La Cour des comptes a rendu public, le 26 mai 2025, son rapport 2025 sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale. Elle s’inquiète d’une « perte de maîtrise des comptes sociaux ». Ainsi, en 2024, le déficit de la sécurité sociale atteint 15,3 milliards d’euros, soit 4,8 milliards d’euros de plus que la prévision initiale. L’aggravation du déficit est due, pour les trois quarts, au moindre rendement des recettes, et pour un quart à une augmentation des dépenses de la branche maladie, qui va au-delà de l’objectif assigné, pointe le rapport. En 2025, le déficit de la sécurité sociale devrait de nouveau fortement augmenter et atteindre 22,1 milliards d’euros. « Cette prévision est en outre fragile, car elle repose sur des hypothèses optimistes de croissance », juge la Cour des comptes. Elle suppose la réalisation de mesures d’économie sans précédent pour l’assurance-maladie (5,2 milliards d’euros) et une bonne tenue des dépenses de soins de ville, responsables du dérapage en 2024. Pour l’avenir, la loi de financement pour 2025 a, une nouvelle fois, dégradé la trajectoire financière de la sécurité sociale, avec un déficit qui atteindrait 24,1 milliards d’euros en 2028, sans perspective de stabilisation et encore moins de retour à l’équilibre, observe la Cour des comptes. La prévision de déficit 2027 est supérieure d’un tiers à ce qu’elle était en 2024. « La dette sociale à court terme va augmenter rapidement. Un risque croissant de crise de liquidité pèse sur ses conditions de financement », prévient le rapport.
La Cour des comptes suggère des réformes pour redresser les comptes sociaux
Le montant des allégements généraux de cotisations patronales, qui ont pour objet de réduire le coût du travail, a presque quadruplé entre 2014 et 2024, pour atteindre 77 milliards d’euros. Cette perte de recettes pour la sécurité sociale est, en principe, compensée par l’État, mais les modalités de cette compensation sont devenues défavorables, souligne le rapport. « Dans le contexte actuel de dégradation de l’équilibre financier de la sécurité sociale, une meilleure maîtrise de cette dynamique est nécessaire, tout en tenant compte des enjeux économiques associés », insiste la Cour. Le reprofilage de la réduction générale en 2026 pourrait inclure un élargissement d’assiette à de nouveaux compléments de salaires et un abaissement du plafond d’éligibilité jusqu’à 2,5 SMIC, pour une économie de 3 à 5 milliards d’euros à comportements inchangés, propose la Cour des comptes.
Dans les hôpitaux, le rapport pointe le recours excessif à l’intérim paramédical et la performance à améliorer des services support. S’agissant des retraites, la Cour alerte sur le cumul de la retraite avec une activité professionnelle – « une remise en ordre permettrait à la sécurité sociale d’économiser 500 millions d’euros par an » – et sur les retraites versées aux personnes vivant à l’étranger, qui « présentent des risques spécifiques de fraude. » Enfin, les indus non détectés restent trop nombreux, dénonce la Cour des comptes. « Un meilleur recouvrement des franchises et participations rapporterait entre 500 millions d’euros et 1 milliard d’euros à la branche maladie », estime-t-elle.
Une qualité de service et une efficacité à renforcer
La création de la branche autonomie en 2020 n’a pas apporté les résultats escomptés, déplore la Cour des comptes. Les responsabilités restent fragmentées, les concours aux départements sont illisibles, les disparités territoriales n’ont pas été réduites et le contrôle interne des sommes versées est insuffisant, énumère-t-elle. « Il faut définir une trajectoire budgétaire au-delà de 2030, pour l’arrivée dans le grand âge de la génération du baby-boom, et clarifier les responsabilités dans la programmation des investissements nécessaires », plaide le rapport.
Le modèle de la pharmacie d’officine apparaît « fragilisé sur trois plans » : la densité du maillage du réseau dans les zones rurales, les paramètres de la rémunération des officines au regard de l’extension de leurs missions et l’indépendance du pharmacien avec la financiarisation de l’offre de santé. « Les actions des pouvoirs publics restent trop modestes et doivent être intensifiées pour préserver le modèle français », recommande le rapport. Enfin, le service public des pensions alimentaires, créé en 2017, propose aux usagers une qualité de service « insuffisante » et le dispositif des pensions d’invalidité est, quant à lui, « mal piloté. »