L’article R. 42 du Code électoral ne détaille pas spécifiquement les rôles ou les attributions des assesseurs au sein du bureau de vote. Cependant, il indique leur présence obligatoire et leur qualité de membre du bureau. Chaque bureau doit être composé d’un président et d’au moins deux assesseurs. Deux membres du bureau au moins (ce qui inclut potentiellement des assesseurs) doivent être présents pendant tout le cours des opérations électorales. Un assesseur titulaire d’un bureau de vote ne peut pas exercer les fonctions de membre titulaire ou suppléant d’un autre bureau de vote (sauf dérogations spécifiques pour scrutins concomitants). En tant que membres du bureau (à l’instar du président et contrairement au secrétaire qui n’a qu’une voix consultative), les assesseurs participent aux délibérations du bureau avec voix délibérative.
Bien que ce ne soit pas détaillé dans l’article R. 42 du Code électoral, en pratique, les assesseurs sont essentiels au bon déroulement du scrutin. Leurs rôles incluent généralement :
- contrôle des identités et des inscriptions sur les listes électorales ;
- émargement des électeurs (faire signer la liste après le vote) ;
- tenue de l’urne ou de la machine à voter ;
- participation au dépouillement des votes sous la direction du président ;
- veiller au respect de l’ordre et des règles électorales.
En outre, l’article R. 43 dudit Code garantit la continuité des opérations électorales en désignant l’assesseur le plus âgé pour suppléer le président et l’assesseur le plus jeune pour suppléer le secrétaire, assurant ainsi que le bureau puisse fonctionner même en cas d’absence de ses membres clés.
1. L’interdiction de rémunérer les assesseurs
L’article R. 44 du Code électoral dispose simplement que les assesseurs ne sont pas rémunérés (la dernière phrase : « Les assesseurs ne sont pas rémunérés »). L’article 19-2°, 5e alinéa du décret n° 2013-938 du 18 octobre 2013 a posé le principe de la non rémunération des assesseurs en modifiant l’article R. 44 du Code électoral. De plus, la circulaire du ministre de l’Intérieur du 16 janvier 2020 relative au déroulement des opérations électorales lors des élections au suffrage universel direct (NTA2000661J) a ajouté que les présidents de bureaux de vote ne sont pas rémunérés.
2. La fonction d’assesseur, une mission civique
L’absence de rémunération des assesseurs s’explique par la nature de leur participation citoyenne bénévole. Le rôle d’assesseur est traditionnellement considéré comme une charge publique honoraire et une participation citoyenne bénévole au bon déroulement de la démocratie. C’est un service civique rendu à l’État. Bien qu’ils ne soient pas rémunérés (c’est-à-dire qu’ils ne touchent pas de salaire), les assesseurs qui sont salariés peuvent généralement bénéficier d’une autorisation d’absence sur présentation de leur convocation, sans retenue de salaire. Néanmoins, les élections ayant lieu le dimanche, cela reste exceptionnel. Les frais de transport et de repas peuvent être pris en charge par la commune, selon les règles qu’elles peuvent définir mais ce ne sont pas des rémunérations.
3. Quelles conséquences sur la sincérité du scrutin en cas de rémunération des assesseurs ?
Le Conseil d’État a établi le 2 décembre 2022 un principe fondamental du droit électoral français : il a jugé qu’une élection n’est annulée que si l’irrégularité constatée a altéré la sincérité du scrutin ou a eu une incidence sur le résultat final. Concernant les assesseurs, le Conseil d’État a jugé que le fait que des agents communaux rémunérés pour le service matériel aient siégé comme assesseurs, bien que contraire à l’article R. 44 du Code précité (qui interdit la rémunération), n’a pas suffi à lui seul à vicier l’élection. En revanche, il a sanctionné deux autres irrégularités – le cumul illégal de fonctions d’assesseur entre deux scrutins et la présence de signatures divergentes sur les listes d’émargement – en retranchant les voix irrégulières. Malgré ces corrections, le faible écart de voix subsistant a conduit au maintien de l’élection du binôme vainqueur. Il faut donc retenir que le juge ne sanctionne l’irrégularité formelle de la rémunération des assesseurs que si elle a une portée concrète sur l’issue du vote.
Il est nécessaire de ne pas oublier que les questions de la pénurie des assesseurs, de leur rémunération pour qu’ils participent aux opérations électorales sont corrélées avec la question de la défiance et du désintérêt croissant des citoyens envers le personnel politique actuellement. Ces questions sont des symptômes d’un système politique de plus en plus rejeté.
Dominique Volut, Avocat-Médiateur au barreau de Paris, Docteur en droit public
