Nous devons faire face aujourd’hui à une transformation sans précédent des besoins de prise en charge de nos anciens, ce qui nous encourage à réfléchir dès à présent sur le champ de l’accompagnement des besoins des personnes âgées en perte d’autonomie, confronté dans les années à venir à trois défis dans les champs médical, social et financier.
Un défi médical au regard de l’évolution démographique
La France connaît un processus de transition démographique caractérisé par une augmentation de la longévité et une croissance forte et continue des classes d’âge les plus élevées ayant pour conséquence le vieillissement de la population et l’explosion des maladies chroniques, avec des personnes âgées qui entrent plus tardivement, et plus dépendantes, en institution.
Selon l’Insee, en 2018, les personnes de 65 ans ou plus représentaient 19,6 % de la population. D’après les prévisions de l’Institut, elles représenteront en 2050 plus de 25 % de la population française. Par ailleurs, les personnes de 85 ans et plus seront au nombre de 4,8 millions en 2050, soit 3,2 fois plus nombreuses qu’en 2017.
Conséquence directe, les personnes en perte d’autonomie seront 2,2 millions en 2050 contre 1,3 million en 2017.
A noter
On sait aujourd’hui que 3,9 millions de personnes apportent une aide régulière à un proche de 60 ans et plus vivant à domicile en raison de son âge ou d’un problème de santé.
Un défi social face à l’aspiration majoritaire de vieillir à domicile
Selon une étude de 2019, plus de 85 % des Français souhaitent vieillir à domicile. Cette aspiration massive à continuer à vivre à domicile et dans son environnement habituel est déjà une réalité pour 90 % des personnes âgées de 75 ans et plus.
L’entrée en établissement médicalisé se fait de plus en plus tardivement (86 ans et 8 mois en moyenne, nous indiquait la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques [Drees] en 2017) et ne dure ainsi qu’un temps court (2 ans et demi en moyenne).
Cette entrée tardive en Ehpad est associée de plus en plus à la dépendance lourde (86 % des personnes âgées de plus de 75 ans résidant en institution sont dépendantes, contre 13 % des personnes vivant à domicile), voire à la fin de vie. Deux types de pathologies vont de pair avec la vie en Ehpad : les maladies neurodégénératives et les troubles psychiques.
Le modèle de l’Ehpad de demain devra donc nécessairement s’inscrire en complémentarité avec le domicile. Plusieurs expérimentations sont en cours sur le plan national (« Ehpad à la maison » avec le projet M@do dans le Limousin, « Ehpad à domicile » sur le territoire de Belfort, « Ehpad hors les murs » dans l’Oise…).
A noter
Un sondage réalisé fin 2019 souligne la mauvaise image des Ehpad. Ce sondage indique que 13 % seulement des Français seraient prêts à passer leurs vieux jours dans un Ehpad en cas de perte d’autonomie… Nul doute que la crise de la Covid-19, qui a entraîné de nombreux décès en Ehpad, n’a fait qu’amplifier ce phénomène…
Un défi financier : faire évoluer le positionnement de l’Ehpad dans un contexte budgétaire contraint
Le contexte budgétaire contraint, dans un cadre patrimonial vieillissant, impose de réfléchir à un modèle d’Ehpad de demain efficient, permettant de garantir une accessibilité financière. L’intégration des nouvelles technologies peut contribuer à cette efficience.
De plus, le modèle d’Ehpad de demain doit être innovant, souple et modulable afin de répondre de façon réactive à l’évolution des besoins. L’Ehpad de demain doit par conséquent cumuler plusieurs exigences :
- rester un lieu de vie malgré une médicalisation croissante ;
- demeurer un cadre de travail attractif (vigilance à porter aux ressources humaines dans un contexte de fuite du secteur gérontologique par les professionnels), ouvert sur son environnement.
A noter
En mars 2019, après une vaste concertation autour du grand âge et de l’autonomie, le rapport Libault met en avant la prise en charge des personnes âgées à domicile et formule 175 propositions, dont 10 propositions clés pour « passer de la gestion de la dépendance au soutien à l’autonomie ». Parmi celles-ci, « un soutien financier de 550 millions d’euros pour les services d’aide et d’accompagnement à domicile, afin d’améliorer le service rendu à la personne âgée et de revaloriser les salaires des professionnels ».