les moyens qu'elle développe sont sérieux et de nature à justifier l'annulation du jugement attaqué ainsi que le rejet des conclusions à fin d'annulation accueillies par lui, et sa requête sur le fondement de l'article R. 811-15 du code de justice administrative est donc recevable ;
- l'objet du protocole transactionnel en cause, qui est de restaurer les garanties contractuelles et post-contractuelles liées à des marchés ayant été résolus, est licite, et le Tribunal administratif de Versailles a commis une erreur de droit en jugeant qu'il ne l'était pas ;
- de façon subsidiaire, l'intérêt général et les droits des cocontractants s'opposent à ce que le protocole transactionnel, s'il est reconnu irrégulier, soit annulé ;
- de façon infiniment subsidiaire, l'intérêt général et les droits des cocontractants s'opposent à ce que l'annulation du protocole transactionnel, si elle est prononcée, prenne immédiatement effet.

........................................................................................................

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :
- le code civil ;
- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Le Gars,
- les conclusions de Mme Mégret, rapporteur public,
- et les observations de MeA..., substituant Me Riquelme, pour la COMMUNE DE CORBEIL-ESSONNES.

1. Considérant que, par les requêtes enregistrées sous les nos 14VE02778 et 14VE02781, la COMMUNE DE CORBEIL-ESSONNES demande l'annulation et le sursis à exécution du même jugement ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;

2. Considérant que, par une délibération du 16 juillet 2012, la COMMUNE DE CORBEIL-ESSONNES a confié à la société STB, déjà attributaire de deux marchés de " fondations - gros-oeuvre - démolition " et " finitions " des vestiaires douches au stade Robinson, deux marchés de " finalisation de vestiaires douches au stade Robinson " ; que, suite au déféré n° 1206909 exercé le 30 octobre 2012 par le préfet de l'Essonne devant le Tribunal administratif de Versailles, le conseil municipal de la COMMUNE DE CORBEIL-ESSONNES a, par une délibération en date du 21 décembre 2012, retiré sa délibération précédente du 16 juillet et, par une seconde délibération prise le même jour, autorisé la signature d'un protocole transactionnel entre la COMMUNE DE CORBEIL-ESSONNES et la société STB concernant des travaux des vestiaires de douches du stade Robinson ; que le préfet de l'Essonne a également déféré au Tribunal administratif de Versailles, sous le n° 1303959,ce protocole transactionnel signé le 11 janvier 2013 ; que la COMMUNE DE CORBEIL-ESSONNES relève régulièrement appel du jugement nos 1206909-1303959 en date du 15 juillet 2014 du Tribunal administratif de Versailles en tant qu'il a accueilli ce dernier déféré et annulé le protocole transactionnel ;

Sur la validité du protocole transactionnel :

3. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 2044 du code civil :
" La transaction est un contrat par lequel les parties terminent une contestation née, ou préviennent une contestation à naître " ; que lorsqu'il est saisi d'un déféré préfectoral contre une transaction, le juge vérifie notamment que les parties consentent effectivement à la transaction, que l'objet de cette transaction est licite, qu'elle ne constitue pas de la part de la collectivité publique intéressée une libéralité et qu'elle ne méconnaît pas d'autres règles d'ordre public ; que méconnaît une règle d'ordre public une transaction faisant revivre les effets d'un contrat annulé par le juge ou résolu par les parties, a fortiori lorsque cette résolution fait suite à un déféré préfectoral pour méconnaissance des règles de publicité et de mise en concurrence ;

4. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 3.1 du protocole transactionnel conclu le 11 janvier 2013, la société STB " s'engage à maintenir, au profit de la commune, les garanties contractuelles et post-contractuelles prévues par les marchés et par la loi (garantie de parfait achèvement, garantie biennale, garantie décennale) liées aux travaux de finalisation des vestiaires douches au stade Robinson " et que " le point de départ de ces garanties est le 13 septembre 2012, date d'effet de la décision de réception notifiée à la société par la commune " ; qu'en outre, l'article 3.2 ajoute que " concernant le solde du prix des travaux (...), la commune accepte d'en prendre 60 % à sa charge, au titre de l'indemnisation du préjudice subi par la société et à l'engagement de la société de maintenir les garanties contractuelles et post-contractuelles quelle que soit l'issue réservée à la requête en déféré de la délibération du 16 juillet 2012 (...) " ;

5. Considérant que les deux marchés attribués le 16 juillet 2012 sans publicité et sans mise en concurrence par la COMMUNE DE CORBEIL-ESSONNES à la société STB ont été résolus par les parties avant qu'il ne soit statué sur le déféré préfectoral dont ils faisaient l'objet pour méconnaissance des règles de publicité et de mise en concurrence ; que, par protocole transactionnel conclu le 11 janvier 2013, également déféré par le préfet, la société STB, qui avait achevé les prestations, s'est néanmoins engagée à assurer les garanties contractuelles et
post-contractuelles relatives aux contrats résolus tandis que la commune s'est engagée à lui verser 60 % du solde des marchés au titre du préjudice subi, ce qui avait pour effet de valider le versement à l'ancien cocontractant de la quasi-totalité des sommes prévues au marché résolu à l'exception d'une somme de 1 000 euros ; que, toutefois, les marchés du 16 juillet 2012, résolus et par suite réputés ne jamais avoir existé, n'ont pu faire naître aucune obligation contractuelle ou post-contractuelle à la charge de la société STB ; que sur ce point, la COMMUNE DE CORBEIL-ESSONNES ne saurait utilement se prévaloir de la circulaire du 7 septembre 2009 relative au recours à la transaction pour la prévention et le règlement des litiges portant sur l'exécution des contrats de la commande publique, qui est dépourvue de caractère réglementaire ; qu'en outre, alors que la résolution imposait de remettre en question l'ensemble des sommes versées, la transaction tendait de fait à valider et à donner son plein effet au marché résolu dans la quasi-totalité de ses stipulations ; qu'il s'ensuit que la transaction dont s'agit méconnaît une règle d'ordre public et présente un caractère illicite ;

Sur les conséquences de l'illégalité du protocole transactionnel :

6. Considérant qu'il appartient au juge, lorsqu'il constate l'existence de vices entachant la validité d'un contrat, d'en apprécier les conséquences ; qu'il lui revient, après avoir pris en considération la nature de l'illégalité éventuellement commise, soit de prononcer la résiliation du contrat ou de modifier certaines de ses clauses, soit de décider de la poursuite de son exécution, éventuellement sous réserve de mesures de régularisation par la collectivité contractante, soit enfin, après avoir vérifié si l'annulation du contrat ne porterait pas une atteinte excessive à l'intérêt général ou aux droits des cocontractants, d'annuler, totalement ou partiellement, le cas échéant avec un effet différé, le contrat ;

7. Considérant que même si les actions en responsabilité quasi-délictuelle n'offrent pas une garantie équivalente à la mise en jeu des garanties post-contractuelles, la gravité du vice entachant la transaction dont s'agit, qui a pour objet de prolonger les effets de deux marchés irrégulièrement passés sans publicité et sans mise en concurrence, justifie l'annulation sans effet différé du protocole d'accord ; qu'il ne résulte pas de l'instruction qu'une telle annulation constituerait une atteinte excessive à l'intérêt général ou aux droits des contractants ; que la COMMUNE DE CORBEIL-ESSONNES n'est donc pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a accueilli le déféré du préfet de l'Essonne et prononcé l'annulation dudit protocole transactionnel du 11 janvier 2013 ;

8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la requête n° 14VE02778 de la COMMUNE DE CORBEIL-ESSONNES doit être rejetée ; que le présent arrêt statuant au fond, il n'y a plus lieu de se prononcer sur les conclusions tendant au sursis à exécution du jugement attaqué présentées dans le cadre de la requête n° 14VE02781 ; que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative s'opposent à ce que soit mise à la charge de l'État, qui n'est pas la partie perdante à la présente instance, la somme demandée par la COMMUNE DE CORBEIL-ESSONNES au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur la requête n° 14VE02781 de la COMMUNE DE CORBEIL-ESSONNES.
Article 2 : La requête n° 14VE02778 de la COMMUNE DE CORBEIL-ESSONNES est rejetée.
''
''
''
''
Nos 14VE02778... 2



Abstrats

135-01-015-02 Collectivités territoriales. Dispositions générales. Contrôle de la légalité des actes des autorités locales. Déféré préfectoral.
37-07-01 Juridictions administratives et judiciaires.

Source : DILA, 07/12/2015, https://www.legifrance.gouv.fr/

Informations sur ce texte

TYPE DE JURISPRUDENCE : Juridiction administrative

JURIDICTION : Cour administrative d'appel

SIEGE : CAA Versailles

Date : 26/11/2015