Ce régime spécifique se caractérise par un scrutin de liste à l’échelle sectorielle ou des arrondissements, distinct du périmètre communal, et par une désignation des maires et conseillers municipaux s’opérant au second degré, constituant ainsi un scrutin indirect.
1. Les objectifs poursuivis
Les auteurs de cette proposition de loi articulent leur démarche autour de plusieurs arguments juridiques et de principes démocratiques fondamentaux. Ils mettent en exergue la nécessité de renforcer la lisibilité du processus démocratique, en permettant une identification claire par l’électorat des candidats et du niveau de représentation concerné. L’instauration du suffrage universel direct est présentée comme un moyen d’accroître la responsabilité politique des élus, en supprimant le mécanisme de désignation indirecte qui dilue le lien direct entre l’électeur et l’élu communal. Un impératif d’harmonisation du droit électoral local est également avancé, visant à rapprocher le régime applicable à ces trois métropoles du droit commun régissant les élections municipales dans l’ensemble des autres communes françaises, conformément au principe d’égalité devant la loi et le suffrage. Enfin, la proposition entend prévenir les effets potentiels de « prime majoritaire excessive », inhérents au système actuel où une majorité relative dans quelques secteurs peut engendrer une majorité absolue disproportionnée au sein de l’assemblée délibérante centrale.
2. Les éléments clés de la réforme
La proposition de loi articule sa réforme autour de plusieurs axes majeurs :
- Abrogation du régime PLM : suppression intégrale du cadre juridique spécifique défini par la loi du 31 décembre 1982.
- Instauration d’un double scrutin direct et simultané : mise en place de deux élections distinctes se déroulant dans les mêmes conditions.
- Un scrutin de liste à l’échelle de la commune pour l’élection des conseillers de Paris ou des conseillers municipaux de Lyon et Marseille, fondé sur le principe du suffrage universel direct.
- Un scrutin de liste à l’échelle de l’arrondissement pour l’élection des membres des conseils d’arrondissement.
- Adoption d’un scrutin proportionnel à deux tours avec prime majoritaire limitée : alignement sur le régime électoral des communes de plus de 1 000 habitants, avec une attribution d’une prime majoritaire plafonnée à 25 % des sièges à la liste arrivée en tête (contre 50 % actuellement).
- Articulation institutionnelle entre les niveaux communaux et des arrondissements : possibilité pour un candidat de figurer sur les deux listes. Institution d’une faculté pour le maire d’arrondissement d’assister au Conseil de Paris ou au conseil municipal, avec un droit de se faire entendre sur les affaires relatives à son arrondissement, même sans être membre de l’assemblée délibérante centrale. Création d’une « conférence des maires », instance de coordination présidée par le maire de la ville et regroupant les maires d’arrondissement, appelée à se réunir au moins une fois par an à l’initiative du maire de la ville ou à la demande de la majorité des maires d’arrondissement, sur un ordre du jour déterminé, dont les modalités de fonctionnement seront définies par le règlement intérieur du conseil.
- Définition des circonscriptions sectorielles et de la répartition des sièges de conseillers d’arrondissement : trois tableaux annexés à la proposition de loi fixent, pour chaque ville concernée, la composition des secteurs regroupant les arrondissements et le nombre de sièges de conseiller d’arrondissement attribué à chaque secteur, imposant une stricte égalité numérique entre le nombre de candidats et le nombre de sièges à pourvoir par liste.
3. Les étapes ultérieures
Le texte a franchi une première étape significative avec son adoption en première lecture par l’Assemblée nationale le 9 avril 2025, recueillant 183 voix favorables contre 53. Il sera soumis à l’examen du Sénat au printemps 2025. En cas d’adoption conforme par les deux chambres, la promulgation de la loi pourrait intervenir rapidement. En cas de désaccord persistant, une procédure de commission mixte paritaire (CMP) serait nécessaire pour tenter de concilier les positions.
L’objectif déclaré est une application de ces nouvelles dispositions électorales à compter des prochaines élections municipales de 2026. Par ailleurs, la proposition de loi prévoit une obligation pour le gouvernement de transmettre au Parlement, dans un délai de six mois suivant la promulgation éventuelle de la loi, un rapport évaluant les potentiels transferts de compétences de la mairie centrale vers les mairies d’arrondissement au sein des villes de Paris, Lyon et Marseille, ouvrant ainsi la voie à une possible redéfinition des équilibres institutionnels locaux.
Dominique Volut, Avocat-Médiateur au barreau de Paris, Docteur en droit public