La vaccination des plus âgés vivant à domicile, « préoccupation majeure » des gériatres

Publié le 18 août 2021 à 8h45 - par

Mauvaise élève de la vaccination des plus de 80 ans vivant à domicile, la France doit opter pour une approche plus « territorialisée » contre le Covid-19 et « aller à la porte » des plus fragiles, insiste dans un entretien à l’AFP le gériatre Olivier Guérin.

La vaccination des plus âgés vivant à domicile, "préoccupation majeure" des gériatres

« C’est un sujet de préoccupation majeure » pour ce professeur au CHU de Nice, président de la Société française de gériatrie et gérontologie (SFGG), également membre du Conseil scientifique Covid-19. « On l’a identifié depuis avril. La courbe commençait à stagner chez les plus à risques puisque l’âge reste le principal facteur de risque tous variants confondus. »

Selon des données du 10 août 2021 fournies par Santé Publique France, la couverture vaccinale continuait d’augmenter très faiblement chez les 80 ans et plus : 83,3 % pour une dose et 79,1 % pour une vaccination complète. La couverture vaccinale était de 91 % (une dose) et 87 % (vaccination complète) pour les résidents en Ehpad ou unités de soins de longue durée (USLD).

Ces publics parmi les plus fragiles, concernés au premier chef par le rappel vaccinal (troisième dose) annoncé par le gouvernement à compter de mi-septembre, connaissent « un différentiel avec les autres pays européens : les Anglais, les Espagnols, les Portugais sont au-dessus de 95 % sur cette cible d’âge », relève le Pr Guérin. « On est moins bon alors qu’on est face à un variant Delta beaucoup plus contagieux et dangereux. »

Pour ce spécialiste, « l’explication est complexe : il y a une part assez faible de gens qui ne veulent pas se faire vacciner mais la grande majorité connaît une difficulté d’accès à la vaccination, assez proche de celle des publics précaires ».

« On voit là une limite de notre système de soins primaires fondé sur un modèle libéral », estime Olivier Guérin, qui note que « les pays qui ont réussi à avoir une stratégie efficace sont ceux où la structure de soins primaires est territoriale : le médecin généraliste a en charge un morceau de territoire (un pâté de maisons, une zone rurale…) avec tout le monde dedans. Ce n’est pas le système français où le patient choisit son médecin et le médecin choisit son patient, ce qui laisse de côté tous ceux qui sont le plus éloignés du soin par la précarité et par toutes sortes de vulnérabilités ».

« Registres canicule »

Or, « il faut aller à la porte et les vacciner chez eux, ce qui nécessite de les identifier et d’avoir l’organisation adaptée. C’est un enjeu clé si on veut éviter la saturation hospitalière et, pour les personnes concernées, d’avoir des formes graves » du Covid-19. Olivier Guérin souligne que la SFGG tient le même discours à propos du vaccin contre la grippe saisonnière.

La solution doit être « mixte » et s’appuyer beaucoup sur les collectivités territoriales. Exemple : « les CCAS (centres communaux d’action sociale) ont des registres, notamment des registres canicule, identifiant les plus fragiles et les plus précaires de nos anciens ».

Ce praticien juge essentiel que l’Assurance maladie ait été autorisée par la Cnil (Commission nationale de l’informatique et des libertés), dans un avis rendu le 7 juillet, à transmettre aux médecins traitants les noms de leurs patients non vaccinés contre le Covid-19.

Il rappelle aussi que le plan « Ma santé 2022 » créait les communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS) et portait « cette idée de regroupements d’acteurs avec un vrai projet de santé publique sur un territoire donné ». « Cette territorialisation était le début d’une réforme très profonde et très culturelle du système de santé primaire ». Mais « on a été cueilli à froid par le Covid ».

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