Le rapport de l’Inspection générale des finances (IGF) et de l’Inspection générale de l’éducation, du sport et de la recherche (IGÉSR) rendu public en septembre 2024 ne va pas plaire aux enseignants et à leurs syndicats. Si l’enjeu démographique est au cœur de la politique d’encadrement des élèves du ministère de l’Éducation nationale, « il n’a été traduit que partiellement dans l’évolution des effectifs enseignants », écrivent les deux inspections générales. Selon elles, les perspectives démographiques à court et moyen terme « peuvent en effet justifier une réduction des moyens d’enseignement nécessaires, à politique éducative constante. » Dans ce cadre, la mission conduite par l’IGF et l’IGÉSR a modélisé une rationalisation de la répartition des moyens de l’enseignement scolaire sur le territoire tenant compte des caractéristiques des écoles et des établissements.
Leurs travaux proposent des méthodes d’optimisation de la répartition des moyens d’enseignement sur le territoire, prenant en compte les aspects démographiques à l’horizon 2027 et les caractéristiques sociales des élèves. Cette optimisation a, notamment, pour objectif de construire des modèles de répartition des moyens sur la base des données disponibles école par école et établissement par établissement, tout en prenant en compte les politiques éducatives en vigueur, en particulier en matière d’éducation prioritaire, précisent les deux inspections générales. Elles ont également pris en compte les taux d’encadrement existants, les contraintes de maillage territorial et les besoins différenciés selon la situation sociale des élèves, ajoutent-elles.
L’IGF et l’IGÉSR ont ainsi bâti trois scénarios. Tous trois envisagent un nombre conséquent de fermetures de classes sur la période concernée.
Scénario n° 1
La première approche porte sur une réallocation des moyens au sein des établissements par identification et fermeture des classes à effectifs trop réduits par rapport aux taux d’encadrement constatés dans les établissements de même catégorie et dans la limite d’un plafond d’effectif pour les classes restantes. Cette démarche ne crée pas de classes. Au contraire !
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- À l’école, la rationalisation des taux d’encadrement selon la méthode retenue par la mission conduirait à fermer près de 600 classes.
- Au collège, l’analyse des distributions d’élèves par classe par niveau permet d’identifier entre 1 005 et 1 436 fermetures de classes, correspondant respectivement à 0,8 % et 1,1 % du nombre de classes total.
- Au niveau du lycée, l’analyse met en évidence une suppression d’ETP comprise entre 1 387 et 1 823 ETP, associée à un excédent horaire s’échelonnant entre 12 385 et 14 199 heures, affectant en particulier les lycées privés sous contrat des milieux ruraux.
Les suppressions d’ETP au lycée concerneraient, en particulier, les communes rurales des académies de Guadeloupe, Guyane, Martinique, Aix-Marseille, Dijon, Nancy-Metz et Normandie. En proportion, les lycées privés sous contrat seraient plus affectés que les lycées publics, indiquent l’IGF et l’IGÉSR.
Scénario n° 2
La deuxième approche envisage le relèvement des seuils de dédoublement de certaines classes du primaire en éducation prioritaire et en éducation prioritaire renforcée.
Résultat : un relèvement du seuil de dédoublement des niveaux CP, CE1 et CP-CE1 se traduirait par des fermetures respectives de 117, 377, 839, 1 548 et 2 359 classes pour des seuils de dédoublement portés à 13, 14, 15, 16 et 17 élèves par classe (contre un seuil de 12 élèves aujourd’hui).
Scénario n° 3
La troisième approche vise à adapter le maillage territorial des écoles et des établissements, en adéquation avec un nombre d’élèves par établissement cohérent au niveau national et une prise en compte du temps de trajet.
- 1 925 écoles, soit 4 % du total et 4 927 ETP, pourraient être fermées au regard de leur nombre d’élèves qui pourraient être répartis à proximité d’une offre scolaire équivalente.
- 33 collèges pourraient être fermés dans ces mêmes conditions.
Si l’IGF et l’IGÉSR proposent des méthodes pour parvenir à une répartition plus efficiente des moyens de l’Éducation nationale sur le territoire, « ces modélisations ne sauraient être des recommandations à mettre en œuvre et ne peuvent se substituer à une évaluation précise des effets issus des choix actuels de politique éducative sur les apprentissages des élèves », prennent soin de préciser les deux inspections générales. Leurs travaux tracent « des pistes de travail soumises à débat et qui devront être confrontées avec les réalités de terrain (gestion des ressources humaines, contraintes immobilières ou d’aménagement du territoire…). »