Portraits d'acteurs

Thierry Vasse, Directeur Général Adjoint Éducation Enfance Jeunesse de la ville d'Orvault (44)

Thierry Vasse

Directeur général adjoint d’Orvault et vice-président de l’ANDEV

« C'est effectivement cette acculturation forte à la fonction publique d'État qui facilite le partenariat, la complémentarité des politiques publiques, l'explicitation des enjeux, la mise en cohérence et la mise en mouvement, tant pour l'accompagnement des services que pour les élus. »

Quelles sont vos fonctions actuelles ?

Thierry Vasse : Je suis Directeur Général Adjoint Éducation Enfance Jeunesse de la ville d'Orvault (44).

En fait, il s'agit de piloter l'ensemble des services de la ville qui font vivre les politiques publiques à destination des enfants et des jeunes de 0 à 25 ans et de leurs familles. Ces missions concernent environ 350 agents qui œuvrent au quotidien au sein des structures petite enfance, écoles, cuisines centrales et restaurants scolaires, centres de loisirs, centres de vacances, point information jeunesse et services généraux.

Mon quotidien présente également une interface importante avec les partenaires institutionnels concernés, les autres directions générales et bien entendu les élus qui portent ces politiques publiques.

Quelles ont été les grandes étapes de votre parcours professionnel ?

Thierry Vasse : Première partie de carrière au sein de l'Éducation nationale, différents postes et missions : détaché comme délégué départemental USEP au sein de la Ligue de l'enseignement, puis directeur d'école en milieu rural et en zone d'éducation prioritaire, formateur au Centre académique de ressources pour l'Éducation prioritaire et IUFM de Nantes, conseiller pédagogique de circonscription et inspecteur Éducation nationale en charge de circonscription et mission départementale maternelle en Vendée.

Deuxième partie de carrière en détachement dans la fonction publique territoriale : 4 années en tant que Directeur de l'Éducation de la ville de Caen, 4e année en tant que DGA Éducation Enfance Jeunesse à la ville d'Orvault.

Citez le projet qui vous a le plus marqué et dont vous êtes le plus fier ?

Thierry Vasse : Puisque je dois n'en retenir qu'un, c'est en tant que directeur d'école rurale et enseignant de classe enfantine en 1990 : avoir pu surmonter les très nombreux obstacles pour permettre à de très jeunes enfants de 2 ans et demi à 5 ans de partir en classe de découverte sur 3 jours avec 2 nuitées, à 40 kilomètres de leur village. Un projet qui me tenait fortement à cœur, fédérateur, émancipateur et pour une éducation par le vécu, en pleine nature et dans l'inconnu !

Un projet très innovant à l'époque, voire un peu fou, pour lequel il a fallu rassurer, convaincre, créer les conditions de la réussite, qui a déclenché une extraordinaire confiance et cohésion autour de l'école publique du village (dans le contexte local d'une concurrence public-privé). Ce projet a été reconduit chaque année ensuite avec une attente forte de la communauté éducative.

Avez-vous un rêve que vous souhaiteriez concrétiser ?

Thierry Vasse : Sur le plan professionnel, non, pas de rêve particulier. Plutôt des utopies parfois :

  • L'utopie de considérer qu'un jour il remontera plus de témoignages positifs que négatifs des usagers des services publics, au regard de l'extraordinaire travail de fourmi accompli quotidiennement par les agents des services publics.
  • L'utopie de constater que ces mêmes usagers des services publics comprendront et accepteront que l'intérêt général passe avant les intérêts particuliers, voire caprices irrecevables de certains.
  • L'utopie que l'ambition et le désir d'innovation l'emportent sur la tentation « trop française » de l'immobilisme et du « c'était mieux avant ! », tout particulièrement pour ce qui concerne le champ de l'éducation.
  • L'utopie que l'ouverture à l'autre, à l'intercatégoriel, au pluriprofessionnel, « à l'essayer ensemble malgré nos différences » sera plus en vogue que l'entre-soi corporatiste.

Comment décririez-vous votre engagement personnel en tant qu’acteur public ?

Thierry Vasse : Un engagement empreint de réalisme, d'objectivité, de pragmatisme, de constance et de loyauté. De bienveillance et d'exigence également dans la posture managériale ou dans la relation aux usagers, dès lors qu'il s'agit de tenir le cap de l'intérêt général face à la montée des intérêts particuliers.

Il m'apparait que ma capacité à être force de propositions, à rechercher la transversalité, l'élaboration partagée de solutions et l'efficacité, caractérise cet engagement en tant qu'acteur public.

Peut-être que mon parcours dans l'Éducation nationale m'amène aussi à cette intention permanente de vouloir « pédagogiser » la vie quotidienne, de donner du sens à l'action et de rendre explicites les attendus et les résultats.

Quelles sont les qualités essentielles inhérentes à vos fonctions ?

Thierry Vasse : Les premières qui me viennent à l'esprit sont l'écoute, la compréhension, la prise de distance et l'analyse, ou dit autrement : passer du réflexe à la réflexion !

Incontournables également, l'anticipation (être en veille permanente) et la réactivité face à l'inévitable imprévu, le partage et la sérénité dans la recherche de solutions. Sans oublier le fait d'être « ensemblier », ou de favoriser le faire ensemble, tout en étant garant d'une vision prospective.

Quelles sont les rencontres qui vous ont le plus marqué dans votre carrière ?

Thierry Vasse : Dès lors que j'ai pris connaissance de cette question, au-delà des très nombreux formidables collègues que j'ai pu côtoyer dans ma carrière, 4 noms me sont apparus de toute évidence, tant chacun d'entre eux a effectivement eu une influence sur le déroulé de ma carrière.

1. Albert Jacquard, célèbre généticien que j'ai eu l'immense chance de côtoyer en début de carrière, à l'occasion d'une formation organisée par l'USEP nationale. Un choc émotionnel et la découverte de son concept de « vraie intelligence ». Pour le jeune adulte que j'étais, une rencontre qui a certainement façonné les valeurs que je porte toujours aujourd'hui, tout particulièrement sur les questions d'éducation.

2. Danièle Vinet, ATSEM travaillant à mes côtés dans les années 90 à Lavau-sur-Loire, village où j'enseignais en maternelle. « Ma première » ATSEM, avec tous mes doutes et toutes les questions que je me suis posées sur la manière de travailler avec elle, sur son rôle, jusqu'où, comment... Une rencontre formidable qui a déclenché ce désir de mener une recherche-action sur la complémentarité des rôles Enseignants-ATSEM de maternelle. Si je suis auteur d'ouvrages sur le sujet aujourd'hui et que je suis sollicité pour parler de ces collaborations nécessaires mais complexes, c'est à cette belle rencontre professionnelle et humaine que je le dois.

3. Lucie Dessailly, Inspectrice de l'Éducation nationale avec qui j'ai collaboré durant 4 ans en tant que conseiller pédagogique. Magnifique rencontre qui m'a permis de déclencher le désir de devenir moi-même IEN et de passer le concours, alors que je ne m'autorisais pas à y songer. Lucie incarnait ce type d'IEN compétente, bienveillante, crédible, formatrice, innovante, ouverte, partenariale, accompagnante, efficace... qui a transformé ma représentation de ce que pouvait être le métier d'IEN et à laquelle je voulais bien essayer de ressembler.

4. Viviane Bouysse, Inspectrice Générale de l'Éducation nationale, que j'ai eu la chance de côtoyer la première fois dans un groupe de travail national du ministère, pour la production de ressources pédagogiques sur le langage en maternelle. Quelle rencontre, l'extrême compétence, la clairvoyance et l'humilité à l'état pur ! Et au fil de nos rencontres ou collaborations sur d'autres sujets, cette éminente experte de l'école maternelle a contribué à me former, chaque fois qu'elle prenait la parole. Comme l'ont dit d'autres avant moi, « c'est incroyable, quand on lui pose une question banale et qu'elle nous répond, on a l'impression que notre question était hyper intelligente ! »

Quels sont les deux changements les plus importants qui ont impacté votre carrière ?

Thierry Vasse : Le fait de devenir Inspecteur de l'Éducation nationale après 20 ans de carrière comme enseignant/formateur : découvrir, voir, vivre le fonctionnement de l'institution (du mammouth !) de l'intérieur. Avec la possibilité d'agir, d'infléchir, d'accompagner, de servir de poil à gratter et de résister parfois, mais avec toujours ce sentiment d'inertie difficilement contournable, et d'impression désagréable de devoir réaffirmer des évidences ou de réouvrir des portes déjà ouvertes ici ou là.

Le changement de maison, en passant après 30 ans de fonction publique d'État à la Fonction publique territoriale. Une prise de risque personnelle et professionnelle assumée, changement de métier, changement de culture, changement de réseau professionnel... Mais une grande bouffée d'air pour me relancer et redonner du sens à mon action quotidienne. Une ouverture à 360 degrés, dans un fonctionnement plus transversal que vertical, et avec de multiples découvertes, champs d'action et partenaires internes et externes. Une remise à niveau nécessaire sur bien des sujets, quelques moments de solitude face à certaines montagnes, mais un atout considérable aussi que ce passé professionnel dans l'Éducation nationale. C'est effectivement cette acculturation forte à la fonction publique d'État qui facilite le partenariat, la complémentarité des politiques publiques, l'explicitation des enjeux, la mise en cohérence et la mise en mouvement, tant pour l'accompagnement des services que pour les élus.

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