Une femme meurt tous les deux jours et demi des suites de violences conjugales perpétrées dans la sphère privée. Ce phénomène de société n’est pourtant pas inévitable.
Les violences conjugales ne se réduisent pas à une affaire de couple. En cas de drame, il n’est pas rare d’entendre que la victime avait fait des démarches auprès de professionnels. Votre devoir de professionnel, tout autant que de citoyen, est de réagir selon la situation pour laquelle vous êtes sollicité.
Situations du professionnel face aux violences conjugales
- Vous vous retrouvez subitement face à une femme en situation d'urgence qui se présente à vous spontanément.
- Vous devez réagir rapidement à la demande d'un tiers, témoin des violences qu'une femme vient de subir qui la poussent à fuir.
- Vous vous sentez désarmé car une femme vient vous révéler qu'elle endure depuis des années des souffrances, psychologiques puis physiques, voire sexuelles et économiques. Aujourd'hui, elle craint pour sa vie, son intégrité et celle de ses enfants.
- Vous suspectez qu'une femme est victime, eu égard aux conséquences que vous avez repérées sur les enfants, témoins et victimes à leur tour (directement ou indirectement) des violences perpétrées sur leur mère. Mais vous craignez qu'en intervenant, la famille soit séparée du fait de votre signalement.
- Vous comprenez qu'une femme usagère d'un de vos services vous cache les violences qu'elle subit. Elle s'escrime à vous le cacher alors que vous souhaitez l'aider en commençant par la faire parler, verbaliser les faits.
En qualité de professionnel(le), d’élu(e) ou de témoin des violences, vous pouvez briser le silence et éviter que le conjoint ne recommence.
Comment briser le silence et éviter que le conjoint ne recommence
- Précisez la confidentialité de l'entretien.
- Valorisez la démarche entreprise par la femme victime de violences.
- Osez aborder une affaire qui relève de la vie privée, de l'intimité et d'une alchimie à deux.
- Cassez le tabou de la violence qui détruit et culpabilise les femmes.
- Si la femme argumente en justifiant le comportement de son « bourreau », rappelez-lui qu’aucun être humain n’a le droit de porter atteinte à un autre être humain, quelles que soient les raisons invoquées.
- Comprenez et ne jugez pas ! Attendez-vous à ce qu'elle fasse des allers-retours chez elle !
- Encouragez la femme et respectez le temps nécessaire à sa mise à distance de son « bourreau ». Ce dernier demeure parfois et longtemps l'homme qu'elle aime, qu'elle a aimé et qui reste le père de ses enfants.
- Confirmez que les violences sont illégales. Que c'est un délit puni par la loi. En effet, la loi interdit de porter atteinte à l’intégrité d’une personne, quelle que soit la forme des violences, physiques, sexuelles, psychologiques, économiques.
- Précisez que les auteurs de violences ne jouissent plus d’impunité comme au siècle dernier. Ils sont punis par la loi et encourent amendes et/ou prison.
- Précisez que le dépôt de plainte et la convocation potentielle qui s’en suit peuvent servir d’outil de prise de conscience de ces actes par l’agresseur. Entendre un tiers lui signifier que son comportement est hors la loi peut-être nécessaire, au cas où celui-ci ressent un sentiment d’impunité dans la sphère privée.
- En cas de retour au domicile (la femme peut ne pas être prête à agir immédiatement) avertissez-la qu’une application existe sur Smartphone. Encouragez-la à télécharger l’application App-elles sur le lien suivant : www.app-elles.fr et à s’en servir en cas d’agression.
- Avertissez des proches ou des voisins désormais prévenus des coups portés feront preuve de vigilance et agiront auprès des forces de l’ordre le cas échéant.
- Ne tenez pas de propos négatifs sur son conjoint. Cette femme a sans doute déjà une image dégradée d’elle-même et n’a pas besoin de sentir qu’elle a fait « le mauvais choix » en restant avec cet homme-là.
- Ne stigmatisez pas le conjoint violent devant la femme ou les enfants, restez sur le terrain de la loi. Cela permet de proposer un accompagnement spécifique au conjoint le cas échéant.
- Orientez la femme vers les associations spécialisées.
- Laissez-lui cependant la possibilité de revenir vers vous, puisqu’elle a eu suffisamment confiance en vous pour vous en parler.
- Assurez un suivi de la situation, et ne considérez pas que le « dossier » a été transmis aux personnes compétentes. Assurez-vous-en personnellement.
Lors de violences : contactez « Police Secours » : 17 ou le 112 depuis un téléphone portable. En cas de blessures, contactez le SAMU (service médical d’urgence) : 15.Si la gravité des violences nécessite l'intervention des forces de police ou de gendarmerie, les forces de l'ordre peuvent interpeller l'auteur et le placer en garde-à-vue. Leur intervention, consignée dans une note, parvient systématiquement au procureur si les faits de violence sont jugés graves. Ce dernier décide des suites à donner. Il peut aussi faire comparaître l'auteur immédiatement au tribunal de grande instance (TGI) si les faits sont répétés ou très graves.
Composez le 3919 - Violences Femmes Info
C'est un numéro d'écoute national destiné aux femmes victimes de violences, à leur entourage et aux professionnels concernés. Appel anonyme et gratuit 7 jours sur 7, de 9h à 22h du lundi au vendredi et de 9h à 18h les samedi, dimanche et jours fériés.
Lorsque vous estimez que les enfants mineurs sont en danger, vous devez faire un signalement auprès du conseil départemental (ex : conseil général) ou directement auprès du procureur de la République (transmission d’une information préoccupante (IP)). Une simple lettre au président du conseil départemental indiquant les coordonnées de la famille, les vôtres, relatant les faits que vous avez observés suffit.
Vous pouvez aussi composer le 119 : numéro national d’accueil téléphonique pour l’enfance en danger. Selon la gravité de la situation, les écoutants informent les forces de l’ordre ou les services du conseil général.
Les missions du 119
Trois missions sont confiées à Allô enfance en danger :
- accueillir les appels d'enfants en danger ou en risque de l’être et de toute personne confrontée à ce type de situations pour aider à leur dépistage et faciliter la protection des mineurs en danger ;
- transmettre les informations préoccupantes concernant ces enfants aux services des conseils départementaux compétents en la matière, aux fins d’évaluation de la situation de l’enfant et de détermination de l’aide appropriée le cas échéant / signaler directement au Parquet lorsque l'information recueillie le justifie ;
- agir au titre de la prévention des mauvais traitements à enfant.
A noter
La
loi n° 2010-769 du 9 juillet 2010
reconnaît désormais les violences psychologiques répétées : les insultes, humiliations et stress psychologiques doivent être signalés comme des violences au même titre que les coups.