Trois catégories de délégations
Le pluriel du mot délégation souligne que le chef d’établissement scolaire reçoit des délégations exogènes en provenance de sa tutelle académique, voire de la collectivité territoriale de rattachement ; départements pour les collèges, régions pour les lycées, EPCI dans des cas plus rares mais appelés à se développer avec l’acte III de la décentralisation.
À son tour, le chef d’établissement transmet des attributions à plusieurs acteurs de l’EPLE. Par ailleurs, les instances de l’EPLE peuvent elles-mêmes se dessaisir d’une partie de leurs attributions vers une autre instance (délégation du conseil d’administration à la commission permanente). Le fonctionnement de l’EPLE se caractérise par conséquent par un réseau complexe de délégations.
Du point de vue systémique, il existe trois grandes catégories de délégations : la délégation de mission ; la délégation fonctionnelle ; la délégation de compétences. Du point de vue juridique, les délégations s’accompagnent d’une délégation de signature et d’un transfert de compétences sous la forme d’un acte administratif.
Déléguer pour quoi faire ?
Les délégations se trouvent au cœur du pilotage pédagogique et administratif des EPLE. La gestion des actes du quotidien occupe une place très importante dans les attributions du chef d’établissement et de son équipe. Cependant, depuis une quarantaine d’années l’institution scolaire s’est engagée dans la maïeutique de l’autonomie et du projet. L’autonomie traduit la volonté du législateur de déconcentrer la chaîne des décisions de portée politique et/ou administrative du centre vers ses périphéries. Le ministre délègue des compétences aux recteurs qui délèguent aux directeurs académiques et aux chefs d’établissement. De plus, la décentralisation s’accompagne, depuis 2005, de la mise à disposition des agents des collectivités territoriales aux EPLE pour l’entretien des locaux et le service d’hébergement. Le département ou la région délègue le management de proximité au chef d’établissement qui incarne l’autorité fonctionnelle.
Une dynamique de projet
Certaines délégations s’accompagnent d’un dessaisissement des attributions de l’autorité délégante. D’autres formes de délégations se traduisent par une délégation de signature destinée à alléger le travail du délégant qui conserve l’exercice de sa souveraineté. C’est ici qu’il convient de donner sens aux délégations en faisant appel à la maïeutique du projet destinée à mobiliser les acteurs du terrain autour d’objectifs pédagogiques partagés en faveur des élèves.
Appelé à valoriser le couple « autonomie-innovation », le projet résulte de la transposition des modes de fonctionnement et d’organisation des grands systèmes industriels complexes vers une institution longtemps pyramidale. Sa mise en place suppose qu’un système fondé sur des procédures en cascade résultant d’un cadrage national et académique produise des marges nouvelles d’autonomie et des régulations internes capables de permettre son fonctionnement.
Commentaire
Nous avons tous été habitués à confier des tâches à nos collaborateurs sous la forme de directives et de procédures : les emplois du temps ; les examens ; la gestion matérielle ; la vie scolaire ; l’enseignement technologique tertiaire, industriel ou commercial.
Ce fonctionnement tayloriste repose sur le cloisonnement des missions et la division des compétences. Il génère l’obéissance et l’exécution là où l’adhésion fait défaut. Il se traduit souvent dans les établissements par des conflits d’intérêt ou de positionnement hérités du statut, du grade et de l’emploi occupé.
Les délégations s’inscrivent aujourd’hui dans une approche différente, valorisant l’expertise, l’initiative individuelle, le débat contradictoire, l’adhésion au projet et l’évaluation des résultats.