Cinq ans après la crise sanitaire, la forte progression de l’Objectif national de dépenses d’assurance maladie (Ondam) appelle « à une maîtrise plus exigeante du rythme des dépenses », estime la Cour des comptes. Pour 2025, l’Ondam est fixé à 265,4 milliards d’euros, soit une progression de 4,8 % par an depuis 2019. Dans la perspective de la prochaine loi de financement de la sécurité sociale, les Sages de la rue Cambon identifient, au travers de 15 propositions, 3 pistes d’amélioration de l’efficacité des dépenses, qui permettraient d’effectuer entre 19,4 milliards d’euros et 21,4 milliards d’euros d’économie à l’horizon de 2029, tout en assurant la qualité et la sécurité des soins pour tous.
Resserrer les prises en charge sur les seules prestations pertinentes
En première intention, la Cour des comptes encourage à renforcer la lutte contre les fraudes à l’Assurance maladie et les remboursements indus de dépenses de santé. Elle regrette d’ailleurs que les résultats obtenus (622 millions en 2024) soient nettement en deçà des estimations de fraude (jusqu’à 4,5 milliards d’euros). Parmi les leviers à activer : donner des moyens supplémentaires aux Caisses primaires d’assurance maladie (Cpam) notamment en personnel, prérogatives juridiques ou encore moyens informatiques.
Une part des dépenses de santé pourrait par ailleurs être réduite en s’assurant davantage de leur pertinence. Car à ce jour, des prescriptions de santé sont encore en décalage par rapport aux recommandations de la Haute Autorité de santé (HAS). En outre, les dépenses les plus dynamiques comme celles liées aux affections de longue durée ou aux transports sanitaires doivent faire l’objet de contrôles plus systématiques par rapport aux règles existantes.
Engager des réformes d’efficience
Deuxième axe : mettre davantage l’accent sur la prévention en santé pour en faire une priorité. Pour la Cour des comptes, le système de santé est encore trop centré sur les soins curatifs. L’objectif est donc d’améliorer la qualité de vie des patients tout en dégageant des économies immédiates et sur le moyen terme. Plusieurs directions sont à prendre : agir auprès des jeunes pour promouvoir des comportements protecteurs de leur santé, prévenir ou retarder les maladies chroniques en limitant les hospitalisations évitables comme celles liées aux maladies respiratoires, mieux anticiper la perte d’autonomie des personnes âgées, etc.
Du côté des établissements de santé, la juridiction les encourage à mieux identifier le niveau réel de leur activité et les difficultés de recrutement des personnels nécessaires au fonctionnement des services hospitaliers. Parmi les leviers d’efficiences à prioriser : la progression de l’activité en ambulatoire, la réduction des événements indésirables graves, la restructuration des établissements de santé de petite taille confrontés à la pénurie des personnels de santé par des regroupements ou des fermetures de services, le tout en s’appuyant sur les Groupements hospitaliers de territoire (GHT).
Rééquilibrer le financement du système de santé
Enfin, le partage des efforts entre les différents acteurs et financeurs des dépenses de santé est à rééquilibrer régulièrement « dans une démarche partenariale et pluriannuelle », notamment entre l’assurance maladie obligatoire et les organismes complémentaires de santé. L’occasion aussi de renforcer les coopérations sur la lutte contre les fraudes, la pertinence des prescriptions et la prévention en santé.
Dans une approche de responsabilisation des professionnels de santé, des patients et des employeurs, des mesures complémentaires de rééquilibrage des prises en charge par les patients sont aussi à envisager, ce qui implique notamment un étalement des nouvelles mesures de l’Ondam ainsi que des réévaluations de la participation des patients, dans des proportions limitées, et des employeurs.
La Cour invite les ministères chargés de la Santé et des Comptes publics, à se saisir de ces mesures pour élaborer le prochain projet de loi de financement de la sécurité sociale proposé au Parlement.
Laure Martin