Semaine de quatre jours : un retour en arrière aux dépens des élèves ?

Publié le 29 novembre 2017 à 11h56 - par

Alors que la majorité des communes devraient repasser l’an prochain aux quatre jours d’école par semaine, des experts du monde éducatif s’inquiètent d’un énième retour en arrière qui se ferait au détriment des enfants, surtout les moins favorisés.

Semaine de quatre jours : un retour en arrière aux dépens des élèves ?

Pour François Testu, président de l’Ortej (Observatoire des rythmes et des temps de vie des enfants et des jeunes), connu pour ses positions critiques sur ce sujet auquel il consacrait une rencontre lundi 27 novembre à Paris, « ce n’est pas rendre service à l’enfant que de lui proposer la semaine de quatre jours ».

Or, ce mode d’organisation devrait être majoritaire à la rentrée 2018 dans les écoles publiques, sous la pression notamment des parents et des enseignants, selon une récente enquête de l’Association des Maires de France (AMF).

Outre les 43 % de collectivités dont les écoles sont repassées à quatre jours à la rentrée 2017, l’enquête montre que 40 % de communes et 45 % d’intercommunalités supplémentaires ont d’ores et déjà envisagé les quatre jours à la rentrée prochaine.

Au nom du « pragmatisme », le ministre de l’Éducation, Jean-Michel Blanquer, a autorisé dès son arrivée au gouvernement les communes qui le souhaitent à mettre fin à la semaine de 4,5 jours, instaurée par la gauche sous le précédent quinquennat.

Là où il sera mis en œuvre, il s’agira du troisième changement de rythmes pour les écoliers en neuf ans, après la semaine de quatre jours instituée sous Nicolas Sarkozy en 2008, puis celle de neuf demi-journées en 2013 ou 2014.

Pour justifier cette réforme, le ministre dit notamment s’appuyer sur une étude montrant qu’il n’y a « pas d’impact sur les performances scolaires selon que l’on se trouve à quatre jours ou à quatre jours et demi ».

Mais cette étude des services statistiques du ministère de l’Éducation (Depp), publiée fin juin, ne compare nullement ces deux modes d’organisation, puisqu’elle a été réalisée alors que la semaine de quatre jours n’était encore rétablie nulle part dans le public.

« Plan mercredi »

« Aller à l’école cinq jours par semaine est un enjeu important pour les enfants les plus défavorisés », avertit Stéphane Crochet, secrétaire général du syndicat SE-Unsa. Selon lui, « si certains enfants ne souffriront pas d’aller un jour en moins à l’école », pour d’autres cette cinquième matinée est « cruciale » pour la maîtrise de fondamentaux comme « l’apprentissage de la langue ». « S’ils ne vont pas à l’école, ces enfants-là n’iront nulle part », craint-il.

Georges Fotinos, responsable de la cellule rythmes scolaires du ministère de l’Éducation il y a une vingtaine d’années, affirme, lui, que « la semaine de quatre jours est particulièrement néfaste pour les enfants défavorisés ou psychologiquement fragiles, en raison d’une concentration des apprentissages sans temps de respiration, sans activités qui leur redonnent confiance en eux ».

Rémy Guilleux, administrateur de l’Unaf (associations familiales), rappelle aussi que la semaine de 4,5 jours était assortie de temps d’activités périscolaires, qui ont permis à nombre d’enfants de « se valoriser ».

Jean-Michel Blanquer dit justement travailler, avec les communes, à un « plan mercredi », afin d’offrir à tous les enfants des « activités culturelles et sportives de qualité ».

Une nécessité absolue, selon François Testu. Car s’il souligne que d’un point de vue chrono-biologique « la semaine de quatre jours n’est pas la bonne solution », « le pire serait de la réinstaurer sans activités complémentaires, utiles pour le bien-être de l’enfant ».

Plusieurs acteurs déplorent aussi un retour en arrière précipité. « Bon nombre de parents s’inquiètent d’une absence de concertation », rapporte Raymond Artis, de la FCPE (parents d’élèves).

« Une réforme aussi lourde en profondeur prend du temps », regrette Myriam Naël, adjointe à la maire PS de Nantes, qui s’attend à retrouver dans quelques années « une génération » d’enfants qu’on aura « bien perturbés » avec ces multiples changements de rythmes.

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