Recevabilité
La demande doit être précédée d’une demande préalable à l’administration et présentée par un avocat, en application de l’
article R. 431-3 du Code de justice administrative
, même en matière de travaux publics. En effet, le
décret n° 2016-1480 du 2 novembre 2016
portant modification du Code de justice administrative a supprimé l’exception (autrefois prévue à l’article R. 421-1 de ce Code) très ancienne qui voulait qu’en matière de travaux une demande préalable n’était pas nécessaire.
Par ailleurs, lorsque le juge constate la nullité d’un contrat, les moyens nouveaux tirés de l’enrichissement sans cause ou la responsabilité quasi délictuelle de l’administration ne sont plus recevables après la clôture de l’instruction (
CAA Marseille, 13 juin 2005, n° 03MA01021
et
n° 03MA01134
, SARL Parqueterie de la Lys et Commune de Montpellier). La même cour a rappelé qu’une partie qui, en première instance, engage une action visant à faire reconnaître la responsabilité contractuelle de son cocontractant ne saurait, en appel, être admise à invoquer pour la première fois, des motifs de responsabilité quasi délictuelle (
CAA Marseille, 21 juin 2007, n° 05MA00356, SARL Maçonnerie
). Cependant, le Conseil d’État a assoupli cet état de la jurisprudence en reconnaissant que des moyens relatifs à la responsabilité quasi délictuelle ou de l’enrichissement sans cause peuvent être invoqués pour la première fois en appel (
CE, 22 février 2008, n° 266755, Tête
).
De même, la cour administrative de Marseille a admis le droit à indemnisation de la région Languedoc-Roussillon sur le fondement de la responsabilité quasi délictuelle, au motif que : « […] lorsque le juge, saisi d’un litige engagé sur le terrain de la responsabilité contractuelle, est conduit à constater, le cas échéant d’office, la nullité du contrat, les cocontractants peuvent invoquer des moyens relatifs à leur responsabilité quasi délictuelle, de sorte qu’un maître d’ouvrage est recevable, après constatation par le juge de la nullité du marché le liant à un concepteur ou un constructeur, à demander la réparation des préjudices qui ont pu lui être causés dans l’exécution des prestations et travaux concernés et invoquer, à cet effet, les fautes qu’aurait commises ce concepteur ou constructeur, en livrant, en dehors de toute obligation contractuelle régulière, un ouvrage non conforme à sa destination pour avoir été construit en méconnaissance des règles de l’art » (
CAA Marseille, 14 avril 2011, n° 08MA01390, Région du Languedoc-Roussillon
).
Cependant, de tels moyens ne peuvent être soulevés au-delà du délai d’appel, lorsque la nullité est prononcée par le juge de première instance (
CE, 9 décembre 2011, n° 342283, Commune d’Alès
).
Présentation de la demande
La demande doit être chiffrée, sauf si le requérant subordonne la définition de la somme qu’il demande aux conclusions d’une expertise à ordonner. Les intérêts doivent être demandés explicitement au juge, au besoin en cours d’instance. Dans ce cas, leur effet rétroagit au jour de la requête, ou au jour de la réclamation si elle a été adressée préalablement à la requête. Il ne paraît pas inutile de souligner ici que le Conseil d’État a fixé les règles applicables à la capitalisation des intérêts (
CE, Sect., 13 décembre 2002, n° 203429, Compagnie d’assurances « Les Lloyds de Londres »
, Rec. 460, AJDA 2003 p. 398, concl. T. Olson). À défaut de demande d’intérêts, la condamnation entraînera de plein droit le cours des intérêts à compter du jugement.
Appréciation du montant de l’indemnité
En principe, la réparation du préjudice est équivalente au prix des prestations concernées (
CAA Paris, 13 mars 2007, n° 04PA02721, Société Citroën c/ Ugap
et
CAA Paris, 13 mars 2007, n° 04PA02781, Société Peugeot c/ Ugap
). Cette réparation peut s’étendre jusqu’au paiement du bénéfice dont le titulaire a été privé par la nullité du contrat (
CE, 16 novembre 2005, n° 262360, Commune de Nogent-sur-Marne
).
La jurisprudence considère d’autre part que, dans le cas où la nullité du contrat résulte d’une faute de l’administration, le cocontractant peut, outre le remboursement des dépenses qui ont été utiles à la collectivité, prétendre à la réparation du dommage imputable à cette faute (
CE, 26 mars 2008, n° 270772, Société Spie Batignolles
).
Le juge administratif tient compte de l’imprudence commise par le cocontractant ayant accepté d’exécuter un contrat irrégulier ou ayant réalisé des prestations en dehors de tout contrat. La réparation sera appréciée en fonction des fautes commises par chaque partie (
CE, Sect., 10 avril 2008, n° 244950, Société Decaux c/ Département des Alpes-Maritimes
, Contrats et march. publ. 6/2008, n° 159).
Plafond de l’indemnisation
L’indemnisation totale ne peut pas assurer à l’ancien cocontractant une rémunération supérieure à celle à laquelle il aurait eu droit en application des clauses du contrat. Il est néanmoins possible d’y inclure les sommes résultant des incidents d’exécution du contrat (
CE, 8 décembre 1995, n° 144029, Commune de Saint-Tropez
; CE, 10 avril 2008, n° 244950, Société Decaux c/ Département des Alpes-Maritimes, préc. ; CE, 26 mars 2008, n° 270772, Société Spie Batignoles, préc.), notamment ceux mentionnés au décompte général.