Aides sociales légales : un rapport ausculte les divergences territoriales dans les modalités d’attribution

Publié le 31 juillet 2025 à 10h05 - par

Une mission IGF-IGAS formule 23 propositions pour harmoniser les pratiques entre départements et la gestion de cinq aides sociales légales.

Aides sociales légales : un rapport ausculte les divergences territoriales dans les modalités d'attribution
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L’allocation aux adultes handicapés (AAH), l’allocation d’éducation de l’enfant handicapé (AEEH), l’allocation personnalisée d’autonomie (APA), la prestation de compensation du handicap (PCH) et l’aide sociale à l’hébergement (ASH) ont représenté des versements de 30 milliards d’euros pour la seule année 2023. Publié le 16 juillet 2025, un volumineux rapport (près de 800 pages !) de la mission conjointe de l’Inspection générale des finances (IGF) et de l’Inspection générale des affaires sociales (IGAS) analyse les écarts territoriaux dans l’attribution de ces cinq aides sociales légales du champ de l’autonomie. Les inspecteurs de l’IGAS et de l’IGF mettent en évidence des différences importantes entre départements, tant en densité (nombre de bénéficiaires) qu’en intensité (montants versés), dues en partie à la démographie, à l’offre locale de services à la personne et aux modalités d’instruction des demandes.

En partie décentralisées, ces prestations font intervenir plusieurs acteurs : départements, Maison départementale des personnes handicapées (MDPH), Caisse d’allocations familiales (CAF), Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA), État. En outre, celles-ci relèvent de logiques variées : minimum social pour l’AAH, compensation personnalisée pour l’APA, la PCH et l’AEEH ou soutien à l’hébergement pour l’ASH. Ces dernières années, les versements d’aides sociales légales ont augmenté plus rapidement dans le champ du handicap (de l’ordre de + 7,5 % par an), notamment en raison de l’extension législative des droits (déconjugalisation de l’AAH, PCH « psy »). Les montants des aides en faveur des personnes âgées en perte d’autonomie ont progressé à un rythme plus modéré, malgré le rattrapage récent des tarifs socles des services d’aide à domicile. Cette situation devrait, à droits constants, s’inverser avec l’arrivée prochaine des générations nées après-guerre aux âges où la prévalence de la dépendance augmente rapidement.

Les écarts de pratiques sont consubstantiels, d’une part, à la décentralisation et à la libre administration des collectivités territoriales, d’autre part, au caractère très individualisé de ces prestations légales, qui reposent sur une appréciation relativement subjective de la situation du demandeur (appréciation du taux d’incapacité ou du degré de limitation, analyse des retentissements du handicap ou de la perte d’autonomie sur l’environnement du bénéficiaire ou sur sa capacité à retrouver un emploi, implication des aidants).

« Même s’il n’est donc pas anormal d’observer des différences, les objectifs de justice sociale et d’équité territoriale légitiment une harmonisation des pratiques, confiée à la CNSA depuis sa création », expliquent les auteurs du rapport. La mission conjointe IGF-IGAS a donc identifié des leviers pour harmoniser les pratiques entre départements et la gestion de ces cinq aides sociales légales. À l’issue de ses travaux, elle formule 23 propositions, qu’elle accompagne d’une synthèse financière.

En premier lieu, le cadrage national (loi, règlement, guides-barèmes et référentiels) mériterait d’être actualisé, consolidé et précisé sur plusieurs aspects, s’agissant notamment du cadrage des dépenses que l’AEEH et la PCH sont (ou pas) susceptibles de prendre en charge, ou des barèmes nationaux de calcul de l’obligation alimentaire pour l’ASH, estiment les inspecteurs. En second lieu, l’application de ce cadrage national doit être rendue plus homogène, en particulier s’agissant des durées d’attribution des droits, d’une part, et des modalités de réalisation des évaluations, d’autre part, en associant autant que possible les demandeurs eux-mêmes, ajoutent-ils dans leur rapport.

« Par ailleurs, il est impératif de renforcer le contrôle sur ces prestations et de structurer une politique de lutte contre la fraude, politique aujourd’hui quasi inexistante », insiste la mission IGF-IGAS. Ainsi, elle avance plusieurs recommandations pour introduire la faculté de réaliser un contrôle d’effectivité des dépenses d’une part (AEEH), et d’en généraliser la pratique d’autre part (APA et PCH).

La mission conjointe a également étudié des mesures d’économies (réforme des barèmes APA, évolution de la base ressource de l’ASH), fiscales (meilleure articulation entre crédits d’impôt pour les services à la personne et prestations sociales versées pour les aides humaines) et proposé des mesures techniques (contrôles renforcés, dématérialisation, télégestion) « en visant à renforcer l’équité et le paiement à bon droit de ces aides sociales et d’amélioration de la qualité du service rendu aux personnes âgées et handicapées, dans un contexte de croissance soutenue des besoins et de contraintes fortes sur les finances publiques locales et nationales. »

Parallèlement, les aides extralégales des départements et des CCAS, « souvent mal articulées entre elles et avec les aides sociales régies par la loi et le règlement, gagneraient à être mieux coordonnées dans le cadre, notamment, du service public départemental de l’autonomie et sous l’égide des départements, chefs de file en matière d’action sociale », pointe la mission IGF-IGAS.


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