Principes généraux
Textes applicables – Les décrets-cadres (FPE :
décret n° 86-83 du 17 janvier 1986
; FPT :
décret n° 88-145 du 15 février 1988
; FPH :
décret n° 91-155 du 6 février 1991
) prévoient à présent des règles concernant le dossier administratif des agents (art. 1-1 des différents décrets). Ces textes reprennent les règles applicables aux fonctionnaires.
Contenu – Le dossier des agents doit comporter toutes les pièces intéressant leur situation administrative, enregistrées, numérotées et classées sans discontinuité. Ce dossier, de même que tout document administratif, ne peut faire état des opinions ou des activités politiques, syndicales, religieuses ou philosophiques de l’intéressé.
Ainsi, la mention sur une feuille de notation (à l’époque des faits) d’une appréciation du chef d’établissement selon laquelle les « convictions personnelles » des intéressés ont des conséquences fâcheuses sur le fonctionnement du service est illégale (
CE, 16 juin 1982, n° 23276 23277, Chevreul
).
S’agissant de l’exercice d’un mandat syndical, la jurisprudence estime que si, en raison même de l’octroi d’une autorisation spéciale d’absence ou de dispenses d’activité de service, il peut être légalement fait mention, au dossier de l’intéressé, de l’existence du mandat syndical ayant motivé l’intervention de telles mesures, le respect dû tant à la liberté d’opinion des fonctionnaires qu’à la liberté syndicale implique qu’une mention de ce type ne puisse s’accompagner d’une quelconque appréciation portée par l’autorité administrative sur la manière dont l’intéressé exerce ses activités syndicales (
CE, 27 sept. 2000, n° 189318, Rocca
).
Sont au nombre de ces pièces intéressant la situation administrative de l’intéressé, et peuvent légalement figurer au dossier d’un professeur, une lettre adressée par un parent d’élève au directeur du collège lui relatant des incidents survenus lors de l’enseignement dispensé par ce professeur, ainsi que la lettre du proviseur décrivant la manière de servir de cet enseignant et adressée à ce dernier (
CE, 29 juil. 1994, n° 89011, Mme X
). Le dossier ne doit pas faire état de faits dont le juge pénal avait constaté l’inexistence ou estimé qu’ils ne pouvaient pas être imputés à l’intéressé (
CE, 23 déc. 2009, n° 306497, Narces
).
Documents hors dossier administratif – Certains documents figurent dans le dossier à l’instar de la déclaration d’intérêts ; en revanche, la déclaration de situation patrimoniale n’y figure pas (cf. Conflits d’intérêts dans l’exercice des fonctions).
Contestation du contenu
Recevabilité des recours – Un agent n’est pas recevable à demander l’annulation pour excès de pouvoir des décisions par lesquelles l’autorité administrative accepte ou refuse de faire enregistrer, classer et numéroter et de compléter les pièces de son dossier administratif, qui ne lui font pas par elles-mêmes grief (
CE, 25 juin 2003, n° 251833, Mme X
). En revanche, il est recevable à déférer au juge administratif la décision par laquelle l’administration refuserait de procéder au retrait de son dossier des pièces qui, selon lui, ne peuvent légalement y figurer (CE, 25 juin 2003, n° 251833, Mme X ; CE, 23 déc. 2009, n° 306497, Narces).
Jurisprudence sur les refus de retraits de documents – Un agent ne peut exiger de l’administration qu’elle retire de son dossier des documents dont il juge le contenu injurieux ou diffamatoire, à supposer même que puissent présenter un tel caractère des documents figurant au dossier, qui est strictement interne à l’administration. En l’espèce, il s’agissait de documents qui ont fondé des poursuites disciplinaires (TA Paris, 23 nov. 2015, n° 142492).
Responsabilité de l’administration – La responsabilité de l’administration pour faute simple peut être engagée du fait du non-respect par l’État de ses obligations en matière de gestion statutaire et de tenue des dossiers (
CE, 25 nov. 2015, n° 383220, Mme B
à propos de la tenue des entretiens d’évaluation et des fiches d’évaluations des personnels de direction de la fonction publique hospitalière).
Effacement du dossier
Le droit disciplinaire – Les décrets-cadres ne prévoient pas l’effacement de certaines sanctions au bout d’un certain délai comme c’est le cas pour les fonctionnaires (FPE :
art. 43-2 du décret n° 86-83 du 17 janvier 1986
; FPT :
art. 36-1 du décret n° 88-145 du 15 février 1988
; FPH :
art. 39 du décret n° 91-155 du 6 février 1991
). Lorsque des sanctions ont été amnistiées, elles doivent être effacées du dossier de l’agent (cf. Procédure disciplinaire : décision de l’employeur).
Dématérialisation des dossiers
Une faculté – Le
décret n° 2011-675 du 15 juin 2011
relatif au dossier individuel des agents publics et à sa gestion sur support électronique fixe le cadre juridique permettant la dématérialisation du dossier des agents. Concernant les trois fonctions publiques, les règles posées par ce texte visent à garantir l’authenticité, la confidentialité et l’accessibilité du dossier individuel : celui-ci peut donc être créé et géré en tout ou partie sur support électronique. Il s’agit d’une simple faculté.
Cadre de création – La mise en place d’un support électronique est conditionnée par la publication d’un arrêté ou d’une décision de l’autorité administrative ou territoriale après avis du comité technique compétent. Ce texte doit définir les modalités de création et de passage à la gestion du support électronique (art. 9 du décret du 15 juin 2011). Le décret du 15 juin 2011 précise aussi les règles de gestion du dossier en cas de mobilité de l’agent (art. 8).
L’
arrêté du 21 décembre 2012
relatif à la composition du dossier individuel des agents publics géré sur support électronique précise le contenu du dossier administratif.
Nomenclature – Une nomenclature est attachée aux différents actes. Elle indique la durée maximale de conservation en gestion courante pour chaque type de document et le sort à réserver à chaque type de document au terme de la durée de conservation en gestion courante (archivage intermédiaire ou destruction).
La nomenclature va de 1 à 21. Elle concerne les actes suivants :
1/ état civil ;
2/ situation de famille ;
3/ situation militaire ;
4/ recrutement et titularisation ;
5/ changement de position statutaire ou mobilité – réintégration ;
6/ commission de déontologie ;
7/ cumul d’emploi public ;
8/ cumul pour création ou reprise d’entreprise ;
9/ cumul d’activité accessoire ;
10/ changement de modalités de temps de travail ;
11/ gestion des congés et absences ;
12/ évaluation – notation/avancement d’échelon ;
13/ avancement/promotion ;
14/ mutation – affectation ;
15/ gestion des compétences ;
16/ discipline ;
17/ cessation de fonctions ;
18/ services publics – activités privées ;
19/ distinctions honorifiques ;
20/ accidents de service ;
21/ événements divers.
Conservation – En ce qui concerne la durée de conservation des traces de consultation, celle-ci est fixée à trois ans (art. 2 de l'arrêté du 21 décembre 2012).
Accès au dossier dématérialisé (information…) – Au préalable, doivent être communiquées les coordonnées de l’autorité administrative ou territoriale auprès de laquelle ils peuvent exercer leurs droits d’accès et de rectification. En cas de coexistence d’un support électronique avec un support papier, la demande d’accès et de rectification est valable pour l’ensemble du dossier, quel qu’en soit le support (
art. 11 du décret n° 2011-675 du 15 juin 2011
).
Consultation – La consultation du dossier sur support électronique a lieu par affichage sur écran des documents sous une forme accessible. Un sommaire établi par référence à la nomenclature indiquée aux articles 2 et 9 du décret du 15 juin 2011 doit faciliter la consultation des documents (art. 12 du décret n° 2011-675 du 15 juin 2011).
Copie – L’agent obtient, à sa demande, une copie de tout ou partie des éléments de son dossier géré sur support électronique :
- par transmission des documents correspondants à son adresse électronique professionnelle nominative ou par remise d’un support numérique ;
- ou par remise d’une copie sur support papier conforme à l’original (art. 14 du décret n° 2011-675 du 15 juin 2011).
Demande de rectification ou de retrait – Celle-ci se fait auprès de l’autorité administrative indiquée. Sur sa demande, les observations de l’agent sont consignées en annexe au document demandé (art. 13 du décret n° 2011-675 du 15 juin 2011).
Obligation d’information du droit à communication
Textes – L’obligation d’information du droit à communication du dossier est prévue par plusieurs textes. Le plus ancien est l’
article 65 de la loi du 22 avril 1905
. Il peut s’appliquer en l’absence de texte spécifique dès lors que la mesure en question est assimilée à une mesure prise en considération de la personne au sens de cet article. Tel est le cas en cas de non-renouvellement d’un contrat pour des raisons disciplinaires (cf. Cessation des fonctions : terme du contrat). Les décrets-cadres organisent le droit à la consultation du dossier en cas de licenciement (cf. Règles procédurales précédant la décision de licenciement), en matière disciplinaire (cf. Procédure disciplinaire : décision de l’employeur).
Vices pouvant entacher l’accès au dossier – Ils sont de deux ordres :
- le premier est de ne pas informer l’agent de son droit à communication du dossier ;
- le second est de ne pas lui permettre d’accéder à son dossier.
Les conséquences de ces vices s’apprécient au regard de la jurisprudence administrative qui annulera la décision si ce vice est susceptible d’exercer une influence sur le sens de la décision prise ou s’il a privé les intéressés d’une garantie (
CE, ass., 23 déc. 2011, n° 335033, Danthony et a.
, Lebon p. 649 ; pour des exemples voir les fiches 8820 et 8827 citées ci-dessus).
Copie du dossier
Droit de prendre copie – Le droit à la communication du dossier comporte pour l’agent intéressé celui d’en prendre copie, à moins que sa demande ne présente un caractère abusif.
Absence d’obligation d’informer du droit à copie – Toutefois, les dispositions prévoyant l’obligation pour l’administration, dans le cadre d’une procédure disciplinaire, d’informer l’intéressé de son droit à communication du dossier n’imposent pas à l’administration d’informer l’agent de son droit à prendre copie de son dossier (
CE, 2 avril 2015, n° 370242, Commune de Villecerf
).