À quelles conditions peut-on confier à un prestataire une mission de télésurveillance de la voirie ?

Publié le 5 février 2010 à 0h00 - par

Confier une mission de télésurveillance à un prestataire ne revient pas nécessairement à déléguer une mission de police administrative. Tel n’est précisément pas le cas lorsque le prestataire assure des missions de surveillance et de retransmission des informations, sans procéder à la constatation et à la répression des infractions. Un contrat ayant un objet aussi circonscrit est régulier. C’est ce qu’a décidé le Conseil d’État le 9 novembre 2009. Analyse et commentaire d’Olivier Caron et Alexandre Labetoule, avocats.

À quelles conditions peut-on confier à un prestataire une mission de télésurveillance de la voirie ?

Faits

La société d’économie mixte de l’aire de Fréjus (SEMAF), délégataire de la gestion et de l’exploitation de Port-Fréjus, avait confié à la société Vigitel l’aménagement et la gestion d’un réseau logistique de télésurveillance par caméras et bornes anti-panique sur l’ensemble de la zone portuaire concédée comprenant le port, les bateaux et les voies. À la suite de la résiliation de ce contrat de télésurveillance, la société Vigitel a sollicité le versement d’une indemnité en réparation de son préjudice. Sa demande a été rejetée par le tribunal administratif de Nice, qui a estimé que la convention lui confiait illégalement une mission relevant de la compétence de police administrative du maire. Elle était dès lors entachée de nullité et sa résiliation ne pouvait de ce fait ouvrir droit à indemnité. La Cour administrative d’appel de Marseille a annulé ce jugement.

Décision

Confier une mission de télésurveillance à un prestataire ne revient pas nécessairement à déléguer une mission de police administrative. Tel n’est précisément pas le cas lorsque le prestataire assure des missions de surveillance et de retransmission des informations, sans procéder à la constatation et à la répression des infractions. Un contrat ayant un objet aussi circonscrit est régulier.

Le conseil de l’avocat

Cette décision, qui aura les honneurs d’une publication au Recueil Lebon, valide les conventions de télésurveillance par lesquelles les communes ont pu confier sur le fondement des pouvoirs de police municipale du maire, prévus à l’article L. 2212-2 du Code général des collectivités territoriales, l’installation et la gestion de caméras de surveillance sur leur territoire. Elle marque également les limites de cette pratique consistant à faire participer des prestataires privés à une mission de police, expression du pouvoir régalien par excellence.

L’arrêt commenté constitue en cela un frein à toute velléité de police privée. Le prestataire doit se contenter d’assurer des missions de surveillance et de retransmission des informations sans procéder à la constatation et à la répression des infractions, sous peine de nullité de la convention. La mission des opérateurs privés se limite ainsi à la surveillance des lieux, à la gestion des alarmes et à un devoir d’alerte des autorités compétentes en cas de besoin (tels par exemple, le commissariat de police en cas d’alarme agression, le service local des pompiers en cas d’alarme incendie, ou encore le service d’EDF compétent en cas de panne d’électricité).

Texte de référence : CAA de Marseille, 9 novembre 2009, Societé Vigitel, req. n° 07MA00594, publié au Recueil Lebon

Extrait

«… qu’ainsi la société Alarme et Protection retransmettait seulement des informations, n’avait pas en charge la protection effective des lieux et ne procédait pas à la constatation et à la répression des infractions commises aux règlements de police ; que, dès lors, un tel contrat, s’il faisait participer la société Alarme et Protection à la mission exercée par le concessionnaire, pour le compte et sous l’autorité de la commune de Fréjus, n’avait pas pour autant pour objet de lui confier une mission de police administrative. »