Les hôpitaux sous le poids de la législation des déchets

Publié le 16 avril 2012 à 0h00 - par

HOSPIMEDIA – Les engagements européens et internationaux pris par la France pour réduire le volume des déchets impactent la législation française et, de fait, les établissements de soins, obligés de se conformer aux règles sur le retraitement des ordures.

HOSPIMEDIA – Entre impératifs sanitaires et environnementaux d’un côté, et contraintes budgétaires de l’autre, les hôpitaux doivent jongler. Une directive du 6 septembre 2006 relative aux piles et autres accumulateurs, réglemente notamment leur collecte et leur recyclage. Une autre, en date du 27 janvier 2003, concerne les déchets d’équipements électriques et électroniques. Plus récemment, une directive-cadre de 2008 encadre le traitement de la quasi-totalité des déchets en Europe.

Depuis son premier texte sur la gestion des ordures, qui remonte à 1975, l’Union européenne (UE) a progressivement élaboré un ensemble de règles qui impactent le tri et la revalorisation des différents déchets au quotidien, y compris pour les établissements de santé européens. « En France, la loi Grenelle 2 du 12 juillet 2010 et les textes qui en découlent sont une déclinaison de la législation européenne et internationale, notamment des objectifs fixés dans le protocole de Kyoto« , détaille Olivier Toma, président du Comité pour le développement durable en santé (C2DS) et ancien directeur de clinique, qui rappelle qu’il existe actuellement « plus de 45 types de déchets d’hôpitaux ».

Une législation renforcée

Ainsi, pour respecter ses engagements internationaux en matière de réduction des volumes de déchets produits, la France a autorisé les communes à instaurer une taxe basée sur la quantité des ordures émises et à laquelle pourrait être soumise les établissements de soins. La Loi de finances pour 2012, entrée en vigueur le 28 décembre dernier, prévoit que cette taxe soit composée d’une part fixe à laquelle s’ajouterait une part variable selon le poids des ordures rejetées ou le nombre d’enlèvements. D’ici 2015, tous les producteurs de déchets dits fermentescibles (déchets verts, déchets alimentaires, papiers) seront par ailleurs tenus de les faire traiter (article 204 de la loi Grenelle 2).

« Ces règles sont nécessaires pour réduire le volume des déchets et pour l’environnement, mais elles ont un impact considérable pour les établissements de soins, puisque ceux-ci doivent se mettre en conformité avec la loi sans recevoir d’aide financière de l’État, explique le président du C2DS. Or, organiser une collecte sélective, par exemple, demande beaucoup de main-d’œuvre. » Une charge supplémentaire pour les hôpitaux dont les nouveaux tarifs n’ont été revalorisés que de 0,19% cette année, et dont les frais de fonctionnement augmentent à l’aune d’une inflation de 2,5% ces 12 derniers mois.

Solutions locales et internationales

Plusieurs établissements de santé ont réussi à s’organiser. Une récente enquête menée par le C2DS auprès d’un peu plus de 260 d’entre eux a révélé qu’en dix ans, les hôpitaux et cliniques sont passés de deux filières de tri sélectif (celle des Déchets d’activités de soins à risques infectieux – DASRI – et celle de tous les autres déchets) à 14 en moyenne. « Certains en ont 25, comme l’AP-HP », précise Olivier Toma. Le CHU d’Amiens collecte ainsi les outils métalliques à usage unique utilisés dans les blocs opératoires, comme les ciseaux. Mais au lieu de les placer dans la filière payante des DASRI, les stérilise, les broie puis les revend à des industriels intéressés par ces métaux.

Autre initiative locale : celle de l’Hôpital privé nord parisien de Sarcelles (Val-d’Oise) qui teste depuis six mois un appareil permettant de déshydrater et broyer les déchets fermentescibles. Ces restes sont ensuite revendus à des entreprises qui, après retraitement et contrôle sanitaire, les revendent elles-mêmes à des agriculteurs qui ont besoin d’engrais. L’appareil, qui coûte en principe 20.000 euros, est, à l’heure actuelle, prêté par le fournisseur, le temps que l’opération devienne rentable pour l’établissement. « A terme, l’objectif est de mutualiser les moyens, comme les moyens de transport de déchets, avec l’idée d’utiliser un seul camion pour plusieurs établissements d’une même zone », ajoute Olivier Toma.

Quid de l’entraide transfrontalière ?

Certains hospitaliers tentent de trouver des solutions au sein d’associations internationales, comme Health care without harm (HCWH), regroupant hôpitaux, professionnels de santé et organisations environnementales. D’autres se sont réunis en 2010 et 2011, à l’occasion de deux conférences organisées par l’Institut européen pour les déchets médicaux (EIMW). Autour d’experts, de chercheurs et de représentants de gouvernements européens (environ 150 participants issus de 18 pays), ils ont échangé des idées sur la gestion des déchets médicaux et pharmaceutiques. La poursuite des discussions aura lieu en 2013, à une date encore inconnue.

Nathalie Ratel
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Pour aller plus loin :

  • Quelles aides pour mieux gérer ses déchets ?

L’UE finance des projets écologiques via son programme LIFE Environnement. Elle dispose ainsi, pour 2012, d’un budget avoisinant 280 millions d’euros. Les projets proposant des solutions concrètes et innovantes pour réduire la production de déchets ou faciliter leur recyclage sont éligibles, y compris ceux pilotés par un ou plusieurs établissements de soins, publics ou privés. Ils n’ont pas nécessairement besoin d’avoir une dimension transfrontalière. Un appel à candidatures, publié au Journal officiel de l’UE le 13 mars dernier, court jusqu’au 26 septembre 2012. Pour plus d’informations, consulter le site (en anglais) du programme LIFE Environnement ou contacter le Bureau des affaires européennes au ministère de l’Écologie et du Développement durable.

En France, l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (ADEME) et l’Agence nationale d’appui à la performance des établissements de santé et médico-sociaux (ANAP), par exemple, cofinancent des diagnostics individualisés pour déterminer de quelle manière les déchets peuvent être revalorisés, voire des plans d’action. L’ADEME a également mis en place un guide de l’écoresponsabilité accessible sur Internet.


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