Surirradiés d’Epinal: les radiothérapeutes jugés pour homicide involontaire

Publié le 9 janvier 2012 à 0h00 - par

Deux radiothérapeutes mis en cause dans l’affaire des surirradiés de l’hôpital d’Epinal ont été renvoyés en correctionnelle pour homicide involontaire, contre l’avis du parquet, a-t-on appris vendredi de source judiciaire.

En décembre, le procureur du pôle santé du tribunal de grande instance de Paris avait requis un renvoi uniquement pour « omission de porter secours » à l’encontre des deux professionnels, pourtant mis en examen pour homicide involontaire en 2008 avec un radiophysicien de l’établissement. Les deux juges d’instruction du pôle santé, Anne-Marie Bellot et Pascal Gand, ont également renvoyé l’hôpital d’Epinal en tant que personne morale, sa directrice, le directeur de l’Agence régionale de l’hospitalisation de Lorraine et la directrice de la Ddass de l’époque, pour omission de porter secours.

Au moins 5.500 personnes ont été victimes de surirradiations au centre hospitalier Jean-Monnet entre 1987 et 2006, faisant de l’affaire d’Epinal le plus grave accident de radiothérapie recensé en France. Parmi ces victimes, 24 ont été très fortement irradiées pendant le traitement d’un cancer de la prostate entre mai 2004 et août 2005, dont au moins cinq sont décédées des suites des surdoses.

Deux causes ont été identifiées à l’origine des surirradiations. D’une part, une modification erronée des paramètres techniques lors du passage à une nouvelle génération d’appareils en 2004. Selon les juges, ce passage n’a fait l’objet au sein du service de radiothérapie d’aucune préparation, sans calendrier et sans la moindre concertation. D’autre part, la non-prise en compte de doses d’irradiations de contrôle, dites « matching », lors des séances de traitements aux patients, a provoqué une deuxième cohorte de centaines de surirradiés à partir de 2006. Pour les juges, cette dose a été négligée dans l’étude dosimétrique, le physicien ayant affirmé qu’elle était négligeable.

Conformément à un rapport de l’Inspection générale des affaires sociales (Igas) rendu lors de l’instruction, les juges ont par ailleurs pointé l’absence de réaction de l’ARH et de la Ddass au début de l’affaire. Les patients ont été en effet informés tardivement des surirradiations, alors que les médecins et les autorités avaient été mis au courant des différents dysfonctionnements et de leurs conséquences. « On a désormais la certitude qu’il y aura un procès, que l’on espère fin 2012 », a réagi auprès de l’AFP le président de l’Association vosgienne des surirradiés de l’hôpital d’Epinal (AVSHE), Philippe Stabler. « Les réquisitions du procureur ne nous satisfaisaient pas : les juges ont repris le chef de prévention d’homicides involontaires, c’est un baume au cœur. La saine colère qui nous anime depuis cinq ans a porté ses fruits », a-t-il ajouté. L’avocat de l’association, Me Gérard Welzer, a par ailleurs souligné que « dans une catastrophe comme celle-ci, le rôle du juge d’instruction a été très important. Sans lui, il y aurait eu un risque que cette affaire soit enterrée ».

Copyright © AFP : « Tous droits de reproduction et de représentation réservés ».
© Agence France-Presse 2011


On vous accompagne

Retrouvez les dernières fiches sur la thématique « Santé »

Voir toutes les ressources numériques Santé