« Éducation nationale » : l’école au théâtre

Publié le 16 janvier 2024 à 7h45 - par

Agression d’un prof, port de l’abaya, harcèlement, piquet de grèves… Dix comédiens et une véritable classe de lycéens transposent le quotidien d’un établissement scolaire dans « Éducation nationale », une pièce mise en scène par François Hien.

"Éducation nationale" : l'école au théâtre
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Jouée depuis mardi 9 janvier au Théâtre National Populaire (TNP) de Villeurbanne après plusieurs mois de préparation dans différents lycées, la pièce inclut aussi une professeure pour incarner… une enseignante.

« Je voulais faire le portrait des travailleurs de l’Éducation nationale », explique François Hien, pour qui « l’école est un domaine où il est très difficile de se poser les questions sainement ».

Pour l’authenticité, une classe différente de lycéens venus de différents établissements de la métropole lyonnaise monte sur scène tous les soirs : « cela donne des vertiges, différencie la pièce d’une représentation sur l’autre », sourit le metteur en scène. « Mais c’est très énergisant ».

Du bureau du directeur aux salles de cours, la pièce se focalise sur le personnel éducatif du lycée Jean Zay, établissement fictif de la ville imaginaire de Virieux-en-Vezon dans la banlieue lyonnaise. Tout se joue dans cet espace, présenté « comme un lieu de travail mais aussi d’opposition politique ».

On assiste à un piquet de grève sous la pluie devant l’établissement, puis à l’occupation de la salle polyvalente par certains professeurs. Il est « absurde de penser qu’une école idéale serait débarrassée de tensions », dit un des personnages.

Laïcité

« Qui veut faire grève le jour de la rentrée ? » : la question ouvre la pièce qui évoque aussi l’agression d’une enseignante par un élève armé d’un couteau puis le processus de sanctions disciplinaires liées à cet épisode.

« On demande beaucoup aux personnels éducatifs sans leur en donner les moyens », pointe François Hien. « Nous avons constaté que cela crée une crispation dans les débats, que l’on retrouve jusque dans les salles des profs ».

Avant cette pièce, le metteur en scène, âgé de 42 ans, s’était penché sur la question de la laïcité et des signes religieux ostentatoires dans les lieux publics avec « La Crèche, mécanique d’un conflit ». Une création inspirée par l’affaire de Baby Loup à Chanteloup-les-Vignes (Yvelines) qui avait défrayé la chronique après le licenciement en 2008 d’une salariée voilée.

Pour « Éducation nationale », François Hien a passé plusieurs mois à étudier son sujet en immersion, dans différents établissements de la région lyonnaise et notamment ceux où les classes invitées sur scène ont été recrutées.

Sabine Collardey, une professeure de philosophie et amie de longue date, a pris un congé pour participer à la dramaturgie et interpréter une enseignante. « Je me suis inspirée de mon expérience de prof mais aussi de celle de mes collègues », raconte-t-elle.

Son objectif : « que les professionnels de l’Éducation nationale retrouvent une partie de leur expérience dans cette pièce et que ceux qui y sont extérieurs découvrent cette institution ».

Similitudes

La connexion entre artistes professionnels et lycéens a encouragé une forme de dialogue sur les événements vécus par l’établissement imaginaire. « Cela représente bien ce qui peut réellement se passer dans un lycée », estime Manon, 17 ans, en terminale à Villeurbanne, tout excitée à l’idée de monter pour la première fois sur scène le soir de la générale.

Pour cette fille de professeurs, « certaines scènes de la pièce peuvent réellement se passer, y compris dans des établissements réputés. Un élève agresseur, une fille de seconde qui tombe enceinte, ce sont des histoires très terre-à-terre. »

Son camarade de classe Amine affirme, lui, que jouer dans cette pièce lui a permis de « comprendre le point de vue des profs ».

« Je n’avais pas imaginé les difficultés que peuvent connaître certains profs, ni qu’il était possible d’avoir peur d’un élève par exemple », confie l’adolescent.

Au point de créer une vocation ? « J’étais déjà intéressé par le métier de prof, mais découvrir leur point de vue et leur questionnement m’a fait réfléchir (…) On devrait pouvoir en discuter davantage dans nos établissements ».

« Éducation nationale » : mise en scène Sigolène Pétey et François Hien, jusqu’au 19 janvier au TNP de Villeurbanne (Rhône), avant une tournée nationale.

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