L’étendue d’un projet de mutualisation des services s’organise principalement autour de trois dimensions :
- le temps pendant lequel le projet est déployé puis mis en œuvre ;
- l’espace sur lequel la mutualisation est déployée ;
- la profondeur des changements opérés via les regroupements qu’implique la mutualisation.
La complexité des démarches de mutualisation des services provient principalement de la multiplicité des combinaisons possibles de ces trois dimensions.
Savoir gérer les différentes temporalités du projet
Sauf à considérer qu’un changement important d’organisation administrative peut résulter d’un processus instantané, une modification dans l’organisation et le fonctionnement d’une administration s’opère sur une période plus ou moins longue. S’agissant plus particulièrement de la mutualisation, et compte tenu des implications qu’une organisation sous cette forme implique, le facteur temps revêt une importance première.
Que la mutualisation concerne des fonctions supports ou des services opérationnels, qu’elle implique ou non une grande diversité d’institutions publiques, vous devrez en toute hypothèse gérer les différents temps du projet de mutualisation :
- le temps d’un diagnostic partagé avec l’ensemble des acteurs ;
- le temps des décisions qui doivent être légitimées ;
- le temps de la mise en œuvre de l’organisation mutualisée ;
- enfin, le temps de l’évaluation de ses résultats.
Selon le contexte local, chacune de ces étapes sera plus ou moins longue et votre rôle plus ou moins différent.
Assez généralement par ailleurs, votre projet s’inscrit dans une dynamique temporelle longue, habituellement un mandat. Les dispositions récentes renforcent cet alignement du temps de vos projets d’organisation sur la durée des mandats. Les schémas de mutualisation des services doivent en effet prévoir une programmation des mutualisations et leur évaluation selon les cycles électoraux au sein du bloc local.
Analyser correctement les temporalités de votre projet de mutualisation vous permettra également d’en maîtriser le rythme.
Composer avec les différentes échelles de l’action et la multiplicité des territoires
L’action publique locale relève d’une multiplicité d’institutions ou d’établissements qui en dépendent, qui tous disposent d’une plus ou moins grande faculté d’intervention sur des périmètres géographiques qui souvent se chevauchent.
La mutualisation des services, en ce qu’elle vous permet de « passer par-delà » les frontières institutionnelles pour favoriser les coopérations territoriales, peut apparaître comme source de simplification. En réalité, les frontières demeurent, au moins pour un temps, et vont parasiter la mise en œuvre des mécanismes de mutualisation.
Il est donc important de cartographier de manière précise les limites de compétences de chaque institution amenée à participer à la mutualisation ou à solliciter un service mutualisé. Cela vous permettra d’identifier et de gérer les zones d’incertitude, soit parce qu’elles ne seraient pas couvertes par l’organisation mutualisée, soit parce que plusieurs acteurs resteraient légitimes pour intervenir.
Bien mesurer la profondeur des changements à opérer
Même dans les cas les plus simples de mutualisation (ex. : un seul service mutualisé entre l’EPCI et la ville-centre avec des moyens issus exclusivement de la ville-centre), celle-ci peut induire dans un premier temps une plus grande complexité de gestion pour les agents et, partant, une moins grande lisibilité pour les usagers ou utilisateurs. La multiplicité des décisionnaires possibles, l’incertitude sur les canaux de prise de décision, les conflits de priorité entre tâches peuvent enrayer le fonctionnement des services et entraver leur production.
Cette source de complexité est bien entendu plus importante lorsque les mutualisations sont envisagées à des échelles plus larges. En particulier, lorsqu’il s’agit de réunir en un même service des équipes issues d’institutions différentes, utilisant des méthodes et outils propres, vous devrez organiser un travail de rapprochement qui n’est pas aisé au demeurant. Vous ne pourrez pas, pour des raisons évidentes, laisser perdurer trop longuement des procédures de gestion différentes au sein d’un même service, y compris si vous spécialisez vos équipes par « territoire » ou « client ».