Autorité compétente et « permission de voirie »
Toute occupation assortie d’une emprise au sol (installation d’une pompe à essence ou d’une canalisation, par exemple) relève de la compétence de la personne publique propriétaire (
CGPPP
, art. R. 2122-2, al. 1er et R. 2122-4).
Exemples : ainsi, les occupations privatives sur les routes nationales ou le domaine public militaire sont accordées par le préfet du département au nom de l’État.
De même, « il résulte de l’article L. 2122-21 du
Code général des collectivités territoriales
, qui prévoit que le maire est compétent sous le contrôle du conseil municipal pour conserver et administrer les propriétés de la commune, que, s’il appartient au conseil municipal de délibérer sur les conditions générales d’administration et de gestion du domaine public communal, le maire est seul compétent pour délivrer les autorisations d’occupation du domaine public. Il est également compétent, sur le fondement de ces mêmes dispositions, pour les retirer ou les abroger » (
CE, 18 nov. 2015, n° 390461, La SCI Les II C et autres
, LPA 14 mars 2016, n° 52, p. 16, note M. Bouchet).
« Toutefois, lorsque la personne publique propriétaire a confié la gestion de ce domaine à un établissement public ou à un autre organisme gestionnaire, la demande est adressée à cet établissement ou organisme, s’il tient expressément du texte qui lui confie ou concède la gestion du domaine le pouvoir d’y délivrer des titres d’occupation » (
CGPPP
, art. R. 2122-2, al. 2).
Autorité compétente et « permission de stationnement »
Dans les hypothèses autres que celles de délivrance d’une « permission de voirie », c’est la personne détenant la police de la circulation sur ce domaine public qui sera seule compétente pour délivrer une telle autorisation (
CE, 15 mars 2017, n° 391901, Préfet de police de Paris
, cons. n° 6 à 8 ; voir aussi, CE, 15 juill. 1964, n° 61100, Longuefosse ;
CE, 9 avr. 2014, n° 366483, Domaine national de Chambord
).
Ainsi, les « permissions de stationnement » (occupation du domaine public sans emprise au sol) accordées pour l’utilisation d’une terrasse de café ou pour le stand d’un commerçant ou d’un particulier, dans le cadre d’une manifestation dûment autorisée par une mise à disposition d’une dépendance du domaine public obtenue par l’organisateur de la manifestation, peuvent relever de la compétence d’une autre personne publique voire d’une personne privée (telle que l’organisateur d’une brocante ou d’une braderie). En cette dernière hypothèse, la mise à disposition unilatérale d’une dépendance du domaine public pour y organiser une occupation privative permet de confier à une personne privée un pouvoir de police et ainsi de contourner la règle selon laquelle « on ne contracte pas, en principe, sur un tel pouvoir ».
Pouvoir discrétionnaire de l’autorité délivrant les autorisations (unilatérales) d’occupation privative du domaine public
L’octroi d’une autorisation d’occupation privative du domaine public est largement discrétionnaire, d’ailleurs l’autorité administrative qui la délivre peut l’assortir de conditions particulières d’intérêt général, de caractère environnemental, par exemple. L’article R. 2122-3 du
CGPPP
prévoit seulement les modalités d’envoi ou de dépôt de la demande (pli recommandé avec avis de réception ou déposé contre décharge) ainsi que le contenu du dossier de la demande.
C’est l’Administration qui décide librement, sous le contrôle du juge administratif, en prenant en compte le plus souvent l’objet de l’occupation sollicitée et visée par la demande (
CAA Marseille, 7 févr. 2012, n° 09MA03289, SNC Besson
, AJDA 2013, n° 6, p. 351, note J.-P. Brouant et N. Foulquier), d’une part, et, d’autre part, l’affectation du domaine public eu égard éventuellement à l’obligation d’en assurer la conservation (CE, sect., 3 mai 1963, Commune de Saint-Brévin-les-Pins, Rec. 259, AJDA 1963 p. 343, chron. M. Gentot et J. Fourré, CJEG 1964 p. 186, note J. Virole, RDP 1963 p. 1174, note M. Waline). Mais la permission de stationnement ou de voirie peut être illégale soit parce qu’elle porte atteinte aux droits des tiers (servitudes, par exemple), soit parce qu’elle porte une atteinte excessive aux aisances de voirie appartenant aux riverains des voies publiques, et, par suite, elle peut être annulée par le juge administratif saisi d’un recours pour excès de pouvoir intenté par un tiers intéressé.
Exemples :
- l’installation temporaire d’une fête foraine dans les jardins des Tuileries a été jugée compatible avec l’affectation (« la vocation et la destination, conforme aux usages ») de ces jardins (
CE, sect., 23 juin 1995, n° 161311,
Association défenses Tuileries
, Rec. 268, CJEG 1995 p. 376, concl. J. Arrighi de Casanova) ;
- l’exploitation d’une librairie commerciale sur le campus n’est pas contraire à la mission de service public assurée par l’Université, ni à la spécialité de cet établissement (
CE, 10 mai 1996, n° 142064 et n° 142066,
SARL La Roustane et Université de Provence
, Rec. 168, AJDA 1996 p. 553, concl. R. Schwartz, Dr. adm. 1996 n° 426, obs. R. S.).
Refus d’accorder ou de renouveler une autorisation (unilatérale) d’occupation privative du domaine public
Les motifs que l’autorité administrative compétente peut opposer au refus d’octroyer ou de renouveler une telle autorisation sont largement entendus : cela peut être des motifs de police ou tirés de l’intérêt général, y compris de nature patrimoniale.
Ainsi, un refus de renouveler une telle autorisation est jugée légale par le juge administratif du fait du refus du bénéficiaire d’accepter une augmentation importante de sa redevance (CE, 23 juin 1986, n° 59878, M. René Thomas, Rec. 167, AJDA 1986 p. 550, chron. M. Azibert et M. de Boisdeffre, RFDA 1987 p. 194, concl. B. Stirn).
De même, « s’il appartient à l’autorité administrative affectataire de dépendances du domaine public de gérer celles-ci tant dans l’intérêt du domaine et de son affectation que dans l’intérêt général, il lui incombe en outre, lorsque, conformément à l’affectation de ces dépendances, celles-ci sont le siège d’activités de production, de distribution ou de services, de prendre en considération le principe de liberté du commerce et de l’industrie ainsi que les règles de concurrence dans le cadre desquelles s’exercent ces activités » (
CAA Paris, 4 déc. 2003, n° 00PA2740, SETIL
, AJDA 2005, n° 4, p. 200, note S. Nicinski, Contrats et march. publ. 2004 n° 54, note G. Eckert). En effet, si l’Administration considère que le projet d’occupation privative du domaine public n’est pas conforme à l’affectation de ce dernier (et est donc « anormal »), voire difficilement compatible avec cette dernière, elle est presque en compétence liée pour refuser ou ne pas renouveler la permission de stationnement ou de voirie.
Quoi qu’il en soit, le refus d’accorder ou de renouveler une telle permission doit être impérativement motivé, en application du 7° l’article L. 211-2 du
Code des relations entre le public et l’Administration
(CREPA).
Toutefois, le juge administratif tend, aujourd’hui, par un contrôle de légalité de plus en plus sourcilleux à réduire la compétence administrative de refuser le renouvellement. Ainsi, « s’il résulte des principes généraux de la domanialité publique que les titulaires d’autorisations ou de conventions d’occupation temporaire du domaine public n’ont pas de droit acquis au renouvellement de leur titre, il appartient au gestionnaire du domaine d’examiner chaque demande de renouvellement en appréciant les garanties qu’elle présente pour la meilleure utilisation possible du domaine public. Il peut décider, sous le contrôle du juge, de rejeter une telle demande pour un motif d’intérêt général. Pour déterminer si un tel motif existe, il y a lieu de tenir compte, le cas échéant, parmi l’ensemble des éléments d’appréciation, des contraintes particulières qui pèsent sur l’activité de l’occupant, notamment de celles qui peuvent résulter du principe de continuité du service public » (
CE, 25 janv. 2017, n° 395314, Commune de Port-Vendres
, cons. n° 4, JCP A2017, n° 7, p. 22, note M. Cornille, Dr. adm. 2017, n° 5, p. 41, note F. Brenet, Contrats et march. publ. 2017, n° 4, p. 43, n° 103, obs. H. Hoepffner, Contrats et march. publ. 2017, n° 8-9, p. 37, n° 40, chron. J.-P. Pietri, AJCT 2017, n° 7-8, p. 403, obs. C. Logéat, AJDA 2017, n° 21, p. 1232, note N. Foulquier, JCP A 2018, n° 6, p. 32, n° 45, chron. J. Martin et G. Pellissier).