Le droit opposable à la garde d’enfants, une promesse ancienne jamais appliquée

Publié le 25 juillet 2025 à 9h05 - par

Le droit opposable à la garde d’enfants de moins de 3 ans, qui a ressurgi dans le débat public cette semaine, est évoqué depuis plus de 15 ans en France sans jamais se concrétiser. Sa mise en place est jugée « irréaliste » en l’état par les acteurs du secteur qui pointent la pénurie de professionnels.

Le droit opposable à la garde d'enfants, une promesse ancienne jamais appliquée
© Par Irina 659115330 - stock.adobe.com

Une promesse de Nicolas Sarkozy en 2007

« Nous proposons de créer un droit opposable à la garde d’enfants, il s’agira de garantir à chacun une solution de garde », a déclaré lundi 21 juillet 2025 l’ancien Premier ministre et actuel numéro un du parti présidentiel Renaissance Gabriel Attal. Ce droit permettrait de « lever une inquiétude constante pour les parents » et de « lever l’un des principaux freins à la natalité ».

Promise par Nicolas Sarkozy en 2007, l’idée d’un droit opposable à la garde d’enfants – permettant aux familles de déposer un recours si ce droit n’était pas respecté – avait été en partie reprise en 2022 par Emmanuel Macron. Le chef de l’État défendait alors un « droit à la garde d’enfant », évoquant au passage une indemnisation des parents « en cas d’absence de solution ».

Depuis, le terme de « droit » a été abandonné au profit d’un « service public de la petite enfance », entré en vigueur en janvier, et d’une « garantie d’accueil de chaque jeune enfant ».

« Le droit opposable tout comme la garantie d’accueil, c’est une bonne idée sur le papier mais si on n’a pas les moyens de le rendre effectif, ça ne fonctionne pas », estime Julie Marty Pichon, co-présidente de la Fédération nationale des éducateurs de jeunes enfants (Fneje).

« C’est irréaliste, il faut mettre les moyens avant, il y a eu des annonces mais à l’heure actuelle le compte n’y est pas », acquiesce Cyrille Godfroy, co-secrétaire général du Syndicat national des professionnels de la petite enfance (SNPPE).

« Si au préalable on n’a pas augmenté le nombre de solutions d’accueil du tout petit, ce ne seront que des annonces politiques qui ne pourront être suivies d’effet », a réagi de son côté Élisabeth Laithier, présidente du Comité filière petite enfance, qui rassemble acteurs du secteur et institutions, s’exprimant « à titre personnel » sur LinkedIn.

En tension, le secteur de la petite enfance est confronté à une forte pénurie de professionnels – plus de 10 000 manquent à l’appel en crèches – et la situation devrait encore s’aggraver avec les 120 000 assistantes maternelles qui partiront à la retraite d’ici 2030.

En terme de couverture des modes d’accueil, 12 départements affichent des taux inférieurs à 50 % et 25 % des communes se trouvent dans une situation très tendue, laissant de nombreux enfants – et parents – sur le carreau, selon les derniers chiffres officiels portant sur 2023.

Manque d’attractivité et de reconnaissance des professionnels de la petite enfance

Pour couvrir l’ensemble des besoins, le gouvernement s’est fixé comme objectif de créer 200 000 places d’accueil collectif comme individuel d’ici 2030. Mais aux yeux des acteurs du secteur, il s’agit d’une gageure au vu des difficultés rencontrées par l’exécutif lors du premier quinquennat.

« Nous pensions ouvrir 30 000 places en crèches » en cinq ans, mais « nous arriverons à faire moitié moins », reconnaissait Emmanuel Macron début 2022.

En cause notamment, le manque d’attractivité persistant d’un métier mal-payé et sous-considéré. « Si on a des places mais pas de professionnels dedans, ça va être des murs vides », prévient Cyrille Godfroy.

Pour Julie Marty Pichon, « les endroits où le droit au mode d’accueil a fonctionné, par exemple en Allemagne, c’est là où il y a eu des investissements massifs, une qualité d’accueil et une reconnaissance des professionnels. En France on est encore loin du compte ».

Partie de loin, l’Allemagne, où un droit au mode de garde est entré en vigueur en 2010, a créé entre 2005 et 2018 près de 400 000 places de crèche, doublant en dix ans la capacité d’accueil, relevait dans un avis publié en 2022 le Conseil économique, social et environnemental (Cese).

Elle a également investi dans la formation « à hauteur de 11,2 milliards d’euros en 2017 et recruté plus de 600 000 personnes ». Quant à la Suède, au Danemark et à l’Islande, le droit au mode de garde y a été instauré alors que les pays avaient déjà atteint un niveau élevé de couverture.

Copyright © AFP ; « Tous droits de reproduction et de représentation réservés ». © Agence France-Presse 2025


On vous accompagne

Retrouvez les dernières fiches sur la thématique « Action sociale »

Voir toutes les ressources numériques Action sociale