Depuis 1881, le principe de la gratuité de l’enseignement primaire est institué. Le préambule de la Constitution de 1946 a érigé la gratuité de l’enseignement public en principe constitutionnel.
L’acquisition des fournitures à usage collectif constitue une dépense obligatoire pour les communes. En revanche, l’acquisition des fournitures qui sont destinées à un seul et même élève et qui restent sa propriété ne relèverait pas du principe de la gratuité (par exemple : gomme, crayons, règle, ciseaux).
De nombreuses communes prennent souvent la décision de prendre en charge ce type de fournitures, avec le souci d’alléger les charges qui pèsent sur les familles au moment de la rentrée scolaire.
A noter
« Le juge administratif impose le respect de ce principe [principe de gratuité] et annule pour illégalité toute demande communale de participation des familles pour la couverture des dépenses de fournitures scolaires à usage collectif (
CE, 10 janv. 1986, Commune de Quingey,
req. n° 58908 , Rec. 3).
Aucune participation ne peut être demandée aux parents d’élèves d’une école maternelle publique, qu’ils soient ou non domiciliés dans la commune dans laquelle se situe l’école, dès lors qu’il s’agit des frais d’acquisition, d’entretien et de renouvellement du matériel d’enseignement (
art. L. 212-5 du Code de l’éducation
). »
Source : É. Landot, « Achats de dictionnaires et autres livres pour les élèves du primaire : quelles procédures ? à quels prix ? », article publié le 23 juillet 2018, Cabinet Landot & associés.
Pour les communes où il n’y a toutefois pas de prise en charge, la
circulaire n° 2008-093 du 10 juillet 2008
invite les équipes enseignantes à soumettre la liste des fournitures scolaires devant être acquises par les élèves à l’approbation des associations de parents d’élèves, dans le cadre d’un conseil d’école par exemple, après avis du conseil des maîtres. L’attention de l’élu siégeant au sein des conseils d’écoles doit être sollicitée ; son avis sera également demandé.
La circulaire donne quelques principes concernant « la constitution de ces listes [qui] doit prendre en compte les préoccupations des familles et, pour les élèves, s’inscrire dans une logique d’éducation à la consommation ». Il s’agit entre autre de développer la capacité à « distinguer le nécessaire de l’accessoire » et la « prise en compte des questions environnementales ».
Le cas des manuels scolaires
La fourniture des livres scolaires ne constitue pas en tant que telle une dépense obligatoire : le seul texte qui existe sur les manuels scolaires est le décret du 29 janvier 1890 modifié par le décret du 12 avril 1943, qui prévoit que la caisse des écoles fournit des livres aux élèves indigents.
A noter
Éric Landot du Cabinet Landot & associés (cf. art. précité du 23 juillet 2018) a une interprétation différente : « Les dépenses de premier équipement en matériel à usage collectif relatives aux classes elles-mêmes et à leurs annexes sont à la charge de la commune. Les manuels scolaires sont fournis gratuitement aux élèves (v. implicitement
article L. 132-1 du Code de l’éducation
). »
L’usage des manuels est fort répandu : dans leur majorité, les villes en font l’acquisition pour les écoles. Dans la mesure où les manuels ne sont pas encore présentés comme des outils pédagogiques, dont l’acquisition pourrait de ce fait dépendre de l’État, les communes ont accepté de prendre en charge cette dépense.
Les enseignants utilisent dans le même temps manuels et pages photocopiées : les droits de reproduction sont certes pris en charge par l’État, mais la ville prend souvent en charge les frais d’impression, avec la fourniture des photocopieuses et du papier.
Le débat qui domine porte sur le financement des manuels scolaires. Un communiqué de presse du 4 septembre 2007 du Syndicat national de l’édition (SNE) note que « la France se situe dans le peloton de queue des pays de l’Europe tant en termes d’équipement en manuels de ses écoliers (11 € en moyenne par élève et par an, alors que la moyenne européenne est proche de 30 €) qu’en termes d’investissements multimédias ».
Dans l’article « L’édition scolaire en 2009-2010 : Réformes et numérique au programme ! » paru dans L’Édition en perspective 2009-2010, le SNE fait remarquer que « les nouveaux programmes de l’école primaire (BO du 19 juin 2008) s’appliquent à toutes les classes et toutes les disciplines simultanément en 2008. Leur parution tardive n’a pas permis aux éditeurs de réaliser les ouvrages nécessaires à la mise en œuvre de cette réforme d’une ampleur exceptionnelle. Au printemps 2009, ces nouveaux manuels ont été proposés par les éditeurs à l’ensemble des enseignants.
En octobre 2009, en dépit des efforts consentis par les municipalités, plus de 2 millions d’élèves de cycle III (soit 80 %) n’ont pas de manuel conforme aux nouveaux programmes en français. Il en est de même pour les manuels de mathématiques, alors que l’enseignement de ces deux disciplines a significativement changé ».
Dans un article du journal Le Monde du 22 octobre 2009 intitulé « Les manuels scolaires sont largement périmés selon les éditeurs », la représentante du SNE plaidait pour un financement et une clarification de la situation dans le primaire : « Ce sont les communes qui financent mais rien ne leur en fait obligation. Du coup, d’une commune à l’autre, on se retrouve avec des écarts de 1 à 10 ! Il faudrait rendre ce financement obligatoire. »
Les éditeurs préconisent une dotation moyenne par élève de 57 € en école élémentaire.
Inédit dans l’histoire de l’édition scolaire – pour la première fois à la rentrée 2016 –, les programmes de toutes les disciplines et de toutes les classes du CP à la 3e devaient être changés simultanément. Pour les éditeurs scolaires, le chantier était colossal : 14 manuels à renouveler pour le collège, soit environ 11,2 millions de livres à imprimer pour les collégiens (sur 2 ans) et autour de 16 millions pour les écoliers (dès la rentrée 2016).
Le financement du renouvellement des manuels scolaires
Le coût unitaire d’un manuel est estimé à 15 € par élève et par discipline. Le ministère ne prévoit pas de prendre en charge le renouvellement des manuels scolaires de l’école primaire. Pourtant, aucun texte n’impose aux communes de prendre en charge la fourniture des manuels scolaires ; le décret du 29 janvier 1890 ne fait que leur en reconnaître la faculté. Si, en pratique, la quasi-totalité des communes prennent à leur charge l’acquisition des manuels scolaires, celle-ci n’a pas de caractère obligatoire.
Aussi, le rapporteur au Sénat réitère l’observation qu’il avait formulée l’année dernière : il est inadmissible qu’une telle charge, estimée par les éditeurs à 240 millions d’euros, soit imposée aux communes. Il regrette que la subvention exceptionnelle votée par le Sénat à cette fin dans le projet de loi de finances 2016 ait été supprimée par l’Assemblée nationale à l’initiative du gouvernement.
Le cas des équipements informatiques
Si les ordinateurs sont définis comme du mobilier scolaire, leur acquisition relève de la compétence communale. En revanche, l’achat des logiciels constitue une dépense pédagogique, donc prise en charge par l’État. Cependant, la répartition entre l’État et la commune dans ce domaine n’est pas toujours simple, et il est possible que la ville soit en charge des achats de logiciels.
Défini par la
loi no 2005-380 du 23 avril 2005
d’orientation et de programmation pour l’avenir de l’école, le
nouveau socle commun de connaissances, de compétences et de culture est entré en vigueur à la rentrée 2016. Il comprend cinq domaines. L’outil numérique entre dans le domaine 2 « Les méthodes et outils pour apprendre. Apprendre à apprendre, seul ou collectivement, en classe ou en dehors ».
L’équipement en informatique des écoles est aujourd’hui une priorité pour la plupart des villes. Il apparaît qu’un plan d’équipement concerté entre les directions des écoles, l’Éducation nationale et les villes, s’intéressant à son usage, permet de rassurer les collectivités sur l’utilisation maximale des matériels et sur le développement des expérimentations (cf. Niveau de l’équipement informatique et localisation dans les écoles).
A noter
« Lorsque l’État affecte, par convention, certains matériels aux établissements scolaires d’une commune (exemple : matériels informatiques), il ne peut, ensuite, refuser de prendre en charge les frais de réparation de ces matériels en raison d’une insuffisance ou d’une inexistence de crédits. Un tel motif n’est pas de nature à exonérer l’État des obligations qu’il avait contractées envers la commune par convention (
CE, 13 mai 1992, Commune d’Ivry-sur-Seine, req. n° 101578
). »
Source : É. Landot, « Achats de dictionnaires et autres livres pour les élèves du primaire : quelles procédures ? à quels prix ? », article publié le 23 juillet 2018, Cabinet Landot & associés.
En répondant aux besoins de fonctionnement des écoles, les villes participent à une politique éducative globale : elles ne font pas toujours la distinction entre les dépenses obligatoires et facultatives, en matière d’achat de livres scolaires, d’équipement informatique et de fournitures (cf. Connaître les principes de gratuité du système éducatif français). Elles souhaitent aider les familles et favoriser la réussite scolaire de tous les enfants.
Un budget souvent important est ainsi dédié par les collectivités pour répondre aux besoins de fonctionnement des écoles.