La LFSS validée mais des dispositions censurées

Publié le 17 décembre 2012 à 0h00 - par

HOSPIMEDIA – La Loi de financement de la Sécurité sociale pour 2013 a été validée, notamment l’article sur la variation des tarifs pour les établissements de santé. Les Sages ont néanmoins censuré une dizaine de dispositions, dont celles relatives à la visite médicale à l’hôpital et l’émission de billets de trésorerie par les hôpitaux.

Dans une décision rendue le 13 décembre 2012, les juges constitutionnels ont jugé de la conformité de la Loi de financement de la sécurité sociale (LFSS) pour 2013 dont ils avaient été saisis par plus de soixante députés et plus de soixante sénateurs de l’UMP. Ceux-ci contestaient la « sincérité » de la LFSS et la constitutionnalité d’une douzaine d’articles de la loi, adoptée définitivement le 3 décembre et qui sera promulguée dans quelques jours.

Le Conseil a jugé que les hypothèses économiques sur lesquelles sont fondées la LFSS « n’étaient pas entachées d’une intention de fausser les grandes lignes de l’équilibre de cette loi [et] a donc écarté le grief tiré de son absence de sincérité ». Il a également jugé conformes à la Constitution divers articles attaqués dont l’article 60 (ex-article 47 bis) sur la variation des tarifs nationaux des établissements de santé selon les catégories d’établissements, ainsi que l’article 72 sur les missions de l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux (ONIAM).

Pas de rupture d’égalité entre établissements

Dans le texte de saisine des sénateurs UMP, l’opposition voulait notamment voir censurée cette disposition. Elle avait été introduite par un amendement gouvernemental, relatif aux mises en réserve prudentielles visant à gager, depuis 2010, une éventuelle sur-exécution de la part tarifaire de l’ODMCO (1, qui étaient jusqu’à présent prises sous la forme de gels de dotation. Ce nouvel article ouvre la possibilité au gouvernement de créer un coefficient minorateur pouvant être différencié par type d’établissements de santé et s’appliquant à l’ensemble des tarifs de prestations. L’application de ce coefficient permet, selon le gouvernement, de constituer une réserve de crédits qui pourront être reversés en tout ou partie selon l’état d’exécution de l’ONDAM (2 ainsi que des objectifs de dépenses votés en LFSS.

L’article incriminé aurait selon les sénateurs méconnu le principe d’égalité devant la loi en opérant des différences entre établissements. Le législateur aurait, en outre, méconnu l’étendue de sa compétence. Cette disposition était dénoncée également par la Fédération de l’hospitalisation privée (FHP), qui avait vivement déploré à l’occasion d’un de leurs congrès le 6 décembre à Lyon que la mise en place du crédit d’impôt aux entreprises dans le cadre du Pacte de compétitivité soit assortie, selon les intentions exprimées par le gouvernement, d’un impact sur l’évolution des tarifs pour leurs établissements. Les Sages ont notamment jugé, qu’avec des tarifs nationaux des prestations des établissements de santé fixés et pouvant varier différemment selon les catégories d’établissements, et en complétant ces dispositions par l’institution d’un coefficient de minoration qui pourra varier selon les catégories d’établissements, « le législateur s’est fondé sur des différences de situation en lien direct avec l’objet de la loi et que le grief tiré de l’atteinte au principe d’égalité doit être écarté ».

Visite médicale et billets de trésorerie, « cavaliers législatifs »

Par ailleurs, le Conseil a censuré certaines dispositions « qui n’ont pas leur place en LFSS » (« cavaliers » sociaux législatifs), notamment faute d’impact financier. Il s’agit des dispositions de l’article 55 sur l’interdiction de publicité pour certains médicaments et certains dispositifs médicaux, l’article 58 (ex-article 46 du PLFSS) sur les présentations à l’hôpital de spécialités pharmaceutiques, et l’article 61 sur l’émission de billets de trésorerie par les hôpitaux. Sur ce dernier article, les juges ont ainsi considéré que « si les dispositions relatives aux organismes qui gèrent des dépenses relevant de [l’ONDAM] peuvent figurer en loi de financement, toutefois, les dispositions relatives à la trésorerie et à la comptabilité de ces organismes ne trouvent pas leur place » dans une LFSS.

L’article 58 est celui relatif à la mise en place de la visite médicale collective à l’hôpital de façon pérenne, à l’exception des médicaments réservés à l’usage hospitalier et de ceux à prescription et délivrance hospitalière. Remanié par la commission des Affaires sociales de l’Assemblée nationale, il restreint cette visite seulement aux médicaments prescrits à l’hôpital mais délivrés en ville. Cette disposition avait notamment inquiété la CFE-CCG quant à son impact sur l’emploi. Elle avait alors adressé un courrier en ce sens aux juges constitutionnels. Les Sages ont considéré que les dispositions de l’article « n’ont pas d’effet ou ont un effet trop indirect sur les dépenses des régimes obligatoires de base ou des organismes concourant à leur financement et ne relèvent pas non plus des autres catégories mentionnées (…) dans le code de la Sécurité sociale » et ne trouvent pas leur place dans une LFSS.

Réflexion du gouvernement sur les dispositions annulées

Il en va de même de l’article 39 relatif à la certification des comptes de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA) et du pilotage du Dossier médical personnel (DMP), ainsi que des articles 54 et 92 relatifs à des expérimentations de tiers payant. Enfin le Conseil a censuré diverses « dispositions introduites en nouvelle lecture et qui n’avaient pas de lien direct avec des dispositions restant en discussion, des dispositions contraires à la règle dite de « l’entonnoir » ». En font les frais notamment un paragraphe de l’article 67 sur l’expérimentation de la tarification des établissements accueillant des personnes âgées dépendantes et certaines des dispositions de l’article 73 relatives au Fonds d’intervention pour la qualité et la coordination des soins (FIQCS).

Dans un communiqué, la ministre des Affaires sociales et de la Santé, Marisol Touraine, et le ministre délégué chargé du Budget, Jérôme Cahuzac, se réjouissent de la validation du texte et qu’il soit « reconnu que les hypothèses économiques sur lesquelles le gouvernement avait construit le PLFSS étaient sincères ». Les ministres « prennent acte de l’annulation d’un nombre limité de dispositions du PLFSS, qui ne remet pas en cause l’équilibre du projet de loi ». Ils soulignent également que les dispositions censurées « ont été pour la plupart déclarées non conformes pour des motifs de procédure ». Enfin, ils indiquent que le gouvernement « engage une réflexion sur la manière de remplir les objectifs poursuivis dans les dispositions annulées [et] pourra notamment proposer au Parlement de nouvelles dispositions dans le cadre de projets de loi ultérieurs ».

Caroline Cordier

(1 Objectifs des dépenses d’assurance maladie relatifs aux activités de médecine, chirurgie, obstétrique (ODMCO)
(2 Objectif national de dépenses de l’assurance maladie (ONDAM)

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