Le principe de loyauté a des limites

Publié le 30 avril 2014 à 0h00 - par

Le délit de favoritisme fait obstacle au principe de loyauté.

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En principe, les contrats doivent être appliqués

Les contrats sont la loi des parties, et ils doivent donc trouver application. À compter de l’arrêt Commune de Béziers de 2009, le principe est fortement renforcé puisque le Conseil d’État décide alors que seules de graves irrégularités peuvent faire obstacle à ce principe, qui conduit à la pérennité du contrat dans la généralité des situations.

Ainsi, la violation des règles de publicité et de mise en concurrence ne conduit plus à écarter le contrat (CE, 12 janvier 2011, Manoukian, n° 338551), sauf cas exceptionnel. De même, la mise en œuvre d’une clause de tacite reconduction ne permet pas aux parties d’être déliées de l’application du contrat (CE, 23 mai 2011, département de la Guyane, n° 314715), alors que la solution inverse prévalait (CE, 29 novembre 2000, Commune de Païta, n° 205143).

Toutefois, si le contrat contient une clause illicite, le contrat ne peut plus lier les parties. Il en est ainsi de la convention confiant à l’aménageur la réalisation de cette opération lorsque les constructions sont prévues sur une zone inconstructible (CE, 10 juillet 2013, n° 362304 362318, Commune de Vias et Société d’économie mixte de la ville de Béziers et du littoral (SEBLI). Il en est de même de la cession irrégulière d’un droit réel sur une dépendance du domaine public, ou encore d’une clause par laquelle la commune renonçait à l’exercice de son pouvoir de résiliation unilatérale pour un motif d’intérêt général (CE, 1er octobre 2013, n° 349099, Société Espace Habitat Construction).

Le délit de favoritisme empêche le contrat de lier les parties

C’est ainsi qu’en a jugé la cour administrative d’appel de Marseille (CAA Marseille, 23 décembre 2013, Association Boitaclous, n° 11MA02463). Dans cette affaire, le tribunal correctionnel, confirmé par la cour d’appel, avait déclaré le maire de la commune coupable du délit de favoritisme dans le cadre du marché en cause, relatif à l’organisation de spectacles, infraction prévue par l’article 432-14 du code pénal et réprimé par les articles 432-14 et 432-17. La cour rappelle que l’autorité de la chose jugée au pénal s’impose au juge administratif en ce qui concerne les constatations de fait, que la cour d’appel a retenues et qui sont le support nécessaire de son arrêt.

Selon ces constatations de fait, retenues par la cour d’appel, le maire et les représentants de l’association entretenaient des liens privilégiés. D’ailleurs, le cahier des charges du contrat avait été élaboré sur la base des seuls documents de l’association requérante. Le juge pointait ainsi la volonté du maire de favoriser l’association lors de l‘attribution du marché. La cour administrative d’appel en a conclu que, « eu égard d’une part à la gravité du vice dont était entaché le marché en cause, et d’autre part aux circonstances particulières dans lesquelles il a été commis, le litige ne peut être réglé sur le fondement de ce contrat ».

Délit de favoritisme et principe de loyauté de font pas bon ménage.

Laurent Marcovici