La
loi n° 83-634 du 13 juillet 1983
impose au fonctionnaire de se conformer aux instructions de son supérieur hiérarchique. La subordination hiérarchique impose également de se soumettre au contrôle hiérarchique de l’autorité supérieure.
En dehors de cette obligation, aucun texte ne vient préciser les règles et les possibilités de contrôle dans la fonction publique. Cela étant, un juge, en l’absence de références réglementaires, s’appuiera sur les règles et jurisprudences s’appliquant notamment dans le secteur privé. C’est pour cela qu’il est très fortement conseillé de respecter un certain nombre de règles, édictées par la première partie du
Code du travail
.
Si la surveillance des agents est possible, elle est même considérée comme obligatoire dans un certain nombre de situations, en particulier sur les postes à risque. En effet, l’autorité territoriale est responsable de la santé et de la sécurité de ses agents. Pour cela, elle dispose de trois éléments :
- des moyens (techniques, organisationnels et humains) afin de permettre de travailler dans de bonnes conditions de sécurité ;
- des compétences pour assurer cette sécurité ;
- de l’autorité sur les agents pour s’assurer du respect des règles définies afin d’assurer leur protection et leur santé.
Ainsi, l’employeur se doit non seulement de définir des règles, de donner des consignes, mais il doit également s’assurer de leur respect faute de quoi, en cas d’accident, cela pourra lui être reproché – ce qui le rendra coresponsable de cet accident.
Le principe d’intérêt légitime
La mise en place de procédés de surveillance des agents n’est possible que si elle est motivée par un intérêt légitime, justifiée par la tâche à accomplir, afin de permettre un fonctionnement normal de la collectivité. En effet, « nul ne peut apporter aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives de restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir ni proportionnées au but recherché » (
art. L. 1121-1 du Code du travail
).
Ainsi, il faut bien comprendre que cette surveillance ne peut concerner que l’activité de l’agent et non l’agent lui-même, et qu’elle doit être légitime au regard de cette activité.
La collectivité peut être amenée à vérifier et contrôler l’activité de l’agent, mais également les échanges qu’il peut avoir avec l’extérieur ou encore sur son temps de travail effectif.
Par exemple, l’employeur peut :
- contrôler les entrées et sorties des agents par l’intermédiaire d’un badge électronique (surveillance du temps de travail réglementaire), d’un passage devant un gardien ou l’accueil (surveillance des intrusions) ;
- fouiller des agents pour des raisons de sécurité ou de vol (par exemple dans un musée). L’agent doit être informé des possibilités de refuser la fouille, de préférence en présence d’un tiers. Il ne peut être fouillé sans que son accord préalable ait été recueilli ;
- mettre en place un système de vidéosurveillance pour les mêmes raisons que le point précédent ou de vidéoprotection (limiter les agressions). Les agents qui y travaillent doivent être obligatoirement informés des lieux surveillés ;
- enregistrer les numéros de téléphone émis vers l’extérieur, ainsi que la durée et le moment de leur émission ;
- mettre en place un système de contrôle de l’alcoolémie pour certains agents (par exemple, les conducteurs de bus, les agents à un poste dangereux…).
Ce dernier cas est un bon exemple de la notion de légitimité du contrôle. Effectuer un test d’alcoolémie auprès d’agents qui ne sont pas amenés à effectuer des travaux dangereux ou conduire un véhicule ne sera pas considéré comme légitime, car le fait ou non de dépasser un taux réglementaire de 0,5 g d’alcool dans le sang ne présage en rien du comportement de l’agent.
La limite au contrôle réside dans l’atteinte à la vie privée. Même pendant son temps de travail et sur son lieu de travail, l’agent a le droit au respect de sa vie privée. Ceci s’applique notamment aux correspondances qui lui sont adressées. Ainsi, l’employeur ne peut pas prendre connaissance des messages ou fichiers personnels de l’agent, ou encore procéder à l’ouverture de son armoire personnelle en dehors de sa présence effective, si les circonstances et les modalités n’ont pas été prévues dans le règlement intérieur de l’établissement.
Le principe de proportionnalité
La surveillance des agents n’est possible qu’à condition que le contrôle soit proportionnel au but recherché. Par exemple, la mise en place d’un système de géolocalisation de véhicules de services dans le but affiché et déclaré de veiller à une meilleure utilisation du carburant et de gestion de la flotte de véhicules alors qu’un système de réservation informatisé est déjà en place sera considérée comme disproportionnée face au but recherché.
À ce titre, un salarié a toute légitimité pour refuser de se soumettre à un système de géolocalisation, sans encourir de sanction disciplinaire, dès lors qu’il a une relative indépendance dans son emploi du temps (cf.
Cass. soc., 17 déc. 2014, n° 13-23645, Société Design fenêtres
, où le salarié était technico-commercial).
Autre exemple, la Cour de cassation a considéré comme proportionnée l’ouverture à titre temporaire des sacs devant les agents de sécurité, lorsqu’une entreprise a été elle-même concernée par une alerte à la bombe durant une période d’attentat (
Cass. soc., 3 avril 2001, n° 98-45818, Société M6
).