Dans le cadre de son rapport 2025 sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale rendu public fin mai, la Cour des comptes a examiné le recours à l’intérim paramédical dans les établissements de santé. Le personnel concerné comprend les infirmiers, les aides-soignants et les métiers spécialisés tels que masseurs-kinésithérapeutes, manipulateurs en électroradiologie médicale ou préparateurs en pharmacie hospitalière. Inquiète d’un recours excessif à l’intérim dans les hôpitaux, la Cour appelle à « réguler » le dispositif.
En 2023, l’intérim paramédical a ainsi représenté une dépense de 825 millions d’euros, dont 472 millions d’euros pour les hôpitaux publics. Dans ces derniers, la dépense a été multipliée par six en 10 ans, pointe la Cour des comptes. Celle-ci est majoritairement concentrée dans quatre régions : Île-de-France, Auvergne-Rhône-Alpes, Centre-Val de Loire, Bourgogne-Franche-Comté. Cette année-là, 60 000 personnes distinctes ont effectué au moins une mission d’intérim, dont 27 300 infirmiers et 26 800 aides-soignants. 830 000 missions d’une durée moyenne de 2,3 jours ont été effectuées 95 % concernant des infirmiers et des aides-soignants.
Le recours à l’intérim paramédical pour faire face aux difficultés persistantes de recrutement
L’intérim est une modalité de remplacement « normalement exceptionnelle », rappelle la Cour des comptes dans son rapport. Toutefois, dans certains établissements, elle constate un recours récurrent à des intérimaires, dits fidélisés, parfois depuis plusieurs années, y compris pour permettre le fonctionnement normal d’activités. L’importance du recours à l’intérim est directement liée au manque de professionnels dans certains métiers (infirmiers spécialisés, manipulateurs en électroradiologie médicale, techniciens de laboratoire médical…), certaines spécialités (gériatrie, psychiatrie) ou organisations (travail de nuit, alternance jour/nuit), précise le rapport.
Des dépenses exponentielles
Après avoir analysé la situation d’une trentaine d’hôpitaux publics et privés, lucratifs ou non, la Cour des comptes alerte néanmoins sur l’augmentation de la dépense et sur les effets induits pour le système de santé. Pour limiter les dérives, l’exercice en intérim a récemment été interdit dans les deux premières années de la carrière, rappelle-t-elle. La loi instaure aussi de nouvelles obligations de contrôle pour les entreprises de travail temporaire et un dispositif de sanctions financières… qui ne sont pas entrés en vigueur, faute de décret d’application. « Des stratégies de contournement ont été observées, notamment par une hausse du nombre des contrats de vacataires », déplore la Cour des comptes. Par ailleurs, les mesures de plafonnement des rémunérations applicables aux personnels médicaux intérimaires ont été étendues aux personnels paramédicaux. Les conditions de cette régulation, en particulier les montants de plafonnement, restent toutefois à préciser, indique le rapport de la Cour.
Nécessité de maîtriser le recours à l’intérim paramédical
Au-delà, il importe de « traiter les causes structurelles du développement de l’intérim paramédical en améliorant la formation des professionnels paramédicaux, en régulant la concurrence entre établissements pour attirer les nouveaux diplômés et en développant l’attractivité des hôpitaux », insiste la Cour des comptes. À cet effet, son rapport formule cinq recommandations :
- Rendre obligatoires les contrôles des situations de cumuls d’emplois dans la fonction publique hospitalière (FPH) en s’appuyant sur le fichier des déclarations préalables à l’embauche.
- Clarifier sans délai le régime juridique du recours aux contrats de vacataires dans la FPH.
- Prévoir un plafonnement global des rémunérations des intérimaires paramédicaux incluant les coefficients de gestion.
- Encadrer le recours aux contrats d’allocation d’études en interdisant expressément la pratique des rachats entre établissements et en plafonnant le montant des indemnités versées et la durée d’engagement prévus dans ce cadre.
- Interdire l’exercice professionnel en établissement sous le statut de micro-entrepreneur au personnel paramédical.