Marie Fontanel, directrice générale adjointe de l’ARS d’Alsace, Patrick Pelloux, médecin urgentiste au SAMU de Paris, et Annie Soussy, cheffe de l’Unité médico-judiciaire du Centre hospitalier intercommunal de Créteil, ont remis le 5 novembre, à Marisol Touraine, ministre des Affaires sociales, de la Santé et des Droits des femmes, et à sa secrétaire d’État chargée des Droits des femmes, Pascale Boistard, leur rapport relatif à la définition d’un protocole national pour l’amélioration de la prévention et de la prise en charge des femmes victimes de violences.
Ce rapport prépare la mise en œuvre de ce protocole, mesure phare du 4e plan interministériel de prévention et de lutte contre les violences faites aux femmes (2014-2016). L’objectif de ce protocole est de « créer un parcours continu pour les victimes de ces violences en encourageant la mise en réseau des professionnels chargés de les accompagner et en simplifiant leur prise en charge ».
« Il est nécessaire de réaffirmer le rôle et la responsabilité des professionnels de santé dans la prévention, le dépistage et la prise en charge des violences et de rééquilibrer l’organisation des interventions au profit d’une porte d’entrée sanitaire, plaident les trois auteurs du rapport. Au-delà, il s’agit de sortir d’une banalisation de la prise en charge des femmes victimes de violences qui est désormais désuète et inappropriée à la France du XXIe siècle ». Leurs propositions visent donc à « déplacer le curseur pour donner une plus grande place et, ce faisant, une plus grande responsabilité, aux acteurs de santé et d’accompagnement social pour privilégier le prendre soin, qui inclut la bienveillance, la protection, l’accompagnement des femmes victimes de violences ; cela nécessite de soustraire les femmes à la cause des violences dont elles sont victimes, sans en faire le point cardinal dans un parcours de prise en charge ».
Que doit contenir le protocole ?
Les rapporteurs n’ont pas souhaité identifier « une organisation idéale et unique, qu’il serait vain de vouloir répliquer en tout point du territoire ». Selon eux, les organisations de prise en charge des femmes victimes doivent être adaptées au contexte et à l’histoire d’un territoire. Néanmoins, dans tous les cas, celles-ci « doivent veiller à garantir une prise en charge pluri-disciplinaire, co-responsable et coordonnée (enjeu de connaissance respective et de lisibilité des ressources), expérimentée (enjeu de formation et d’outils de repérage) et soucieuse de la victime de violences (enjeu de faciliter les démarches et ne pas alourdir les difficultés du parcours). Ce sont les trois grands principes que toute organisation territoriale de prévention et de prise en charge des femmes victimes de violence doit veiller à respecter et donc que les protocoles locaux devront inclure ».
Selon le rapport, le protocole doit donc comporter trois parties :
- 1re partie : Identifier les ressources du territoire et savoir orienter une femme victime de violence, en distinguant les prises en charge en situation aiguë ou en situation chronique
Le protocole local doit contenir la présentation des ressources du territoire qu’un professionnel de santé ou travailleur social de première ligne pourra rapidement identifier pour faciliter l’orientation de la femme qui s’est présentée. - 2e partie : Se former aux violences et disposer d’outils d’aide au repérage et à la prise en charge des femmes victimes de violences
Au-delà de son premier objet d’identification des ressources, le protocole doit organiser celles-ci, de manière à garantir une prise en charge adaptée aux femmes victimes de violences. Dès lors, il doit s’attacher à proposer une formation et des outils destinés à favoriser le repérage des violences et une meilleure prise en charge. - 3e partie : Simplifier la prise en charge des femmes et leur garantir un suivi systématique
Enfin, le protocole doit s’évertuer à permettre que l’organisation des ressources choisie par les acteurs locaux satisfasse l’objectif de simplifier les démarches pour les femmes, d’éviter les heurts et déplacements dans le parcours, d’assurer un suivi après les premières démarches d’urgence.
Qui coordonne l’élaboration du protocole ?
Les services de l’État pilotant les politiques de santé et de sécurité doivent être, « conjointement », investis de la mission d’organiser la prise en charge. « La coordination et l’animation institutionnelle des acteurs de cette prise en charge est essentielle », insiste le rapport. À cet effet, il propose deux options :
- Confier la coordination des acteurs et la responsabilité de l’élaboration des protocoles locaux aux agences régionales de santé (ARS) ;
- Placer le pilotage de l’élaboration et du suivi des protocoles à un niveau interministériel, ce qui pourrait « apporter une garantie de mobilisation plus forte de l’ensemble des partenaires ».
À l’occasion de la remise du rapport, Marisol Touraine et Pascale Boistard ont réaffirmé « leur volonté de renforcer la prise en charge sanitaire des femmes victimes de violences et la coordination des acteurs dans les territoires ». Elles étudieront les propositions du rapport dans les semaines qui viennent pour présenter des « mesures volontaristes » le 25 novembre, date de la Journée internationale pour l’élimination des violences faites aux femmes.