Portraits d'acteurs
Yannick Lechevallier
Consultant pour l'internationalisation des collectivités locales
« Il faut installer des politiques de mobilité dans les stratégies RH des collectivités comme dans les universités. »
Quelles sont vos fonctions actuelles et les grandes étapes de votre parcours professionnel ?
Yannick Lechevallier : Je suis consultant pour l'internationalisation des collectivités locales depuis 22 ans. Après un parcours en école d'ingénieur puis en ONG, j'ai réalisé un master pour pouvoir m'engager dans la coopération internationale des collectivités territoriales qui débutait (en 1995). Depuis, je continue à approfondir les méthodes d'appui et de conseil mais aussi d'explorer les nouveaux enjeux des collectivités ici et ailleurs, en me formant à l'Open Data, les Civic-Tech ou la démocratie participative.
Depuis 22 ans, je multiplie les missions (une quinzaine par an) auprès de collectivités françaises (hexagone et Outre-mer) mais aussi de structures nationales (MEAE, Agence Française pour le Développement, Expertise France ou CFI) ou pour des acteurs étrangers comme le PNUD ou la Faîtière des Communes du Togo cette année. Et j'espère prochainement les villes ukrainiennes...
Si vous deviez décrire votre métier actuel en 3 mots, quels seraient-ils ?
Yannick Lechevallier : Diversité : par la multiplicité des commanditaires, mais aussi par un engagement à permettre, au sein des collectivités locales de prendre en compte la diversité des relations au monde de leurs territoires et populations dans les différentes politiques publiques.
Mobilité : bien évidement en travaillant pour 10 collectivités par an, le TGV est ma seconde maison, auquel on ajoutera plusieurs missions internationales. Mais aussi dans une volonté qui se renforce actuellement pour faire de la mobilité internationale des agents publics un outil d'innovation, de motivation et d'attractivité pour les collectivités (comme cela l'est pour les universités ou les grandes entreprises).
Conviction : parler d'international dans l'espace local nécessite une forte conviction car cela ne va pas de soi. Mais cela permet de rencontrer d'autres personnes convaincues, engagées et cela offre de belles rencontres et échanges.
Quelles sont les qualités essentielles inhérentes à vos fonctions ?
Yannick Lechevallier : Curiosité, conviction et folie.
Folie, c'est d'abord ce qu'ont pensé mes amis quand je me suis lancé dans ce parcours et ce chantier. Accompagner des collectivités locales dans l'ouverture de politiques internationales est un peu une gageure. Il faut sans cesse argumenter, construire une réflexion adaptée à chaque cas en écoutant bien les acteurs locaux. D'où la nécessaire « conviction » que l'international est un volet essentiel pour les collectivités locales aujourd'hui.
Et curiosité car j'ai la chance de rencontrer des personnes très variées, diverses qui ont chacune le service public ou les communs comme ligne directrice. Pouvoir faire des passerelles entre le Sud de la France et le Nord de la Méditerranée, les communes de Gironde et le Togo ou l'Est français et l'Est Européen, c'est stimulant.
Qu'est-ce qui vous fait lever chaque matin ?
Yannick Lechevallier : L'incompréhension devant notre rapport local au monde global. Nous avons le privilège en France d'avoir une certaine stabilité et une aisance certaine (du moins collective). Mais l'évolution positive de notre société reste fragile et nous devons poursuivre la recherche sur la démocratie, le droit, sur comment faire société. Ainsi, chaque matin, je cherche dans ma revue de presse, les passerelles entre le local et le global pour proposer aux acteurs locaux d'autres perspectives, d'autres points de vue et construire une nouvelle rencontre interculturelle entre pairs qui interpelle, interroge et enrichisse. Actuellement, j'essaye de faire regarder les diversités sur les territoires par des diagnostics de mondialité : faire en sorte que la multiplicité dans la population des villes françaises soit connue, reconnue, prise en comptes dans les écoles, les médiathèques, l'odonymie, les langues pratiquées, le social ou l'urbanisme. Voilà ce qui me pousse, chaque matin, à ouvrir l'ordinateur ou à prendre le train pour aller rencontrer une collectivité.
Quel est le projet qui vous a le plus marqué ou dont vous parleriez avec fierté ?
Yannick Lechevallier : C'est sans doute le projet actuel de création d'un Vivier des Expertes et Experts de la Territoriale pour l'international (www.ocil-expat.org/veeti) : réussir à enclencher une dynamique de mobilité, à grande échelle, des agents territoriaux de toutes collectivités, pour des missions internationales (en Ukraine, au Bénin, au Cambodge au Costa Rica voire en Europe) au service des collectivités étrangères. Le processus de décentralisation est enclenché dans de nombreux pays. Permettre à des agents territoriaux de partir à l'étranger participe à ancrer le droit et la démocratie face aux tentations autoritaires que nous voyons dans le monde entier. Mais c'est aussi une source d'innovation essentielle pour faire évoluer les métiers et les approches dans les collectivités françaises. Il faut donc installer des politiques de mobilité dans les stratégies RH des collectivités (comme dans les universités).
Avez-vous un rêve que vous souhaiteriez concrétiser ?
Yannick Lechevallier : J'ai déjà concrétisé un beau rêve : travailler quotidiennement, et depuis plus de 20 ans, mon engagement pour la construction d'échanges internationaux au service du Monde Commun. Au-delà de cela, pouvoir partir marcher dans les steppes d'Asie ou les Andes sur plusieurs mois mais la situation internationale rend ces projets de plus en plus aléatoires pour les occidentaux, dans certaines zones, d'où cette nécessité urgente de réinventer les collaborations internationales, en partant des acteurs publics locaux pour apaiser notre monde.
Quelles sont les rencontres qui vous ont le plus marqué dans votre carrière ?
Yannick Lechevallier : Elles ont été nombreuses de part mon activité.
C'est avant tout Michel Hauchart, adjoint aux relations internationales à Grande Synthe dans les années 1990 et sa femme Nicole. C'est auprès d'eux que j'ai ancré ma conviction des rencontres internationales mutuellement avantageuses. Les débats et les soutiens de Laure Feret, Directrice des Relations internationales au Département de l'Essonne et d'Élizabeth Barincou, alors responsable RI dans plusieurs collectivités, lorsque j'ai lancé mon activité, ont été essentiels pour moi : inspirants, motivants.
Et ponctuellement comme cet échange avec l'Ambassadeur Éric Chevalier, alors en charge de la Cellule d'Urgence au Quai d'Orsay, qui 15 ans après, est à l'origine du projet VEETI que je construis avec Jean-Louis Rocheron de l'AATF et Françoise Couespel de l'AITF.
Quelle est votre citation préférée et pourquoi ?
Yannick Lechevallier : « Impose ta chance, serre ton bonheur et va vers ton risque. À te regarder, ils s'habitueront. » de René Char. C'était la phrase qu'il y avait en grand dans la chambre d'une amie quand j'étais étudiant et que je me répète régulièrement depuis. Je suis toujours à chercher à proposer de nouvelles idées, à essayer d'ouvrir sur d'autres points de vue, d'alerter sur la nécessité de la relation à l'Autre... Et cela n'est pas obligatoirement simple.
Quelle est votre routine quotidienne pour prendre soin de vous ?
Yannick Lechevallier : Je la cherche encore... donc je suis ouvert à toute idée !
Quels sont les deux changements les plus importants qui ont impacté votre carrière ?
Yannick Lechevallier : Le premier changement a été un conflit violent pour moi, dans mon premier emploi. J'ai pu rebondir et prendre le temps ensuite de construire mon projet autour du conseil indépendant pour les collectivités.
Le second est récent : c'est l'accompagnement par Cécile Bédouin, qui m'a proposé un coaching inspirant et ouvert à d'autres possibles. Un troisième, futur : l'ouverture de bureaux en octobre prochain avec un centre de documentation sur l'action internationale des collectivités, à Neuilly Plaisance (93).
Propos recueillis par Hugues Perinel
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