La Défenseure des droits demande un plan d’urgence pour la santé mentale des jeunes

Publié le 3 juin 2022 à 10h44 - par

La Défenseure des droits a appelé jeudi 2 juin 2022 la Première ministre Élisabeth Borne à mettre en place un plan d’urgence pour la santé mentale des jeunes face à « la gravité de la situation », estimant que des moyens « largement insuffisants » sont déployés.

La Défenseure des droits demande un plan d'urgence pour la santé mentale des jeunes

« Alors que 2022 a été désignée année européenne de la jeunesse, la Défenseure des droits, Claire Hédon, et son adjoint le Défenseur des enfants, Éric Delemar, appellent la Première ministre à prendre la pleine mesure de la gravité de la situation dans laquelle sont plongés de nombreux jeunes et à agir rapidement pour que la santé mentale des jeunes soit une priorité », a-t-elle indiqué dans un communiqué.

La Défenseure des droits avait déjà alerté en novembre sur l’état de la santé mentale des jeunes mise à mal par la crise sanitaire, avec une augmentation des troubles dépressifs et une insuffisante prise en charge psychiatrique, dans son rapport annuel sur les droits de l’enfant.

« Santé publique France lui a malheureusement donné raison en publiant des chiffres alarmants sur une augmentation des passages aux urgences pour gestes suicidaires, idées suicidaires et troubles de l’humeur chez les 15 à 24 ans », souligne le communiqué, déplorant que « pourtant, certaines structures continuent de fermer des lits en pédopsychiatrie par manque de personnels et de moyens ».

Selon le dernier bulletin de Santé publique France, les passages aux urgences pour geste suicidaire, idées suicidaires et troubles de l’humeur chez les 11-17 ans se maintenaient début mai « à un niveau élevé », supérieur à celui observé début 2021.

« Le défaut de prise en charge destroubles de santé mentale et les manquements aux droits qui en découlent constituent une entrave au bon développement de l’enfant et à son intérêt supérieur, que deux années de vagues épidémiques ont contribué à aggraver de manière très préoccupante », poursuit le texte. « Alors que le pic d’hospitalisations des adolescents de 2021 ne redescend pas, la situation de certains de ces mineurs reste dramatique, tant les prises en charge sont parfois inadaptées » a écrit Claire Hédon.

Si tous les milieux sociaux sont touchés, dans 80 % des cas les comportements suicidaires concernent des jeunes filles, ce qui n’est pas nouveau. La crise sanitaire a fait exploser le mal-être chez les jeunes : deux ans après, la vague de problèmes psychiatriques n’est pas retombée et inquiète les médecins, d’autant que les moyens manquent pour y faire face.

« Depuis septembre 2020, on observe une nette hausse des passages aux urgences pour des tentatives de suicide », affirme à l’AFP Vincent Trebossen, psychiatre de l’enfant et de l’adolescent à l’hôpital Robert-Debré (AP-HP), dans le nord-est de Paris. Ces cas y ont augmenté de 25 % en janvier, février et mars 2022, par rapport à la même période de 2021. Dans le service de psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent de Robert-Debré, on constate aussi un rajeunissement de l’âge des premiers passages à l’acte, et des prises de médicaments à des doses de plus en plus élevées. Face aux besoins croissants, certaines structures ont vu le jour comme l’Atrap dans le 20e arrondissement à Paris, qui promet une réponse rapide (48 h maximum) aux jeunes âgés de 10 à 15 ans en état de crise et qui n’ont pas de suivi psychiatrique dans leur secteur. Mais elle n’est accessible qu’aux Parisiens. Or « on est de plus en plus souvent sollicités par des demandes venant de toute la France », indique à l’AFP Anaël Ayrolles, chef de clinique en psychiatrie à Robert-Debré. « Cela doit nous encourager à revoir notre système de soins mais aussi à nous interroger sur la perception des facteurs de stress dans la société », plaide-t-il.

Pour la Défenseure des droits, il faut « sortir des approches fragmentaires et strictement sanitaires ».

Dans son rapport de novembre, elle avait fait 29 recommandations pour s’attaquer à ce problème, parmi lesquelles améliorer les dispositifs d’accueil du jeune enfant, développer le « soutien à la parentalité » et ouvrir des « maisons des adolescents » dans chaque département.

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