Recourir à une clause butoir
Une clause butoir vise à limiter les évolutions des prix, au-delà du butoir fixé dans le cahier des clauses administratives particulières (CCAP), et ce pendant la durée du marché, tout en permettant la continuation de l’exécution des prestations. Elle peut reposer sur un pourcentage maximal d’évolution autorisé par rapport au prix initial (5 %, par exemple) ou être établie par rapport à une formule de calcul spécifique (une formule paramétrique, par exemple).
Une clause butoir ne peut s’appliquer que dans les marchés pour lesquels la clause de révision des prix est basée sur l’évolution du tarif public du titulaire. En effet, il n’est pas recommandé d’intégrer une telle clause dans un marché avec une révision des prix basée sur des indices représentatifs qui sont des indices extérieurs aux parties (par exemple, indices Insee). Dans un tel cas, la clause butoir ne permettrait pas de suivre l’évolution des coûts, notamment s’agissant des matières premières.
A noter
La clause butoir présente l’inconvénient de faire supporter un risque financier non négligeable au titulaire. Celui-ci devra, en effet, continuer à exécuter le marché même si la révision des prix contractuelle n’est pas à la hauteur de l’augmentation de ses coûts réels de production. Aussi, une telle clause peut inciter les opérateurs économiques, pour se couvrir, à intégrer les impacts financiers d’une telle clause dans leur proposition financière dès la remise des offres.
La crise sanitaire aura montré les limites atteintes par ce type de clause. Cette crise aura rendu les fournisseurs encore plus sensibles aux clauses de marché relatives à l’évolution des prix mais aussi des produits/services. Il est conseillé d’éviter si possible la mise en œuvre de clauses butoirs.
Mettre en place une clause de sauvegarde
À la différence de la clause butoir qui permet de poursuivre l’exécution des prestations du marché, la clause de sauvegarde permet à l’acheteur public de résilier le marché sans indemnité dès lors que les nouveaux prix dépassent le taux d’augmentation fixé dans le marché (par rapport aux anciens prix du marché).
Il s’agit donc d’un mécanisme de protection par rapport à une évolution trop importante des prix, qui doit être prévue dans le CCAP. Plus précisément, les modalités pratiques de la mise en œuvre d’une telle clause doivent être clairement précisées dans le CCAP : taux, durée du préavis, mise en œuvre automatique ou à la discrétion de l’acheteur public, information du titulaire ou encore l’assiette des prix pour apprécier l’augmentation. L’enjeu est de pouvoir résilier le marché sans indemnité tout en évitant tout contentieux dû souvent à des imprécisions dans la clause ou dans les conditions de sa mise en œuvre.
Il convient de noter que la clause de sauvegarde peut prévoir une période, avant la résiliation effective du marché, pendant laquelle les prix antérieurs (à l’évolution des prix) continuent de s’appliquer pour les commandes à venir (dans une certaine limite de temps et de volumes, c’est-à-dire, par exemple, sans commandes « exceptionnelles » 6 mois après l’activation de la clause). Ce mécanisme permet de laisser le temps à l’acheteur public de relancer une procédure de marché public et ainsi éviter une rupture d’approvisionnement et/ou des prestations. Toutefois, face à une telle clause, les opérateurs économiques auront tendance à intégrer ce risque dans les propositions financières déposées au stade de la remise des offres.
Remarque
Lorsque la révision des prix s’effectue sur la base de l’évolution du tarif public du titulaire (c’est-à-dire que l’évolution des prix est laissée à la discrétion du titulaire), il semble indispensable de prévoir une telle clause de sauvegarde afin d’avoir les « armes » contractuelles pour se prémunir d’une augmentation trop importante des prix en cours de marché.
A contrario, lorsque la révision des prix s’effectue sur la base d’un indice représentatif, il semble inopportun de prévoir une telle clause sauf à la justifier pour des raisons budgétaires. Toutefois, si les prix du marché (au sens économique) augmentent, les prix issus de la nouvelle mise en concurrence (à la suite de la résiliation du marché) seront certainement au même niveau que les prix du marché résilié (par exmple, cas des prix des matières premières, de l’énergie…).
À noter qu’il est tout à fait possible pour l’acheteur de continuer l’exécution du marché si l’augmentation des prix dépasse le seuil fixé contractuellement.
Fixer un seuil de déclenchement de la formule de révision
La fixation d’un seuil de déclenchement de la formule de révision des prix est un outil très pragmatique consistant à ne pas appliquer une révision des prix si le pourcentage d’évolution est inférieur au taux fixé dans le CCAP.
En pratique, si le marché prévoit que la clause de révision des prix ne se déclenche pas lorsque l’évolution des prix est inférieure ou égale à 1%, l’acheteur public ne doit pas appliquer la clause de révision des prix. Autrement dit, cette clause permet de faire gagner du temps aux acheteurs publics qui ne seront pas obligés de réviser des prix pour des évolutions des prix ayant un faible impact économique sur le marché.
L’idée est de laisser, à la charge du titulaire du marché, les augmentations de coût de revient de la prestation ou des produits qui n’ont qu’une faible ampleur financière (inférieures ou égales à 1% dans l’exemple) pour ne prendre en compte que celles qui sont susceptibles de le mettre en difficulté (c’est-à-dire supérieures à 1% dans l’exemple).
Il convient de noter que ce type de clause peut inciter les opérateurs économiques à couvrir ce risque dans les propositions financières déposées au stade de la remise des offres.
En résumé, il est souvent conseillé aux acheteurs de « suivre » la tendance du marché et de davantage identifier et mettre en œuvre des processus d’actualisation des prix simples et rapides à mettre en œuvre.
Remarque
Si l’acheteur public souhaite instaurer une relation équilibrée avec les titulaires de marché, il est préconisé de prévoir dans le CCAP que le seuil de déclenchement de la formule de révision s’applique tant aux évolutions de prix à la hausse (ce qui avantage l’acheteur public) qu’aux baisses de prix (ce qui avantage le titulaire). Dans les deux cas, l’acheteur public n’aura pas à réaliser une révision des prix du marché et gagnera donc du temps.
Intégrer un terme fixe dans la formule de révision paramétrique
Lorsque la formule de révision des prix est une formule paramétrique (c’est-à-dire qu'elle se compose de plusieurs indices ou index qui correspondent à l’évolution du coût de la prestation), l’acheteur public peut intégrer un terme fixe dans la formule paramétrique afin d’amortir une partie de l’évolution des prix du marché.
En pratique, le calcul de la révision des prix ne s’effectue pas sur une base 100 mais, par exemple, sur une base 85.
Exemple : P1 = P0 x (0,15 + 0,85 (0,20 (IndiceAT1/indiceAT0) + 0,80 (IndiceBT1/indiceBT0))
Avec :
P1 : prix révisé
P0 : prix initial au mois de remise des prix
0,15 : terme fixe
0,85 : terme variable
0,20 : coefficient représentant le poids de l’indice A dans le prix
0,80 : coefficient représentant le poids de l’indice B dans le prix
Indice T1 : valeur de référence de l’indice du mois de révision des prix
Indice T0 : valeur de référence de l’indice du mois de remise des prix
L’intégration d’un terme fixe au sein d’un marché public peut ainsi être justifiée par une typologie de produits/services comprenant une part fixe importante peu ou pas impactée par les évolutions du marché ou d’éventuels gains de productivité.
Remarque
Comme dans les autres cas, au regard d’une telle clause, les opérateurs économiques peuvent surévaluer leur prix dès la remise des offres afin d’atténuer l’impact d’un terme fixe dans la formule de révision des prix.