Cette étude diffusée dans la revue Bulletin épidémiologique hebdomadaire (BEH) est la première à se pencher sur les erreurs médicales en médecine de ville en France alors que des études précédentes s’étaient focalisées sur les erreurs à l’hôpital. Dans ce travail coordonné par le professeur de santé publique Philippe Michel, il n’est pas nommément question d’erreurs médicales mais il est fait appel au concept plus vaste « d’événements indésirables associés aux soins (EIAS) ». Un EIAS est un « événement ou circonstance associé aux soins qui aurait pu entraîner ou a entraîné une atteinte pour un patient, et dont on souhaite qu’il ne se reproduise pas de nouveau ».
Pour cette étude, on a comptabilisé les EIAS dans 133 cabinets de médecins généralistes, de 19 régions françaises, durant une semaine d’activité. Résultats : pour 13 438 actes médicaux, 475 EIAS ont été répertoriés, dont 74 effets indésirables de médicaments pris par les patients. 344 événements indésirables ont été considérés comme « évitables ». Parmi ceux-ci, 42 % ont résulté d’un « problème d’organisation du cabinet » : erreur dans le dossier médical du patient, problème de gestion des rendez-vous ou même erreur d’identification du malade. Pour 21 %, les EIAS ont été associés à des erreurs de coordination et de communication entre professionnels de santé lorsque plusieurs structures ou soignants interviennent pour un patient. Dans 20 % des cas, les événements indésirables découlent de « défauts de connaissances » ou « de compétences » des médecins généralistes ou bien d’un absence de « mobilisation » de leurs connaissances.
Une grande majorité des EIAS (77 %) n’a eu « aucune conséquence clinique » pour les patients mais 21 % ont entraîné un « incapacité temporaire ». Il s’agit par exemple « d’une infection urinaire liée à un retard de traitement » ou bien de malaises suite à un retard de prise en compte des résultats d’analyse pour un diabétique. Dans 2 % des cas, ces événements indésirables ont eu des conséquences graves. Dans un cas, un homme de 87 ans, insuffisant cardiaque, est mort, faute d’avoir pu obtenir un rendez-vous de spécialiste à temps. Ce décès « est survenu en établissement de santé à la suite d’une hospitalisation dans l’urgence, alors qu’un avis spécialisé en médecine ambulatoire n’avait pas pu être obtenu », explique l’étude.
Malgré tout, les EIAS cliniquement graves sont « exceptionnels » et ne représentent que 0,06 % des 13 438 actes médicaux considérés, souligne le Pr Michel. « La grande majorité des EIAS déclarés n’ont entraîné aucune conséquence pour le patient (…). Le potentiel de nuisance de ces erreurs a été faible » selon l’auteur de l’étude.
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