Sous le regard attentif et inquiet d’Hélène Geoffroy, maire de Vaux en Velin et de Catherine Arenou, maire de Chanteloup-les-Vignes, toutes deux coprésidentes de la commission politique de la ville de l’AMF, mais aussi celui de Gilles Leproust, maire d’Allonnes et président de Villes et Banlieues, Vincent Jeanbrun, ministre du Logement et de la Ville, a pris le temps de répondre aux questions des maires, dans le cadre d’un forum consacré à la politique de la ville. Non sans humour : « C’est un ministre qui répond à vos questions mais peut-être que la semaine prochaine, je ne serai de nouveau qu’un simple député »… L’encore ministre a répondu à un certain nombre de questions, notamment sur sa conception de la politique de la ville : « La politique de la ville est souvent montrée à travers des caricatures et notre travail commun est de montrer qu’elle est riche de talents et de succes stories. Je me permets de comparer les quartiers de la politique de la ville, et je m’excuse par avance si ce que je vais dire est mal compris, à des hôpitaux : non pas que les QPV sont remplis de malades, certainement pas, mais si l’on prend une photo à l’instant T d’un hôpital, on y verra beaucoup de malades ! Mais si on va au-delà de la photo, que l’on déroule le film, on se rend compte que les gens sortent guéris des hôpitaux ! ». Mais, à ses yeux, la politique de la ville doit très vite retrouver le chemin du droit commun : « Je ne veux pas que la politique de la ville se substitue au droit commun. Ce sera un de mes combats. Je ne veux pas que les familles s’en sortent, c’est un autre cliché, comme si elles étaient dans un quartier d’où il faudrait qu’elles partent. On peut sortir de sa condition sociale de départ mais rester dans le même quartier ».
Dans l’attente du rapport de préfiguration
Vincent Jeanbrun était surtout attendu sur le volet rénovation urbaine de la politique de la ville. Côté annonce, il a assuré que, dans la continuité du rapport de Frédérique Macarez (Maire de Saint-Quentin), Dominique Schelcher (PDG de Coopérative U) et Antoine Saintoyant (Directeur de la Banque des Territoires) sur les commerces de proximité, « le mécanisme de défiscalisation du dispositif des ZFU (Zone franche urbaine) s’appliquera dans peu de temps pour les créateurs et les repreneurs d’activités dans ces quartiers ». Sur la poursuite de l’ANRU 2 vers l’ANRU 3, il est resté prudent : « La véritable transformation de nos quartiers passe par un renouvellement urbain ambitieux. Il faut déjà que l’État tienne parole, qu’il aille au bout de ce qu’il avait promis. Une mission de préfiguration est en cours, confiée à Philippe Van de Maele, ancien directeur de l’ANRU, pour savoir s’il faut un ANRU 3, s’il s’agira d’un copié-collé de l’ANRU 2, s’il faut simplement prolonger l’ANRU 2… Toutes les pistes sont sur la table et ensuite nous pourrons envisager la suite. Le rapport sera plutôt rendu autour de mars 2026 ». Il n’en dira pas plus, ce qui a provoqué le courroux d’Antoine Jamet, maire de Val-de-Reuil (Eure). « La rénovation urbaine est une réussite. Tout le monde le reconnaît. Il faut avancer pour éviter de perdre trop de temps entre l’ANRU 2 et le 3 ».
« La politique de la ville est une réussite »
Pour Hélène Geoffroy, « il est nécessaire que l’État assure que les financements de l’ANRU seront maintenus. Sur la politique de la ville, il est paradoxal que nous soyons obligés de poursuivre notre action avec plus de quartiers prioritaires à budget constant. Enfin, sur des dispositifs comme ceux des adultes-relais, des colos apprenantes ou encore du Pass’sport, les financements ne doivent pas être réduits. Il en va du maintien de la cohésion sociale ». Catherine Arenou ajoute : « La politique de la ville est une réussite, contrairement à ceux qui disent le contraire. Prenons les cités éducatives. Elles n’auraient pas été aussi efficaces il y a 25 ans en arrière si tous les acteurs aujourd’hui mobilisés n’étaient pas en première ligne ». Quant à Gilles Leproust, il redoute un effet de ralentissement dans le contexte budgétaire actuel : « Des projets sont lancés, tant au niveau de la rénovation urbaine que dans le tissu associatif. Nous devons faire avec moins d’argent de l’État et des collectivités mais nous n’avons pas d’autres choix que de poursuivre le travail engagé. Il est urgent que l’État fixe un cap », précise-t-il. À ce jour, le cap en question est encore noyé dans le brouillard indécis d’un parlement qui ne souhaite pas donner un budget au pays. Chaque jour perdu affaiblit un peu plus cette cohésion sociale sans laquelle le pays s’enfonce dans une crise toujours plus profonde.
Stéphane Menu
