En avril et en mai 2022, la Fédération hospitalière de France (FHF) a réalisé une enquête sur la situation des établissements publics de santé et médico-sociaux en matière de ressources humaines non médicales. Présentés fin juin, les résultats sont basés sur les réponses de plus de 400 établissements : 260 établissements publics de santé (EPS) employant plus de 370 000 professionnels non médicaux et 145 ESMS employant 12 000 professionnels non médicaux. Cet échantillon est représentatif de la situation générale des établissements publics, malgré des situations variables sur le territoire et selon les établissements, estime la FHF. Sans surprise, la situation des établissements apparaît « dégradée et très contrastée », avec des difficultés de recrutement hétérogènes en fonction de leur taille et une stabilisation de l’absentéisme à un niveau historiquement élevé, couplée à une hausse globale des effectifs.
Un absentéisme plus élevé qu’avant la crise
Le niveau de l’absentéisme a augmenté dans l’ensemble des types d’établissements par rapport à la situation antérieure à la crise sanitaire. En 2021, l’absentéisme moyen s’est établi à 9,9 % (11,8 % pour les ESMS), soit + 1 point par rapport à 2019 (année de référence avant crise). À titre de comparaison, ce même taux d’absentéisme était, en moyenne, de 7,4 % en 2012. Un niveau d’absentéisme élevé fragilise le fonctionnement quotidien des équipes. « Il peut devenir très difficile à gérer en cas de pics épidémiques, notamment dans les plus petits établissements ou services, quand des clusters sont détectés et mettent en difficulté la continuité des prises en charge », prévient la FHF.
Une hausse importante des effectifs, mais un nombre de postes vacants stable
Contrairement à l’image véhiculée d’une « fuite des soignants », les établissements publics ont enregistré une hausse moyenne de 3 % de leurs effectifs en équivalents temps plein (ETP) en 3 ans. Tous les types d’établissements sont concernés par cette hausse, précise l’enquête. Ces résultats sont cohérents avec les retours des établissements, qui indiquent avoir renforcé les effectifs dans les unités de soins pour faire face à l’épidémie ou avoir recruté davantage pour répondre à des besoins nouveaux (à l’instar de la vaccination), ajoute la FHF. Si les effectifs (en ETP) ont donc augmenté, en moyenne, de 3 % entre 2019 et 2021, la hausse de la masse salariale est, quant à elle, de l’ordre de + 16% !
Pour autant, si davantage de soignants travaillent dans les établissements depuis 2019, cette embellie n’a pas permis de réduire la proportion de postes vacants dans les professions aides-soignants (AS) et en infirmiers. Le dynamisme du côté de la demande de soins et la réorganisation des prises en charge ont, en effet, conduit les établissements à revoir à la hausse leurs effectifs cibles, explique la Fédération.
Ainsi, en termes de postes vacants, la situation des établissements de santé, hors CHU, s’est le plus fortement dégradée, avec une hausse de la part des postes AS vacants de + 1 point et de + 3,6 points en matière d’infirmiers diplômés d’État (soit un doublement). À l’inverse, la situation des CHU reste stable. Enfin, les ESMS ont visiblement connu une amélioration notable de leur attractivité chez les AS.
Priorité au recrutement
La quasi-totalité (99 %) des établissements connaissent des difficultés de recrutement, de manière permanente ou ponctuelle, confirme l’enquête. « Conjuguées à un absentéisme élevé, ces difficultés de recrutement pèsent lourdement sur le dynamisme des établissements. Cela réduit d’autant plus la capacité de rattrapage de l’activité en faveur des patients dont l’intervention a dû être déprogrammée lors des phases aiguës de l’épidémie », commente la FHF.
Cet écart entre les cibles de professionnels attendus et les postes réellement pourvus a plusieurs conséquences. La hausse de la fatigue des soignants est la conséquence première des difficultés de recrutement (90 % des établissements), suivie d’une hausse du recours aux heures supplémentaires (notamment dans le secteur sanitaire, avec 97 % des établissements de santé et 90 % des CHU) et du recours à l’intérim (67 % des établissements). Enfin, les CH/CHS (57 %) et, plus encore, les CHU (85 % d’entre eux) ont eu recours à des fermetures temporaires de lits, ce qui les différencient fortement des ESMS.
L’enquête précise la nature des besoins de recrutements prioritaires selon les types d’établissements. La catégorie infirmier demeure la première priorité en matière de recrutement dans la fonction publique hospitalière (FPH) : 74 % des CH, 55 % des CHU et 41 % des Ehpad. Au regard du poids dans les effectifs et de la vacance plus forte des postes, les Ehpad positionnent les AS comme première priorité, avec 53 % de déclarants. La plus faible vacance de postes IDE dans les CHU (4 %) explique pourquoi ces derniers expriment une plus grande diversité de priorités : infirmiers de bloc opératoire (35 %), infirmiers anesthésistes (5 %) et sage-femme (5 %).
« Il n’y a aucun vivier de professionnels à rechercher parmi les agents suspendus pour non vaccination », prévient la FHF. D’après son enquête, le nombre de professionnels suspendus a été divisé par quatre entre le 15 septembre 2021 (date de la mise en œuvre de l’obligation vaccinale) et le printemps 2022. Il ne représente plus que 0,3 % du total des agents des établissements, soit environ 4 000 à 5 000 professionnels tous métiers confondus, soignants et non soignants, sur 1,2 million d’agents dans la FPH.
