Les politiques publiques locales devraient promouvoir le « stockage de chaleur intersaisonnier »

Publié le 1 mars 2024 à 15h00 - par

L’Académie des technologies préconise, lorsque c’est réalisable, d’installer des systèmes de géothermie « à recharge active ». Destinés aux bâtiments neufs ou existants, dans l’habitat individuel et collectif ou dans le tertiaire, ils peuvent aussi être couplés aux réseaux de chaleur des collectivités.

Les politiques publiques locales devraient promouvoir le "stockage de chaleur intersaisonnier"
© Par VectorMine - stock.adobe.com

Alors que les solutions se multiplient pour faire face au réchauffement climatique, un rapport de l’Académie des technologies met en avant la géothermie à recharge active, plus performante que la géothermie classique. Objectifs : réduire les émissions de gaz à effet de serre et le coût du chauffage, mais aussi augmenter la souveraineté énergétique du pays. Le procédé consiste à stocker de la chaleur en été pour l’utiliser l’hiver et, inversement à stocker du froid en hiver pour rafraîchir en été. Des pompes à chaleur restituent la chaleur, stockée à une température inférieure à 40°C, pour chauffer ou rafraîchir les bâtiments et produire l’eau chaude sanitaire. Quand la géothermie traditionnelle utilise la chaleur naturellement présente dans le sous-sol, la géothermie active repose sur des dispositifs qui s’appuient sur des sources d’énergie complémentaires : panneaux solaires thermiques, chaleur fatale industrielle, eaux usées, centre de calcul, rafraîchissement par le sol, système frigorifique… Mais pour que le projet soit viable, ces sources doivent être disponibles, bas carbone et peu coûteuses.

Quelques cas d’usage existent en France et à l’étranger (Suisse, Suède, Danemark…). L’examen des cartes du Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM) montre que le potentiel concerne la quasi-totalité du territoire, a expliqué le professeur Yves Bamberger, président honoris causa de l’Académie des technologies, lors de la présentation du rapport à la presse le 29 février 2024. En revanche, dans les zones de construction dense (environ 5 % du territoire), le manque de terrains disponibles, l’encombrement du sous-sol et la difficulté d’acheminer le matériel de forage ou de forer peuvent conduire à renoncer au projet.

Plan d’action géothermie

Outre la densité de bâtiments, l’étude doit prendre en compte notamment la géologie du sous-sol, la présence de nappes phréatiques et la proximité de réseaux d’assainissement de capacité suffisante. Les collectivités qui exploitent un réseau de chaleur peuvent y intégrer un dispositif de stockage afin de réduire le contenu carbone de tout ou partie de sa production. Il est également possible d’ajouter des panneaux solaires thermiques ou photovoltaïques à l’occasion d’une rénovation, afin d’augmenter la quantité de chaleur disponible pour le stockage. Et, dans les zones peu denses en périphérie urbaine, même un petit jardin permet d’adopter une solution individuelle de géothermie active. De même, dans les lotissements, une solution globale avec un petit réseau de chaleur ou une boucle froide peut représenter une solution économique, grâce à la mutualisation des sources d’énergie et des frais de fonctionnement.

Le plan d’action géothermie gouvernemental de février 2023 fixe l’objectif de produire 100 térawatts/heure en 2040, soit un quart de la chaleur nécessaire pour le bâtiment. Un effort considérable, puisque cela suppose de parvenir à installer chaque année 3 gigawatts de puissance, c’est-à-dire autant que la puissance totale installée en 2020. Selon le professeur Bamberger, si la moitié de la géothermie reposait sur des recharges actives, cela permettrait d’économiser l’équivalent d’un EPR. Avec, certes, un budget important. Toutefois, l’investissement peut se révéler moins coûteux et plus efficace qu’une isolation thermique lourde de bâtiments. Les performances thermiques sont plus efficaces et les dépenses de fonctionnement sont réduites.

Martine Courgnaud – Del Ry

La géothermie consiste à récupérer la chaleur présente dans les nappes d’eau souterraines où la température de l’eau se situe entre 50 et 95°C pour la transformer en énergie. La chaleur prélevée est transférée au réseau urbain pour alimenter en chauffage ou en eau chaude sanitaire les bâtiments d’un quartier. L’eau est ensuite réincorporée dans la nappe souterraine. En alimentant son réseau de chaleur par la géothermie, Rueil-Malmaison (Hauts-de-Seine, 80 000 habitants) évitera chaque année l’émission de 21 000 tonnes de CO2 — l’équivalent de 11 600 véhicules en circulation.


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