Le nombre de signalements de faits de violences en santé a augmenté entre 2023 et 2024. C’est le principal enseignement du rapport 2025 de l’Observatoire national des violences en santé (ONVS), publié courant septembre 2025 par la Direction générale de l’offre de soins (DGOS). Créé en 2005, l’Observatoire recense et analyse les actes de violence en milieu de santé signalés, sur la base du volontariat, sur sa plateforme dédiée. Initialement centré sur les établissements publics et privés, ce dispositif s’est enrichi en 2012 pour intégrer les structures médico-sociales, avant de s’étendre en 2023 à l’ensemble des professionnels de santé exerçant en libéral.
Une réalité préoccupante
Le rapport 2025 de l’ONVS, qui porte sur les signalements effectués en 2023 et 2024, révèle « une réalité préoccupante » : la persistance, voire l’aggravation, des actes de violences en santé, qu’ils surviennent en établissement de santé, en établissement médico-social ou en structure de ville. En 2024, 20 961 signalements d’atteintes aux personnes et aux biens ont ainsi été déclarés provenant de 556 établissements et de professionnels libéraux, témoignant d’une hausse significative, tant au niveau des déclarants (+ 17,5 %) que des incidents signalés (+ 6,7 %). Ces signalements se répartissent comme suit :
- 20 296 issus des établissements, soit 96,8 % (+ 6,7 % par rapport à 2023) ;
- 665 pour les professionnels libéraux, soit 3,2 % (+ 6,5 % par rapport à 2023).
Les établissements publics se démarquent nettement avec 352 structures (+ 17,3 % par rapport à 2023) ayant procédé à 18 206 signalements, représentant 63 % des établissements répondants. Le secteur privé, avec 199 organismes déclarants (+ 18,5 %), a contribué à hauteur de 2 046 signalements, représentant 36 % des établissements répondants.
« La hausse des déclarations reflète, à la fois, une intensification de la problématique et une meilleure appropriation de la plateforme nationale, comme en témoigne le nombre croissant de signalements. Néanmoins, cette dynamique ne doit pas occulter les nombreuses limites encore présentes, notamment la sous-déclaration persistante dans le secteur libéral et médico-social, ainsi que l’hétérogénéité des remontées d’informations entre les établissements, les services de soins et les régions », commente l’ONVS.
Une répartition géographique inégale des signalements
Au niveau régional, les variations sont particulièrement contrastées, indique l’Observatoire. Certaines régions métropolitaines enregistrent des augmentations importantes, avec une hausse de 50 % dans les Hauts-de-France (passant de 886 à 1 325 signalements), de 40 % en Bretagne (de 1 540 à 2 156), et de 24 % en Auvergne-Rhône-Alpes (de 1 095 à 1 359). Les territoires ultramarins connaissent également des progressions notables, bien que l’interprétation en pourcentage mérite d’être nuancée en raison des volumes plus faibles de signalements qui amplifient mécaniquement les variations, prévient l’ONVS. La Guyane enregistre ainsi une augmentation de 58 % (de 26 à 41 signalements) et La Réunion de 40 % (de 81 à 113).
À l’inverse, plusieurs régions affichent une diminution des signalements : – 10 % en Normandie et en Centre-Val de Loire, – 8 % en Île-de-France, – 5 % en Nouvelle-Aquitaine. « Ces disparités régionales soulèvent des questions sur l’homogénéité des pratiques de signalement et sur la réalité des phénomènes de violence selon les territoires. Elles pourraient refléter, à la fois, des différences dans la sensibilisation des professionnels à la plateforme ONVS et des variations importantes du nombre de violences en fonction des régions, potentiellement liées à des facteurs socio-économiques et organisationnels propres à chaque région », tente d’expliquer l’Observatoire.
Les actes de violence, leurs auteurs, les suites données aux signalements
Les agressions envers les personnes demeurent largement prédominantes, rapporte l’ONVS. Ainsi, l’an dernier, l’Observatoire a recensé 18 822 atteintes aux personnes (soit 88 % du total) et 2 414 atteintes aux biens, dont 940 signalements combinant les deux catégories. En établissement de santé, les violences physiques sont les plus fréquentes et affichent la progression la plus marquée, avec une augmentation de 10 % entre 2023 et 2024, augmentant de 7 734 à 8 499 signalements. En revanche, les violences verbales prédominent dans le secteur libéral, représentant 59 % des signalements en 2024 (380 cas).
Les violences sont principalement du fait des patients et résidents, qui représentaient près des trois quarts (72 %) des auteurs l’an dernier. « Ce chiffre est le reflet de la détérioration de la relation soignant-soigné, exacerbée par les contraintes organisationnelles et les attentes parfois divergentes entre usagers et professionnels », souligne l’ONVS. Les accompagnants, visiteurs et membres de la famille étaient, eux, responsables de 16 % des actes de violence en 2024. Enfin, les professionnels de santé apparaissent comme auteurs de violences dans une proportion stable de 3 %.
Les infirmier(e)s et aide-soignant(e)s sont les deux catégories de professionnels de santé les plus concernées par des actes de violences en santé (environ 90 % des professionnels de santé et 65 % de l’ensemble des victimes de violences). L’Observatoire note que peu de suites sont données aux violences en santé. Ainsi, l’an dernier :
- 1 % des signalements a donné lieu au dépôt d’une main courante ;
- 7 % au dépôt d’une plainte ;
- Dans 92 % des cas, aucune démarche n’a été entreprise.
Seule note positive du rapport : les signalements remontés auprès de l’ONVS révèlent une diminution de 16 % du nombre total de professionnels ayant nécessité un arrêt de travail à la suite de violences, passant de 302 en 2023 à 253 en 2024. Si les arrêts de travail de courte durée (1 à 5 jours) demeurent relativement stables, avec une légère baisse de 1 %, les arrêts de plus longue durée affichent des réductions significatives : 20 % pour les arrêts entre 6 et 10 jours, 24 % pour ceux entre 11 et 15 jours, 43 % pour les arrêts entre 16 et 20 jours et 28 % pour les arrêts supérieurs à 20 jours.
