Recentrer la protection de l’enfance sur l’intérêt supérieur de l’enfant

Publié le 6 novembre 2014 à 0h00 - par

Un groupe de sénateurs a rédigé une proposition de loi visant à compléter la loi du 5 mars 2007 réformant la protection de l’enfance.

Dans un rapport d’information remis en juin 2014, au nom de la commission des Affaires sociales du Sénat, Muguette Dini, sénatrice UDI du Rhône, et Michelle Meunier, sénatrice PS de Loire-Atlantique, dressaient le constat que la loi n° 2007-293 du 5 mars 2007 réformant la protection de l’enfance est globalement une bonne loi, qui a permis au système français de gagner en lisibilité et en efficacité. Cependant, « confrontée à l’épreuve du terrain, son déploiement se heurte encore à de nombreux obstacles », expliquaient les deux parlementaires. Et d’énumérer ces obstacles : de fortes disparités territoriales, une absence de pilotage national, l’insuffisance de la formation des professionnels concernés, le manque de coopération entre les secteurs d’intervention, le retard dans le développement de la prévention, la prévalence du maintien du lien familial biologique à tout prix dans les pratiques professionnelles… En outre, la loi est « insuffisamment dotée pour répondre à l’enjeu de plus en plus prégnant de la stabilisation des parcours des enfants protégés », ajoutaient les deux sénatrices.

Selon Muguette Dini et Michelle Meunier, leur état des lieux plaide non pas pour une remise à plat complète du dispositif, mais pour des ajustements et des évolutions. Ceux-ci devant répondre à trois objectifs :
 

  • Améliorer la gouvernance nationale et locale de la protection de l’enfant ;
  • Sécuriser le parcours de l’enfant protégé ;
  • Adapter le statut de l’enfant placé sur le long terme.

Sur la cinquantaine de propositions formulées par les deux sénatrices « afin de recentrer la protection de l’enfance sur l’intérêt supérieur de l’enfant », plusieurs relèvent du domaine législatif. Un groupe de sénateurs a donc rédigé une proposition de loi relative à la protection de l’enfant, déposée sur le bureau du Sénat le 11 septembre 2014.

La protection de l’enfance concerne des enfants fragilisés par leur situation de vie, rappelle le texte. Le dispositif de protection, qui supplée temporairement ou définitivement la défaillance ou à la maltraitance parentale, se doit de leur offrir des conditions de vie de nature à les aider à se construire un avenir. « Cette question de l’intérêt de l’enfant est le fondement même du dispositif de la protection de l’enfance », insistent les sénateurs.

La loi n° 2007-308 du 5 mars 2007 portant réforme de la protection juridique des majeurs confirme que « le maintien de l’enfant dans sa famille doit être privilégié ». Toutefois, lorsque la séparation est nécessaire, l’enfant doit être assuré « d’une stabilité afin que son parcours de vie ne soit pas chaotique ». Néanmoins, différents rapports récents sur ce sujet, montrent que les parcours des enfants souffrent souvent d’un manque de suivi global et d’anticipation, avec des ruptures, des passages d’établissements en familles d’accueil, des allers et retours entre l’institution et la famille. « La multiplicité des acteurs familiaux, judiciaires, administratifs, associatifs, ayant chacun leur logique et rythme propres, obèrent la nécessaire cohérence de ces parcours d’accompagnement d’enfants en difficultés, pointent les sénateurs. D’aucuns parlent de « maltraitance institutionnelle ».

En conséquence, leur proposition de loi vise à améliorer la connaissance des parcours des publics, des dispositifs mis en œuvre, ainsi que la coordination nationale de la protection de l’enfance, afin d’harmoniser les réponses adoptées sur l’ensemble du territoire national. Elle vient préciser les modalités de prise en compte et de traitement des informations préoccupantes. Par ailleurs, le texte incite à « rechercher, pour chaque enfant dont le retour dans son milieu familial est impossible, une solution d’accueil qui lui apporte une stabilité affective durable, indispensable à son éducation et à son épanouissement personnel ». Le placement auprès d’un tiers digne de confiance pourrait ainsi être davantage développé. De même, l’adoption simple pourrait répondre à certaines de ces situations, indiquent les auteurs de la proposition de loi. Enfin, dans les cas où la rupture définitive avec la famille est nécessaire, « il convient de raccourcir au maximum les délais pour constater le délaissement parental ou la maltraitance active, afin d’offrir, dès que possible, un autre environnement familial à l’enfant, par une adoption plénière, par exemple ».

Pour les enfants relevant de l’assistance éducative, les dispositions de la loi du 5 mars 2007 « doivent être appliquées partout, qu’il s’agisse du projet pour l’enfant ou du rapport annuel de situation ». Des dispositions précisent les modalités de prise en compte de la parole de l’enfant, de celle de sa famille, des professionnels du lieu d’accueil, ainsi que les modalités de gestion des actes de la vie courante et d’information, lorsqu’un changement de prise en charge s’annonce pour l’enfant. Un administrateur ad hoc devra être nommé « plus systématiquement », pour défendre les intérêts du mineur.

« Cette proposition de loi vient donc compléter la loi précitée et rappeler que, dans tous les cas, l’intérêt de l’enfant doit être la préoccupation centrale du dispositif de protection de l’enfance », concluent ses rédacteurs.
 

Texte de référence : Protection de l’enfance : le rapport d’information de la commission des Affaires sociales, 25 juin 2014