Rendre la contraception gratuite pour les mineures, le sujet fait débat au gouvernement

Publié le 16 février 2012 à 0h00 - par

Un rapport publié jeudi suggère de rendre la contraception gratuite pour les mineures afin de prévenir les grossesses précoces. Une proposition soutenue par la secrétaire d’Etat à la Jeunesse, Jeannette Bougrab, mais pas par sa collègue de la Santé, Nora Berra.

Ce rapport, cosigné par le gynécologue Israël Nisand, demande à la Sécurité sociale et aux laboratoires pharmaceutiques un effort conjoint pour permettre un accès entièrement gratuit à la contraception pour les jeunes. Comme l’Inspection générale des affaires sociales en 2010, la députée (UMP) Bérengère Poletti dans un rapport de 2011 ou encore le Centre d’analyse stratégique, ce rapport fait le constat d’un accès défaillant des jeunes à la contraception, et prône, entre autres, sa gratuité. « Aujourd’hui, on est dans cette situation paradoxale où la contraception d’urgence (la « pilule du lendemain », ndlr) est gratuite et anonyme, mais pas la contraception régulière », déplore Mme Bougrab, interrogée par l’AFP.

Concrètement, la gratuité et l’anonymat ne sont possibles que dans les centres de planification, peu présents en zones rurales et dont les horaires ne sont pas forcément adaptés aux lycéens, rappelle le rapport Nisand. Les auteurs proposent donc un « forfait contraception pour mineures auquel les laboratoires (…) pourraient adhérer », qui serait remboursé « directement aux pharmaciens », à un prix de 7 euros mensuels environ. Une feuille de soins anonyme complèterait le dispositif. Jeannette Bougrab, qui dit soutenir cette proposition, ajoute que « certains laboratoires » ont déjà manifesté leur intérêt.

Mais le ministère de la Santé estime qu’il « n’est pas nécessaire de passer par la loi », a indiqué à l’AFP l’entourage de la secrétaire d’Etat Nora Berra. Elle a « déjà donné instruction aux Agences régionales de santé pour renforcer le rôle du Planning familial » et des centres de planification, à même de répondre aux éventuelles difficultés des mineurs, selon la même source.

12.000 avortements sur des mineures en 2009

A travers cette proposition, les auteurs, qui prônent aussi une éducation à la sexualité renforcée ou la taxation des contenus internet pornographiques (soutenue également par Mme Bougrab), entendent lutter contre les grossesses non prévues et les avortements chez les adolescentes. Le rapport déplore ainsi que près de 12.000 avortements aient été pratiqués en 2009 sur des mineures contre 8.700 en 1990.

Mais là où Mme Bougrab voit « une banalisation du fait d’être enceinte à quinze ans » et alors que les auteurs du rapport estiment que la pornographie vient induire des comportements à risque chez les jeunes, la chercheuse Nathalie Bajos (Inserm) nuance quelque peu les choses. « D’une part, souligne-t-elle, les chiffres ont un peu baissé depuis 2006 ». De plus, « ces chiffres en eux-mêmes n’ont pas grand sens. Ce qu’il faut regarder, ce sont les taux d’IVG car tout dépend du nombre de femmes concernées » : on comptait 10,4 avortements pour 1.000 jeunes de 15 à 17 ans en 2009, contre 11,2 en 2006 et 9 en 2001. De plus, s’interroge-t-elle, « est-ce qu’une hausse traduit une plus grande prise de risque, ou simplement un recours plus fréquent à l’avortement en cas de grossesse non prévue ? » Quant au rôle de la pornographie, elle estime que « ce n’est pas si simple » car « les jeunes savent que c’est du cinéma ». S’il y a à l’évidence des marges de progression dans l’accès à la contraception, elle déplore que « nombre de propos sur la sexualité des jeunes et l’avortement soient normatifs et moralisateurs ».

Avec AFP


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