Partie 9 - En complément
Chapitre 4 - Parents, enfants, professionnels : une coéducation qui s’organise

9.4/8 - Coéducation : Relations des migrants avec l’institution : du jeu des identités à la rencontre culturelle

Commençons par poser les faits. Le tiers de la population française d’aujourd’hui a une ascendance étrangère à la première, à la deuxième ou à la troisième génération. Dix-huit millions de Français sont fils ou petits-fils d’immigrés, quand ils ne sont pas migrants eux-mêmes. Voici une intangible réalité, que l’on va découvrant ici ou là, dans les partis politiques, les livres des historiens et des sociologues. Mais la plupart des migrants passent ces faits sous silence, d’abord dans un souci d’intégration nationale, et puis parce qu’ils ont gardé un souvenir assez douloureux de cette époque où on les nommait « les ritals », « les polaks » ou « les rosbifs » dans les années 1930, puis plus près de nous « les pieds noirs », « les beurs », « les harkis », ou « les crève-la-faim » et « les clandestins ». On pensait ces populations « inassimilables » et on les ressentait comme une « menace ». Et pourtant... Ils ont occupé des postes que les Français avaient délaissés, et ont relevé l’économie pendant « les Trente Glorieuses ». Le problème de l’intégration, si souvent évoqué, cache régulièrement l’incapacité de notre société à proposer des réponses concrètes sur la question du dialogue social avec ces populations, de l’éducation, de l’intégration et de la citoyenneté. Les immigrés et leurs enfants ont en commun d’être souvent entre deux cultures. Ces identités multiples cherchent une place dans la société française. D’autre part, nous avons du mal à penser l’autre, « celui que je ne suis pas », chacun étant confronté à sa propre limite d’être. Et il est bien difficile, comme le dit l’humoriste Jamel Debouz, de « devenir un icicien » (un Français d’ici) quand on est venu d’ailleurs, et de faire reconnaître l’apport des différentes immigrations comme constitutif de notre histoire contemporaine. Mais voyons d’abord quelles sont les raisons psychologiques du mal-être de ces populations afin d’établir avec elles un dialogue plus harmonieux et plus pacifié.

I - LE TRAUMATISME MIGRATOIRE

Pour un enfant, grandir en exil est un défi

C’est un traumatisme car brutalement son univers bascule et, en quittant son pays, il perd ses repères géographiques, sa langue maternelle, sa culture et ses traditions. Mais ce trauma peut aussi lui être transmis par ses parents, car c’est peut-être eux qui ont porté la douleur du voyage. Le devenir de ces enfants est un sujet grave, car l’avenir de nos sociétés modernes en dépend. Le mot « traumatisme » vient du mot grec trauma, qui veut dire blessure. Pour ces enfants,...

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