Le Sénat préconise de renforcer le rôle des polices municipales en cas d’émeutes urbaines

Publié le 24 avril 2024 à 10h50 - par

Procédures spécifiques dans les conventions de coordination, alignement des prérogatives des policiers municipaux sur celles des gardes champêtres… La commission des lois du Sénat propose que les polices municipales puissent intervenir sur le terrain en période d’émeutes urbaines.

Le Sénat préconise de renforcer le rôle des polices municipales en cas d'émeutes urbaines
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D’une violence inédite, caractérisées par une « expansion territoriale fulgurante », les émeutes de l’été 2023 ont touché au moins 672 communes dans 95 départements. Dans une version provisoire de son rapport, la mission d’information créée par la commission des lois du Sénat pour étudier ces événements rappelle que, contrairement à ce qu’il s’est passé en 2005, des villes moyennes ou rurales considérées calmes ont été touchées et les violences ne se sont pas cantonnées aux quartiers sensibles. Sur les 793 millions d’euros que les compagnies d’assurance ont dû débourser pour rembourser les sinistres, l’indemnisation des collectivités représente 27 %.

Parmi ses vingt-cinq propositions pour « améliorer la réponse institutionnelle » en cas d’émeutes, la mission met en avant le rôle de la police municipale. Elle estime notamment indispensable de renforcer la coordination entre les acteurs du continuum de sécurité, en particulier entre les polices municipales et les forces de sécurité intérieure, sans pour autant que leurs actions ne soient assimilables. Alors que la police municipale, plus proche du terrain, doit être une force complémentaire pour garantir la sécurité de proximité, son engagement lors des émeutes de 2023, a été « hétérogène, prévu au cas par cas et parfois désordonné ».

La mission constate que les conventions de coordination des interventions de la police municipale et des forces de sécurité de l’État sont loin d’être généralisées, et qu’elles ne comportent aucune procédure spécifique à la gestion d’émeutes urbaines (y compris sur des territoires qui ont historiquement subi de multiples événements de cette nature). Elle préconise de se fonder sur le retour d’expérience des émeutes de 2023 pour généraliser leur déploiement et mettre à jour celles qui existent, afin d’intégrer ces procédures spécifiques.

Par ailleurs, le Sénat estime qu’en période d’émeutes, il conviendrait de faciliter le déploiement de patrouilles mixtes entre forces de sécurité intérieure et polices municipales pour que les policiers municipaux, moins équipés, viennent en renfort, sans pour autant faire évoluer leurs prérogatives.

La mission propose aussi de confier aux policiers municipaux certaines prérogatives de police judiciaire, alignées sur celles des gardes champêtres, qui sont habilités à les exercer sans intervention d’un officier de police judiciaire (OPJ) : relever l’identité, accéder aux propriétés closes, rechercher les objets enlevés par les auteurs présumés de l’infraction jusque dans les lieux où ils ont été transportés et les mettre sous séquestre… En effet, la différence de situation entre les policiers municipaux et les gardes champêtres est à la fois peu compréhensible et préjudiciable en cas de crise. Après avoir été formés, les policiers municipaux pourraient, sous l’autorité directe du procureur de la République et après accord du maire, saisir des biens et objets dangereux utilisés par les émeutiers contre les forces de l’ordre et pour dégrader des biens et bâtiments (mortiers, armes par destination). Ces comportements, faciles à identifier et à caractériser, permettraient à la police municipale de verbaliser et d’opérer une saisie immédiate, sans attendre une patrouille des forces de sécurité intérieure envoyée par un OPJ.

Il faudrait également garantir l’homologation des équipements et des matériels utilisés et dématérialiser les agréments de port d’armes des policiers municipaux et des gardes champêtres.

Quant à la vidéoprotection, la mission considère qu’elle devrait être renforcée et facilitée dans les communes rurales ou de petite taille qui, aujourd’hui, ne bénéficient pas des subventions du fonds interministériel de prévention de la délinquance (FIPD). Une partie de ces aides pourrait prendre en charge les coûts de maintenance de la vidéoprotection, et la procédure de raccordement des caméras au centre municipal de visionnage et aux commissariats locaux pourrait être simplifiée.

La mission préconise aussi d’informer systématiquement le maire des interventions organisées sur sa commune et de lui permettre d’assister aux centres territoriaux de crise et aux réunions locales de sécurité, en sa qualité d’OPJ, ainsi que de former les élus locaux pour qu’ils sachent quelle conduite adopter face à des jeunes violents.

Marie Gasnier


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