Portraits d'acteurs

Guillaume Hermitte

Guillaume Hermitte

Secrétaire général de l'établissement public d'aménagement Euroméditerranée

« Mon métier consiste à sécuriser, organiser et faciliter tout ce qui peut l'être au sein de l'établissement public. »

Quelles sont vos fonctions actuelles et les grandes étapes de votre parcours professionnel ?

Guillaume Hermitte : Je suis depuis juillet 2023 le secrétaire général de l'établissement public d'aménagement Euroméditerranée à Marseille. Avant de le devenir, j'ai tout d'abord fondé puis créé une entreprise d'insertion à Paris, connue sous le nom de Puerto Cacao et qui fabriquait et vendait du chocolat artisanal issu du commerce équitable. J'ai fondé cette entreprise en 2006 et l'ai cédée en 2014, après 9 années passionnantes et éprouvantes.

Au terme de cette première tranche de vie professionnelle, j'ai décidé de passer le troisième concours de l'ENA, que j'ai donc présenté en 2015. Élève de la promotion Louise Weiss entre 2016 et 2017, j'ai ensuite été magistrat financier à la chambre régionale des comptes Provence-Alpes-Côte d'Azur entre janvier 2018 et août 2022. Puis j'ai été le directeur des Ressources Humaines de l'Assistance Publique des Hôpitaux de Marseille, pendant 10 mois seulement, avant de prendre mes fonctions actuelles.

Si vous deviez décrire votre métier actuel en 3 mots, quels seraient-ils ?

Guillaume Hermitte : Mon métier consiste à sécuriser, organiser et faciliter tout ce qui peut l'être au sein de l'établissement public.

Sécuriser, en particulier sur le plan juridique et sur le plan financier, les opérations que l'établissement public engage. Pour qu'elles soient conformes aux lois et décrets et que le risque de recours et de contentieux soit réduit au possible. Et pour qu'elles s'inscrivent dans une trajectoire financière que nos tutelles et nos partenaires jugeront toujours suffisamment saine pour qu'ils continuent à accorder leur confiance, comme depuis bientôt 30 ans, à Euroméditerranée. Et que la dynamique urbaine enclenchée puisse se poursuivre.

Organiser la façon dont les instances, internes et externes de l'établissement fonctionnent. Faire en sorte que les circuits de partage de l'information et de prise de décision soient clairs, transparents, permettent le débat, et assurent leur rôle d'arbitrage et d'orientation pour la structure. Organiser la façon dont on planifie nos activités et dont on alloue les ressources humaines, financières et matérielles pour que notre plan de charge soit supportable et respecté.

Faciliter enfin, car je perçois mon rôle et celui de mes collaborateurs, pas seulement comme celui d'un gardien du temps et des règles, mais comme celui qui saura, par l'ingénierie de ses équipes, faciliter le fait que le métier, les activités et les innovations puissent naitre, s'appliquer et se répliquer. Sans mettre en danger la structure et sa DG. Mais attentif à ce que le « support » ne soit pas un frein à l'action et l'innovation.

Quelles sont les qualités essentielles inhérentes à vos fonctions ?

Guillaume Hermitte : J'ai l'impression qu'il vaut mieux être quelqu'un de pluridsiciplinaire, ce que je crois être : compétent sur le plan des finances, des RH, du droit, des systèmes d'information ou encore du management d'équipe. Surtout, je pense que pour être un bon SG, il faut savoir faire preuve d'écoute et de transparence mais également, donner confiance. En plus d'être un bon « organisateur », ce sont ces qualités qui feront, à mon sens, qu'un bon SG saura utilement faciliter le partage de l'information et solidifier les mécanismes de prise de décision.

Qu'est-ce qui vous fait lever chaque matin ?

Guillaume Hermitte : Je crois que l'idée de contribuer à quelque chose de bien plus grand que moi, qui améliore la vie des gens, est assez crucial dans ce qui me motive au niveau professionnel. Dans mes fonctions actuelles, le fait de participer à la renaturation de 19 hectares de friche urbaine pour en faire un parc urbain qui constituera un nouveau poumon vert pour le centre-nord de la ville de Marseille ; le fait de soutenir la création d'écoles et de centres de formation qui viennent s'installer dans des quartiers qui en ont extrêmement besoin entre Arenc et les Crottes ou entre Bougainville et le Canet ; ou encore le fait d'œuvrer à la construction d'équipements publics (écoles, médiathèque, piscine...) dans ces mêmes quartiers qui en manquaient cruellement. Tout cela fait partie de cette mission de service public à laquelle je suis fier de contribuer. Que je suis heureux de pouvoir raconter à mes enfants ou partager avec des collégiens ou lycéens qui viennent découvrir ce que c'est qu'Euroméditerranée.

Quel est le projet qui vous a le plus marqué ou dont vous parleriez avec fierté ?

Guillaume Hermitte : En 2006, à 24 ans, j'ai ouvert mon premier magasin de chocolat dans le 17e arrondissement de Paris, rue de Tocqueville. Sans jamais avoir véritablement travaillé avant. Et avec un apport familial initial de 20 000 €, soit moins de 10 % de ce que cela coûterait (300 000 €). Lors de cette expérience, deux choses m'ont particulièrement marqué et  rendu fier. D'abord, la façon dont j'ai su convaincre un grand nombre de personnes pour m'apporter les fonds nécessaires et rejoindre l'aventure (en tant qu'associés, prêteurs, salariés, fournisseurs ou clients). La deuxième chose qui m'a marqué et ému, c'est le nombre de copains qui sont venus, dans les dernières semaines qui menaient à l'ouverture du magasin, m'aider dans les travaux, la logistique, la déco, l'inauguration... Je me suis senti hyper entouré et cela m'a fait chaud au cœur.

J'aurais pu parler aussi du projet d'ouverture du restaurant des Beaux Mets, à Marseille en novembre 2022 et pour lequel j'accompagne le projet depuis 2018. Mais ce sera lors d'un autre échange.

Avez-vous un rêve que vous souhaiteriez concrétiser ?

Guillaume Hermitte : J'aimerais faire un tour du monde au cours duquel on me proposerait de rencontrer à chaque fois les 10 personnes les plus inspirantes de chaque pays que je traverse. Prendre un bain de gens géniaux, partout dans le monde. Derrière le terme de « gens géniaux », j'entends, des personnes intensément engagées pour le bien de leur communauté et de leur territoire.

Quelles sont les rencontres qui vous ont le plus marqué dans votre carrière ?

Guillaume Hermitte : J'en compte trois.

Jean Marie Clément, directeur général de la Table de Cana à Gennevilliers, que je ne connaissais pas et qui m'a accueilli dans son entreprise d'insertion quand je voulais découvrir comment cela fonctionnait vraiment, puis qui est devenu mon principal fournisseur de chocolats que l'on cocréait et qu'il fabriquant dans son labo créé spécialement pour Puerto Cacao.

Tarik Ghezali, dont la force des convictions « pour faire du nous » et fabriquer des solutions m'impressionne, tout autant que sa capacité à faire que 1 + 1 = 3.

Puis Christiane Barret, « ma préfète » lorsque j'ai fait mon stage ENA en préfecture à Dijon. Qui a su me montrer que derrière la figure du préfet et de l'autorité de l'État, pouvait très bien (et très efficacement) se cacher une personnalité humble, énergique, souriante, qui aime les gens et qui n'a pas besoin des apparats de l'autorité pour incarner l'autorité.

Quelle est votre citation préférée et pourquoi ?

Guillaume Hermitte : Sans audace, pas de gloire. Parce qu'un bon copain la citait toujours quand il se lançait à la coinche avec un jeu pourri et parvenait (parfois) à faire son contrat. Mais plus sérieusement parce que je crois qu'aujourd'hui ce dont on a besoin comme valeur et comme qualité, c'est de l'audace et du courage dans notre pays. Pour innover, pour construire, pour résister, pour tout, on ne manque pas d'esprit ni de règles, ni d'outils, ni d'argent... mais souvent de courage.

Quels sont les deux changements les plus importants qui ont impacté votre carrière ?

Guillaume Hermitte : Le premier fut le passage de mon statut de chef d'entreprise à celui de haut fonctionnaire d'État. Je dois avouer que la première partie de ma vie professionnelle m'a permis de cultiver un rapport au risque qui justement sait me donner du courage. Surtout depuis que j'ai un statut professionnel si « protégé » et qui me permet justement de continuer à prendre quelques risques (toujours mesurés évidemment).

Le deuxième fut mon expérience de DRH de l'APHM, car ce fut la première fois que j'exerçais dans une organisation dont la taille, la complexité, le fonctionnement, la dimension politique et enfin la violence dans les relations humaines différaient à ce point de tout ce que j'avais connu jusqu'ici. Je n'en garde pas que de bons souvenirs, raison pour laquelle j'y suis resté peu de temps, mais j'en sors indubitablement grandi.

 

Propos recueillis par Hugues Perinel

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